Entrevue avec Sébastien Ricard, en performance solo dans «La bibliothèque interdite» – Bible urbaine

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Entrevue avec Sébastien Ricard, en performance solo dans «La bibliothèque interdite»

Entrevue avec Sébastien Ricard, en performance solo dans «La bibliothèque interdite»

Trouver la force dans le mariage

Publié le 21 octobre 2015 par Alice Côté Dupuis

Crédit photo : Elias Djemil

Sébastien Ricard est un comédien dramatique bien connu; ses rôles sur scène tant dans Richard III que dans La nuit juste avant les forêts témoignent de son talent, de même que ses performances à la télévision, notamment dans En thérapie. Il a l’habitude de la scène, il la prend aussi souvent d’assaut en tant que Batlam de la formation rap Loco Locass. Mais ce mois-ci, dès le 23 octobre au Théâtre Outremont, c’est dans un projet bien spécial qu’il se plonge; un spectacle comme nul autre. Entrevue avec un interprète hyper engagé pour nous faire découvrir la particularité de La bibliothèque interdite, un opéra-tango de Denis Plante.

Déjà, le concept de La bibliothèque interdite intrigue: «C’est un opéra-tango avec trois musiciens en scène: un bandonéoniste, qui est incidemment Denis Plante – et également le compositeur du livret et de la musique -, un contrebassiste et un guitariste, qui forment l’ensemble Tango Boréal.» À ces musiciens s’ajoute un seul acteur, Sébastien Ricard qui, à lui seul, interprète la partie dramatique du spectacle. Ces éléments nous permettent déjà d’être assurés de l’intérêt de la pièce, mais que peut bien signifier ce terme, «opéra-tango»? «C’est une sorte d’incursion dans l’univers borgésien… Jorge Luis Borges, le grand écrivain argentin. Et donc le titre, opéra-tango, implique la musique tango et la culture argentine, qui sont très très présentes dans ce spectacle-là

En ce qui a trait au titre, Sébastien Ricard nous rappelle d’abord que Jorge Luis Borges a été le directeur de la bibliothèque nationale d’Argentine et que c’est donc un homme qui a passé beaucoup de temps dans les bibliothèques. «Et l’univers de la bibliothèque est très très important dans le spectacle lui-même, mais aussi le côté labyrinthique d’une bibliothèque, son côté infini, qui peut aussi être une métaphore de la psyché humaine».

Le créateur de ce spectacle, Denis Plante, connait très bien la culture argentine et s’est amusé à faire des clins d’oeil à l’histoire plus ou moins récente de l’Argentine, notamment à la période dictatoriale, qui a vu Jorge Luis Borges, comme bien d’autres écrivains, être malmené par ce régime. «Donc il y a aussi cette présence d’une autorité politique, persécutante, censurante et omniprésente, omnipotente, et qui cherche à faire révéler au personnage que j’incarne des choses qui sont inavouables.». Finalement, nous dit-il, La bibliothèque interdite, c’est «une espèce de délire autour de la culture argentine et de la figure littéraire de Borges, mais mis en musique et en mots par un Québécois, amoureux de la culture argentine et marié avec une Argentine».

Denis Plante et Sébastien Ricard se sont rencontrés en 2010, alors qu’ils travaillaient sur le spectacle Les Violons du Roy. La rencontre fut à ce point heureuse qu’ils décidèrent de continuer à travailler ensemble et de créer ce spectacle qui réussirait à marier leurs univers respectifs, soit ceux de la musique et du théâtre. Ayant d’abord conçu un projet un peu plus éparpillé, où Ricard interprétait plusieurs personnages, les camarades l’ont retravaillé, de concert avec la metteure en scène Brigitte Haentjens, bonne amie du comédien, afin de synthétiser l’histoire et resserrer le tout pour un résultat nettement plus intéressant.

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«Le côté plus resserré du spectacle est venu d’un travail qu’on a fait il y a deux étés, où on s’était vraiment assis les trois ensemble, avec Denis [Plante] et Brigitte [Haentjens], à Montréal, et on avait vraiment pris une semaine au complet, à raison de quatre heures par jour, pour vraiment retraverser le texte, puis essayer vraiment de voir si on ne pouvait pas faire des coupures, voir si on ne pouvait pas éclairer certains aspects du spectacle, voir si on ne pouvait pas resserrer la matière et faire en sorte que, finalement, le mariage entre la musique du milieu duquel provient Denis, puis le théâtre, le milieu duquel je viens, ne puisse pas vraiment se marier plus heureusement.»

Selon Sébastien Ricard, La bibliothèque interdite est donc vraiment à mi-chemin entre le théâtre et la musique, «et c’est ça que je trouve passionnant, et c’est ça que je trouve, même je te dirais, très borgésien, à la limite». Et Ricard nous confirme que le créateur, Denis Plante, connaît très bien cette culture-là, qu’il a même inséré ici et là de nombreuses références à l’histoire de Borges et à ses champs d’intérêt, qui étaient nombreux. «Il a une manière tout à lui, Denis, d’avoir transformé ça et d’en avoir fait quelque chose qui est très personnel. Et en ce sens-là, je trouve que c’est très réussi».

En comparant les derniers projets de Ricard, comme Richard III, avec celui-ci, il faut avouer que La bibliothèque interdite sera un spectacle beaucoup plus intimiste. «Il y a un côté presque cabaret dans le spectacle, aussi, le personnage du poète ne fait pas fi des gens qui sont dans la salle, il y a des interactions avec le public, il y a une plus grande proximité avec le public». Il s’agira donc effectivement d’un spectacle personnel, amical et chaleureux, qui bénéficiera grandement d’être né d’une amitié entre Denis Plante et Ricard, puis entre Brigitte Haentjens et Ricard – qui cosigne la mise en scène avec son amie.

Mais quand on lui demande à quelle facette de Sébastien Ricard les spectateurs auront droit en allant voir La bibliothèque interdite, il hésite, et arrive difficilement à qualifier le spectacle. «Pour moi, c’est très étrange. Donc je pense que ce serait ça le meilleur mot : on va avoir devant nous un objet vraiment étrange, puis c’est ça la beauté de la chose, je pense. Puis encore là, étrange, pour moi, c’est un qualificatif qui me ramène à Borges. C’est une étrangeté heureuse, c’est quelque chose qui ouvre et, je l’espère aussi, ça va peut-être ouvrir sur d’autres aspects…de moi, mais aussi de l’art théâtral».

Le spectacle mi-musical, mi-théâtral qualifié d’opéra-tango La bibliothèque interdite est écrit par Denis Plante et mis en scène par Brigitte Haentjens et Sébastien Ricard. Il sera présenté au Théâtre Outremont de Montréal du 23 au 31 octobre 2015.

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