«Débris», d’après une mise en scène de Claude Desrosiers, au Théâtre La Licorne

Mais la vie continue, malgré cet accident, et c’est ce que ces banals tableaux démontrent. Mais quand Daniel a-t-il pris la décision de créer une exposition de photos plutôt que de tableaux? Et combien de temps a-t-il été obsédé par la mère d’une des victimes avant de l’aborder? Ces sauts dans le temps, et aussi dans les lieux, sont nombreux mais ne sont pas aussi efficaces en théâtre qu’à la télévision ou au cinéma. Camouflés par la musique de Ludovic Bonnier et des projections vidéo de Pierre Laniel, les déplacements des bancs d’autobus, l’apparition ou la disparition d’un comptoir ou d’une toile de Daniel sont autant de gestes peu fluides, qui brisent le rythme de la pièce.

Heureusement, les comédiens sont tous d’un naturel tout à fait convaincant, surtout Roger La Rue en Gerry, un psychologue qui a lui aussi bien des tourments, qui épate par la fluidité et le débit de ses répliques. Le niveau de jeu des comédiens élève donc d’un cran l’attrait de la pièce Débris, qui comporte effectivement beaucoup d’humour et est aussi bien ancrée dans notre propre société, grâce à la traduction de Jean Marc Dalpé.

Mais pendant toute cette comédie, si Daniel a de la difficulté à recoller les morceaux de son existence, le spectateur, lui, a de la difficulté à reconstituer l’histoire entière qui mène à autant de détresse chez le personnage principal et à bien saisir son angoisse. Peut-être la pièce est-elle trop fragmentée en plusieurs tableaux dont plusieurs perdent de vue le drame de Daniel, ou peut-être les débris sont-ils trop nombreux dans sa tête pour qu’on puisse les distinguer et se laisser toucher par ce drame.

La pièce Débris d’Ursula Rani Sarma, traduite par Jean Marc Dalpé et mise en scène par Claude Desrosiers, est une production du Théâtre la Manufacture et est présentée au Théâtre La Licorne jusqu’au 28 mars 2015.