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Crédit photo : Étienne de Durocher
Originaire du Liban, l’interprète a commencé sa carrière d’interprète et de chorégraphe en s’investissant dans une diversité de projets artistiques à Montréal.
Depuis 2019, elle est interprète pour Veils of Bollywood. En 2021, elle a dansé dans le cadre de Quand l’art prend l’air, de la Calgary Pride, d’Ottawa Pride et de Fierté Montréal. Grâce au soutien du Conseil des arts du Canada, elle a entamé la recherche et la création de la pièce AGUA à titre d’interprète.
Elle a à son actif trois autres créations: WHOLENESS (2020), PLAYGROUND (présentée en cocréation avec Maude Laurin-Beaulieu à Tangente en 2022) et, plus récemment, El kamar bi zaher (2021-2024).
La danse s’est taillée tout naturellement une place dans sa vie, comme seule la plus belle des histoires d’amour peut le faire: «Très jeune, j’ai commencé à danser de façon récréative, simplement pour le plaisir et la joie que cela me procurait. C’est ensuite devenu une manière de me rapprocher de mes racines», nous a-t-elle confié en entrevue.
El kamar bi zaher signifie en arabe «La lune qui fleurit». Un titre des plus poétiques, dont la symbolique est au cœur de l’œuvre de Chanel Cheiban: «Cela fait référence au féminin sacré. Il s’agit de voir mon propre bassin comme cette lune, et lui permettre de fleurir et de se transformer. Ce titre, et le spectacle, sont une métaphore de mon espace intérieur», explique-t-elle.
En effet, dans cette mise en scène de son ancestralité à l’aide d’une profusion de lampes, de tapis et de coussins, l’interprète se libère des diktats du corps féminin orientalisé, mais aussi des stéréotypes à l’égard des femmes arabes.
C’est une œuvre qui se veut libératrice, au sens le plus profond du terme.
«En tant que femme, je suis connectée aux cycles de la lune, je les traverse comme elle, et le titre parle de transformer ces cycles afin de se libérer, de s’ouvrir.» – Chanel Cheiban
Au confluent des influences traditionnelles et contemporaines, les créations de Chanel Cheiban s’enracinent dans le folklore libanais, la danse indienne, la danse moyenne orientale et le travail au sol. El kamar bi zaher n’y fait pas exception, ce solo étant lui aussi né, pour la jeune femme, d’un désir de reconnecter avec ses origines.
«Pendant la pandémie, je passais une quantité importante de mon temps à écouter de la musique sur YouTube, et je suis tombée sur certaines pièces du National Arab Orchestra qui m’ont particulièrement touchée, parce qu’il y a beaucoup de choses dans la culture arabe, dans ma culture libanaise, une part de mon identité que je ne comprends pas parfaitement, vu que je suis née ici. Je connaissais déjà les mélodies des chansons reprises par cet orchestre, mais je ne pouvais pas les nommer ni les reconnaître. C’était comme retrouver une part perdue de moi, et ça m’a donné envie de commencer à créer à partir de ces musiques», raconte-t-elle.
Une œuvre hybride et multidisciplinaire
Cette fusion de danse contemporaine, moyenne orientale et de transe sera portée par différents classiques de la culture arabe, dont «Alf Leila wa Leila» (Oum Kalthoum), Nassam «Alayna El Hawa» (Fairuz) et «Banat Iskandariya». Interprétés par les multi-instrumentistes Nadine Altounji à l’oud électrique et par Oisin Hannigan aux percussions, ainsi que par la voix chaleureuse de Najla Jaffel, ces morceaux laisseront une place à l’improvisation musicale.
Car l’improvisation est au cœur du solo de Chanel Cheiban. Cette dernière reprend, au sein d’El kamar bi zaher, le principe arabe du tarab, lequel désigne l’extase née de la communion des sens entre le spectateur et l’interprète, et qui permet d’exhaler l’âme dans le tourbillon de la musique et de la danse pour la porter au firmament d’une ivresse artistique. Le tarab englobe l’ensemble des chansons classiques égyptiennes et tire sa source de l’époque de la légendaire Oum Kalthoum.
«Les chansons qu’on joue vont toutes chercher beaucoup de cordes sensibles à l’intérieur de moi. Tout sera improvisé, basé sur les cordes au moment où elles s’activent. Le tarab se trouve dans l’imprévisible, ce qui se crée sur scène quand je me laisse porter par la musique, à l’instar des musiciens qui la jouent. Cette musique nous berce et nous transporte vers une dimension plus grande que nous», nous explique Chanel Cheiban.
El kamar bi zaher se présente à la fois comme une exploration de nouveaux territoires dansés et une démarche de réappropriation qui fait écho au tiraillement de la diaspora tiraillée entre deux cultures, ainsi qu’aux traumatismes intergénérationnels — la guerre, la religion et la politique explosive du Moyen-Orient.
Héritage collectif meurtri en quête de résilience et affranchissement des normes sociales traditionnelles à l’égard des femmes arabes traversent en filigrane l’œuvre cette œuvre qu’on vous invite chaudement à découvrir, du 16 au 19 janvier 2025!
Horaire des représentations:
- 16, 17* et 18 janvier 2025 ∙ 19 h
- 19 janvier 2025 ∙ 16 h
*Une discussion avec les artistes est prévue après la représentation du 17 janvier.