«Tout se pète la gueule, chérie» à la Maison de la culture Frontenac – Bible urbaine

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«Tout se pète la gueule, chérie» à la Maison de la culture Frontenac

«Tout se pète la gueule, chérie» à la Maison de la culture Frontenac

Frédérick Gravel et ses complices livrent une performance impeccable

Publié le 16 novembre 2016 par Marine Morales-Casaroli

Crédit photo : Juan Saez

Le 14 novembre, à l’occasion de l’OFF-CINARS, le chorégraphe montréalais Frédérick Gravel revenait au bercail avec sa création Tout se pète la gueule chérie. Une pièce créée en 2010 mais toujours vivante et vibrante.

Détendus, voire presque nonchalants, Gravel et son équipe s’installent sur scène. Un «vous êtes bien sages, on n’a pas commencé encore», lancé depuis la scène, reçoit une réponse hilare du public, et annonce la couleur. Le show est pourtant bel et bien commencé, car ici pas d’artifice ni de quatrième mur. Les danseurs sont là, quotidiens, et font ce qu’ils ont à faire, que ce soit exécuter une danse explosive ou passer la moppe.

Chez Frédérick Gravel, on ne se prend pas au sérieux. On croit à ce que l’on fait, mais le snobisme parfois attribué à l’art contemporain n’a pas sa place. Gravel l’illustre en prenant la parole au micro pour parler de sa pièce, à l’aise avec l’exercice mais pas prétentieux pour deux sous. C’est une pièce sur l’échec, sur le désarroi, des portraits de «mecs» moyens impuissants. «Si vous attendez un climax, ça se peut qu’il n’arrive jamais».

À défaut de climax, c’est une longue progression vers l’expression d’une combativité rageuse à laquelle on assiste. À travers une série de tableaux, Gravel, accompagné sur scène de Dany Desjardins, Nicolas Cantin et Thomas Furey à la musique, dépeint des mâles désabusés, vautrés dans leur panoplie d’Américains moyens, pris entre leurs caisses de douze, les clichés de masculinité devenus vains, et leur désir d’exprimer leur virilité à leur manière.

Tout se pete la gueule cherie

La résignation, le sentiment d’impuissance, la volonté de faire qui se heurtent à la sensation d’être face à un mur: les corps, dans un état de tension palpable, l’expriment tout au long de la pièce. La danse est lourde, en résistance, irrémédiablement soumise à la gravité. Maladroits et puissants, se débattant avec rage, les trois danseurs habitent la scène avec fougue et générosité. Le tout porté par une bande son folk américain et les compositions électro-pop de Thomas Furey, co-interprétées avec Gravel.

Au fil des tableaux, les quatre hommes se dévoilent, forts et fragiles. Désabusés, mais pas résignés, ils portent la pièce vers un final explosif, contrairement aux prédictions de Gravel. Car ce qui fait la force de cette pièce, c’est l’interprétation sans fard, mais entière, de ses protagonistes. Chacun à sa manière habite la scène sans concession, va au bout de ses propositions, vit pleinement ce qu’il fait à ce moment précis, et c’est cette conviction sincère qui rend les choses intéressantes et vivantes.

On sort emballé par cette pièce qui, si elle ne se prend pas au sérieux, assume et va jusqu’au bout de ses idées.

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