«Corps avides» présenté par Tangente au Monument-National – Bible urbaine

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«Corps avides» présenté par Tangente au Monument-National

«Corps avides» présenté par Tangente au Monument-National

De l’électricité dans l’air et dans le corps

Publié le 9 novembre 2016 par Julie Desmarais Bastien

Crédit photo : Aurore B. Pictures, Frederic Chais et Denis Martin

À travers trois pièces indépendantes de 30 minutes chacune, Tangente nous invite à entrer dans un univers de tension. Les Corps avides sont tour à tour envahis par une nervosité incontrôlable, soumis à une quête insatiable d’euphorie, puis relâchés au son d’une guitare électrique.

«Faille: deux corps sur le comptoir», une chorégraphie nerveuse de Jessica Serli

Un homme et une femme, chacun au centre d’une douche lumineuse carrée, fixent le public d’un regard neutre. Un câble sort de leurs vêtements, les reliant à une source invisible derrière le rideau noir tout au fond de la scène. Les mains des interprètes sont prises de légers spasmes qui semblent incontrôlés. Leurs mouvements, parfaitement simultanés, obéissent à une chorégraphie de mains qui semble aléatoire, et pourtant exécutée dans une synchronisation qui déroute. Les spasmes et les tics s’intensifient si bien que le malaise s’installe. Dans le public, des épaules se crispent, des bras se croisent, comme pour se protéger de ces deux corps stressés qui nous confrontent aux aléas de notre propre système nerveux. Un contact s’établit entre les deux danseurs qui cherchent à trouver réconfort chez l’autre, partageant leur névrose et s’entraînant mutuellement dans leur fébrilité.

Fait intéressant, afin de produire des gestes involontaires chez les interprètes, une machine cachée derrière le rideau noir leur envoie des électrochocs en direct, transmis par quatre électrodes posés sur leurs avant-bras et leurs biceps! Audacieux. Voilà qui explique l’étonnante simultanéité des spasmes de mains en début de numéro! Les intentions des chorégraphes se devinent aisément; les thèmes de la nervosité, du corps qui subit et de la solitude ressortent avec clarté. On y observe aussi notre relation abusive avec la technologie, cette idée de la machine qui contrôle le corps.

«Shudder», quête d’extase chorégraphiée par Louise Michel Jackson et Ben Fury

En quête d’une euphorie difficile à atteindre, un duo homme-femme s’active côte à côte pour tenter de satisfaire sa dépendance à l’adrénaline. D’abord immobiles, insensibles au rythme bien marqué qui s’installe en début de numéro, ils se mettent soudainement à plier des genoux sans relâche, exploitant toutes les variantes possibles sur ce même thème. L’effet des rebonds en continu, contrastant avec l’air désabusé des interprètes, nous porte à sourire.

Malgré la pointe d’humour derrière ces deux humains-ressorts, la recherche acharnée d’un «quelque chose de plus» pour fuir l’ordinaire, elle, dresse un tableau plus sombre.

Ici, la proposition reste plus difficile à saisir, possiblement parce que la chorégraphie est prévue pour s’intégrer dans un spectacle complet à paraître bientôt. Le caractère répétitif des mouvements, quoi qu’intentionnel, cause certaines longueurs, compensées par l’excellente présence scénique des interprètes.

«Untamed», chorégraphie aux allures de concert rock de Compagnie Entitey/Jason Martin

Harmonieux mélange de danse, de musique et de lumière, Untamed met en scène deux interprètes, l’un féminin, l’autre masculin, ainsi qu’un guitariste. De courtes séquences dansées sont entrecoupées de noirs très rapides, plongeant toute la salle et la scène dans l’obscurité. Aussitôt, les artistes réapparaissent ailleurs, téléportés dans un nouveau faisceau lumineux. Les corps baignés de lumière se détachent admirablement bien de la noirceur totale qui les entoure. La guitare électrique live détermine le degré d’intensité des deux danseurs, qui livrent une performance empreinte de liberté, quasi nonchalante par moments.

Le chorégraphe souhaitait se libérer des conventions (recherche complexe derrière une chorégraphie, désir excessif de performance et de perfection), en créant une œuvre qui se concentre simplement sur le plaisir de danser. Pièce rafraîchissante et sans prétention, on aurait pris plus de défoulement dansé au son de la guitare (peut-être à travers certains tempos plus rapides, pour permettre aux danseurs de s’extérioriser avec encore plus d’ardeur?).

«Corps avides» en bref

Mélange d’intuitions et de recherches approfondies, Corps avides pique notre curiosité, nous confronte à notre propre stress et notre recherche constante d’exaltation, pour ensuite nous apaiser avec un peu de légèreté. Un spectacle équilibré, juste assez déstabilisant, où l’on joue avec doigté sur nos nerfs parfois tendus comme les fils d’une guitare électrique.

L'événement en photos

Par Aurore B. Pictures, Frederic Chais et Denis Martin

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