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Crédit photo : Véronique Lewandowski
Le Ministère était bondé, mais ça n’a néanmoins pris qu’un aller-retour de grattement de guitare électrique – pourtant au volume si bas qu’on pensait presque qu’on s’embarquait dans un spectacle unpluggued – pour capter l’attention de tous et faire taire la mêlée. Offrant un court aperçu de son premier extrait, «Ton équilibre», l’artiste a rapidement enchaîné avec «Arlon», celle qui avait été la première lancée pour son album précédent, 27 fois l’aurore (2014). C’est déjà là qu’on les a remarqués: les sublimes cordes de Mélanie Bélair (violon) et de Ligia Paquin (alto), qui se démarquaient de jolie façon et complétaient à merveille l’ensemble.
Elles ont continué leur magnifique travail sur «Entre ici et chez toi», et jusqu’à la fin de la soirée, jamais elles n’ont détonné; toujours elles se sont révélées un apport précieux dont on a l’impression que les compositions de Salomé Leclerc ne pourraient plus se passer. Mais on ne sait jamais avec Salomé: c’est juste la troisième chanson, et Les choses extérieures a beau avoir été lancé seulement vingt-huit jours plus tôt, l’artiste a déjà apporté des modifications à la ligne mélodique de sa voix durant le refrain!
Si je ne m’attendais pas du tout à entendre «Love, Naïve, Love» ressurgir – il commence à être loin, Sous les arbres (2011)! –, j’ai été encore plus surprise de la découvrir aussi percutante, mais surtout percussive. Le plus gros tambour de José Major nous résonne presque jusque dans les entrailles quand il le fait résonner vigoureusement. Le «batteur préféré» de Salomé Leclerc tire toujours bien son épingle du jeu, peu importe qui il accompagne, mais rapidement, c’est à nouveau vers les cordes que je dresse l’oreille, durant la magistrale finale de «La fin des saisons».
Puis Salomé Leclerc s’est mise à faire de la magie. On ne sait trop si c’est parce que l’artiste est en perpétuel élan créatif, si c’est une éternelle insatisfaite à la recherche de la perfection, ou si elle souhaite juste éviter la redondance de livrer ses chansons toujours de la même façon, mais il faut l’avouer: on ne sait jamais où elle va nous amener.
Personne ne pourrait affirmer ne pas avoir été étonné, vendredi, par les métamorphoses qu’ont subies les chansons de 27 fois l’aurore, dans un style plus rock, bien loin des synthétiseurs et autres sonorités électroniques qui les ont jadis enveloppées. Il m’a d’ailleurs fallu quelques secondes avant de reconnaître «Garde-moi collée», «Devant les canons» était tout simplement méconnaissable, et on aurait dit que «Vers le sud» avait carrément été déconstruite puis rebâtie sur un autre cadre.
Même sa nouvelle version de «Tourne encore», micro à la main et assise un peu à l’écart, guidée uniquement par la guitare électrique grasse de Philippe Brault, nous a montré presque une nouvelle interprète, prenant plus de libertés dans ses envolées vocales. Mais les plus récentes compositions n’ont pas manqué non plus de nous faire vivre différentes émotions. En commençant à jouer «Nos révolutions» comme à l’envers, débutant avec la partie tout en douceur, l’artiste en a surpris plusieurs, qui se mirent à crier et siffler pour signifier leur appréciation lorsque le band se mît de la partie. Probablement la performance la plus enlevante de la soirée, elle a été suivie par la tout aussi dynamique «Le mois de mai», avant de retomber dans la douceur d’«Entre parenthèses», en formule guitare-voix seulement, pour conclure la veillée.
Leclerc avait beau nous avoir avoué sa nervosité dès le départ, lors d’une de ses rares interventions parlées, c’est pourtant bien difficile à croire. Elle a l’assurance sur scène d’une fin de tournée, du matériel bien rodé, bien maîtrisé. Évidemment, elle a tout composé, tout joué et même tout réalisé elle-même (sauf les arrangements de cordes de Mélanie Bélair) sur Les choses extérieures, ça doit donc être imprimé durablement en elle, mais on ne peut s’empêcher de penser que le spectacle livré au Ministère était de haut calibre pour une première.
Pas le choix: comme Salomé Leclerc a toujours plus d’un tour dans son sac et qu’elle est une artiste minutieuse qui livre une qualité toujours plus grande, il va falloir retourner la voir!
Le spectacle-lancement de «Les choses extérieures» en 14 photos
Par Véronique Lewandowski
L'avis
de la rédaction
Grille des chansons
1. Ton équilibre (introduction)
2. Arlon
3. Entre ici et chez toi
4. Love, Naïve, Love
5. La fin des saisons
6. Vers le sud
7. L'icône du naufrage
8. Devant les canons
9. Ton équilibre
10. Dans une larme
11. Tourne encore
12. Garde-moi collée
13. Nos révolutions
14. Le mois de mai
15. Entre parenthèses
Rappel
16. Pour te garder
17. Partir ensemble