«Préludes - La lueur de l'aube et Re-(II)» au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts – Bible urbaine

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«Préludes – La lueur de l’aube et Re-(II)» au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts

«Préludes – La lueur de l’aube et Re-(II)» au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts

Danseurs gracieux et cassure dans la thématique

Publié le 11 mars 2016 par Isabelle Lareau

Crédit photo : John Hall / Grands Ballets Canadiens

C’est plutôt rare, mais le directeur artistique des Grands Ballets Canadiens, Gradimir Pankov, a décidé de présenter un programme double afin d’offrir une réflexion sur le romantisme et la spiritualité. Ces intérêts sont le fil conducteur qui réunit Ken Ossola et Shen Wei sur une même scène, et ce, malgré le fait que les deux chorégraphes soient très différents dans leur approche l'un de l'autre, tant sur les plans du style que de l'inspiration.

La première partie, intitulée La Lueur de l’Aube, est un hommage au compositeur russe Rachmaninov, tel qu’imaginé par le chorégraphe Ken Ossola. Ce ballet est également inspiré par «Lettre d’Etampes à sa fille Léopoldine», une lettre d’amour que l’écrivain Victor Hugo avait rédigée à la mémoire de sa fille Léopoldine, morte noyée.

RE- (II), pour sa part, constitue le deuxième segment de ce spectacle. Il s’agit d’une œuvre originale de Shen Wei, celui-ci partage des souvenirs précieux; sa visite du Temple d’Angkor Wat, au Cambodge. Cette chorégraphie s’inscrit dans une série de trois volets (RE-I, RE-II et RE-III) qui retrace les nombreux voyages que Wei a fait en Chine, au Cambodge et au Tibet. Par ailleurs, Wei fut également le directeur et le chorégraphe de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Beijing, en 2008.

La Lueur de l’Aube se distingue par son esthétisme dès l’ouverture des rideaux. La scénographie est magnifique et très épurée. Le jeu de lumière reflète à merveille les changements temporels (l’aube et le crépuscule, le jour et la nuit), variant entre des tons orangés, blancs, gris et noirs. Sur la scène, il y a quelques arbres gris longilignes, un rappel du minimalisme si ardemment désiré par Ossola et Marija Djordjevic, la conceptrice des décors et des costumes.

Il n’y a pas à dire, Djordjevic a réussi, de façon spectaculaire, à créer une ambiance très pure, qui met en relief les lignes et l’élégance des danseurs. Les costumes, très simples mais efficaces, ont été conçus afin de rendre hommage aux corps des danseurs. Le décor, la lumière et les habits (ajustés et aux couleurs vives, rappelant ceux des patineurs artistiques) contribuent à mettre en valeur la chorégraphie délicate mais passionnée, exécutée avec conviction et grâce par la troupe des Grands Ballets Canadiens de Montréal.

Imprégné de romantisme et d’une touche de mélancolie, ce spectacle constitue un réel ravissement. À l’exception de quelques hésitations (c’était soir de première après tout), les danseurs ont très bien interprété ce ballet néo-classique d’une très grande beauté. Les divers enchaînements entre les numéros étaient particulièrement harmonieux, si bien que les transitions entre les danseurs étaient à peine perceptibles. Le seul petit bémol se situe au niveau de la musique, les raccords manquaient de finesse.

La deuxième partie, RE- (II), est un ballet contemporain beaucoup plus ancré dans la réalité. Marquant une coupure nette avec la chorégraphie précédente, Wei partage ses impressions du Cambodge. De plus, ce dernier a conçu les costumes, la trame musicale et le décor. Ayant lui-même enregistré les bruits ambiants (des voix enfants, la jungle d’Angkor Vat) et pris des photographies, il a utilisé ses archives personnelles pour créer ce ballet. L’artiste a également inclus de la musique traditionnelle cambodgienne.

Ce ballet était présenté en deux actes, le premier représentait la vie urbaine et la nature, où un certain chaos régnait, tandis que le second avait lieu à l’intérieur d’un temple, où la sérénité était de mise. Des costumes colorés en premier lieu, pour illustrer le mouvement, et des pas de danse beaucoup plus flexibles, comparativement au tableau suivant, où des danseurs au torse nu ont pris des poses plus rigides et contemplatives. Cependant, malgré une tentative de peindre un moment de sérénité, on ne peut s’empêcher de déceler un certain inconfort de la part des ballerines. Le choix d’images et de sons fut décevant; les photos étaient ordinaires et sans éclat alors que la musique et les échantillons choisis causaient un sentiment de tension, accentué par la réverbération (peut-être était-ce voulu?) Ces éléments ont brisé le charme associé au recueillement ou encore au bonheur de découvrir un pays exotique.  

Ce n’est pas que RE-(II) soit un mauvais spectacle. La difficulté repose sur le fait que, malgré des affinités entre Ossola et Wei, ces deux ballets ne sont pas suffisamment similaires pour que l’un constitue la suite logique de l’autre. L’un est axé sur le romantisme, la passion et la tendresse, tandis que l’autre est une incursion à la découverte de soi. Il y a véritablement une cassure; le public n’a pu poursuivre le voyage entamé grâce à La Lueur de l’Aube, celui-ci doit plutôt changer d’humeur pour accueillir une bifurcation beaucoup moins poétique, ce qui nous donne l’impression d’avoir été interrompus dans notre expérience, le moment magique créé par Ossola s’est dissipé un peu trop rapidement.

L'événement en photos

Par John Hall / Grands Ballets Canadiens

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