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Crédit photo : Maude Touchette
C’est la voix impressionnante d’Anthony Carle qui a réveillé la foule tranquille en ce lundi soir. Un bon nombre de spectateurs connaissait déjà le généreux compositeur-interprète qui nous a offert une première partie hautement dynamique et inspirée.
Figure androgyne et attachante, agréablement désinhibée, sa silhouette s’élançant dans des mouvements fluides vêtue d’une nuisette satinée aux imprimés «burtonesques». Impressionnant par sa voix posée, vedette d’un ensemble à cinq dont la vibe positive et contagieuse et les harmonies pas toujours sophistiquées, mais néanmoins impeccables, il nous a offert un très bon moment.
Comique, sympathique, parfois obsédé par sa machine à fumée, Carle a donné une performance investie et énergique, prenant très au sérieux son rôle en tant que hors-d’oeuvre à Dear Denizen. Rarement on aura vu une première partie aussi impliquée, de toute beauté. Avec des pièces dansantes nostalgiques du new wave des années 80. On y reviendra.
Puis Dear Denizen est monté sur scène pour nous offrir ses compos parfois soul et souvent dansantes. Ngabo bien posté au centre de la scène savamment mais simplement décorée par lui et son sens de l’esthétique irréprochable. Devant les guirlandes de lumières blanches s’est découpée sa silhouette, marquée de son éthos si reconnaissable, son chapeau aux accents militaires, qui rappelle le cowboy, mais également le couvre-chef des hommes de guerre et qui, pour l’artiste, renvoie à son prénom qui signifie soldat ou bouclier.
Il nous a offert un spectacle aussi brillamment construit que ses compositions, inspirant et aspirant. Des déclinaisons plus rock qu’en studio, mais des versions assez fidèles aux originales. On ne s’en plaignait pas, car sur scène Ngabo Kiroko est entièrement incarné et manifestement ancré dans le moment présent.
Sa performance habitée était totalement dirigée en cadeau vers le public dansant à ses pieds et où il a d’ailleurs plongé pendant Monster Tamer pour se joindre à la danse. Un moment d’une rare beauté que son ami Pierre Kwenders, venu assister au concert, filmait, franchement amusé.
Il y avait dans ce spectacle quelque chose qui dépassait la performance musicale, pourtant exceptionnelle, une des meilleures de ma vie (Dieu merci pour la nouvelle sono de cette salle), quelque chose qui allait chercher l’humain, qui rassemblait. Sur le plan musical, les influences sont nombreuses, le rock de Dear Denizen nous renvoie à l’alternatif britannique des années 2000, parfois shoegaze donc, mais à d’autres moments on croit entendre le prog rock de Genesis, mais aussi du world ou encore de l’électro sans oublier les inflexions vocales du spectre de Jim Morrison qui planent parfois.
Mais voilà, dans le cas de Dear Denizen les étiquettes s’avèrent inopérantes. Parce que si sa musique nous en rappelle d’autres, il demeure résolument distinct et tous ses genres qu’il mixe sans vergogne témoignent plutôt de sa capacité à unir. Les gens, les styles, tout. Au-delà des structures de ses compositions qui sont maîtrisées et abouties, au-delà de l’élégance du personnage et de l’accord parfait de tous les musiciens sur scène, il a l’âme du bonhomme. Un artiste dont la force tranquille et la voix pleine impressionnent.
Dear Denizen est de ceux dont la création a le pouvoir de rendre les gens heureux et on souhaite qu’il continue de s’offrir l’espace de créer. Il est d’autant plus remarquable que, quoique Ngabo fasse, tout en indépendant, ça n’enlève rien au professionnalisme du résultat final qui manifestement témoigne d’un artiste réellement visionnaire.
«Long live, Denizen!»
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Par Maude Touchette
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