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Crédit photo : Mathieu Pothier
C’est Claude Bégin qui a ouvert le bal, cheveux crasseux sur les épaules et chapeau de cowboy fané sur la tête. Celui qui est officiellement passé de l’arrière-scène à l’avant-scène il y a un peu plus d’un an avec son album «Les Magiciens» commence depuis à monter sur scène en solo.
Ce qu’on remarque immédiatement, c’est que le personnage garde quelque chose d’insaisissable. Peut-être est-ce dû aux plusieurs chapeaux qu’il porte. Car Bégin n’est pas que l’incarnation du crooner des temps modernes que l’on a pu voir hier soir, c’est aussi un rappeur (et membre d’Alaclair Ensemble), et un réalisateur (bien des accroches des hits de Karim Ouellet depuis Fox sont de lui). Remarquable musicien et chanteur, encore ambivalent avec son image fluctuante, il possède ce star quality qui fait se ruer les foules.
Il nous a donc offert la plus grande partie de ses compositions récentes pour terminer sur son récent hit, également finaliste au prix de la chanson SOCAN, «Avant de disparaître». À la fin de son set, qui nous révélait l’ampleur de son talent, on en venait à croire que les radios font peut-être tourner ses pièces les plus accrocheuses, mais qu’il a beaucoup plus à offrir. On lui souhaitera de se sentir plus confortable en concert solo et de laisser tomber la gestuelle fabriquée.
Il fallait le sentir se détendre lorsque son ami Ogden (d’Alaclair) est monté sur scène le temps de faire l’excellent «Faible pour toi». Au final, on confirme qu’on se trouve devant un auteur-compositeur unique, mais que l’interprète a encore maille à partir avec son image «solo». Est-ce dû à son physique trop avantageux qui le condamnerait facilement à être le beau gosse pour qui on se pâme s’il n’y prenait garde? Ce envers quoi, manifestement, il résiste. Mais la foule avait pour lui une affection qui ne date pas d’hier; on l’a vu lorsqu’il a chanté «Les montagnes russes» d’Alaclair Ensemble et que la salle a chanté avec lui.
C’est ensuite le loup qui a traversé la scène avant que Karim Ouellet ne vienne prendre le micro accompagné de sa guitare et d’un band endiablé, avec choristes, brass, guitare, batterie et même un genre de MC équipé d’une table de percussions. Le gentleman derrière certains des plus grands hits des dernières années a revisité toutes ses époques, en commençant pas son dernier album Trente, pour revenir vers Fox.
Karim Ouellet a des manières impeccables en spectacle, une classe et une distinction rarement vues. Il s’éclate avec sa guitare, mais ne s’emballe jamais au point d’oublier son public, à qui il demande son prénom, que tous les spectateurs crient en même temps (une habitude, paraît-il), avant que Ouellet ne réplique «Enchanté». Sur le plan de l’attitude, il se trouvait donc en parfaite continuité avec Bégin par ce côté un peu crooner.
Il est essentiel de souligner la qualité des éclairages, qui utilisaient les «branchailles» en arrière-scène pour créer des décors nuancés et des tableaux distincts, et qui avaient été programmés pour chaque morceau. Sans oublier les projections sur les écrans à forme diamantaire. Le MC mentionné précédemment était aussi exubérant que les éclairages, et venait de temps à autre faire des sauts en rappant sur le devant de la scène. Le tout aurait pu avoir l’air d’un joyeux bordel désarticulé, si ce n’avait été de Karim.
Car ce qu’il y avait de plus beau dans tout cela, c’était lui, au centre de tout; royal, capable de moduler l’intensité de sa présence, passer de l’humilité à la bombe. Il savait rester dans l’ombre un moment pour offrir le plancher à ses compatriotes, comme il savait, dans la seconde suivante, se faire encore plus éclatant que les faisceaux lumineux et plus dansant que la pluie de ballon rouge qui a déferlé sur la salle en fin de spectacle.
Karim Ouellet s’est une fois de plus avéré être un musicien remarquable, un compositeur de talent, un grand showman, mais d’abord et avant tout un humain d’exception.
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de la rédaction