SortiesDans la peau de
Crédit photo : Raphaël Mariage
1. Julien, on va commencer par le début. Comment as-tu commencé à faire de la photo professionnellement?
«La version courte: en me faisant offrir des bouteilles de scotch contre des portraits.»
«La version moins courte: en commençant à avoir des petits contrats pour des designers locaux et, de temps à autre, des photos de casting/modelling. Ensuite, mon bon ami Yan Bleney, photographe internationalement reconnu dans le quartier (inside joke), s’est mis a me guider un peu plus sérieusement côté business et démarche. À la base, j’avais commencé la photo par frustration avec la peinture et, finalement, cinq ans plus tard, je me suis remis à en faire, juste pour ne pas perdre la twist.»
2. Tu photographies beaucoup d’artistes qui œuvrent dans le monde de la musique (entre autres, Alex Nevsky, Ariane Moffatt, Safia Nolin et Milk & Bone). Peux-tu nous raconter comment tu t’es retrouvé dans ce milieu?
«Tout a commencé en écoutant une reprise de Tout le monde en parle sur mon cellulaire, parce que je suis paresseux. Je suis resté accroché sur le segment avec Safia, qui était là pour parler de son album. Je l’ai écouté, j’ai écouté les quelques extraits qu’ils ont fait jouer, et tout de suite, je me suis mis à faire des recherches sur elle. Je lui ai écrit, et quelques jours plus tard, elle passait à la maison pour discuter et faire quelques photos.»
«Cette femme-là, c’est une montagne inébranlable, un phœnix qui renait de ses cendres, ou toute autre analogie du genre. Elle m’a raconté son parcours et, franchement, faut être forte pour avoir fait ce bout de chemin. J’étais super flatté qu’elle ait accepté mon invitation et je trouve que les photos lui font justice.»
«Ensuite, c’est pas mal de fil en aiguille. Une photo de Safia Nolin s’est retrouvée sur une affiche des FrancoFolies, des amis d’amis m’ont référé, des agents m’ont contacté, ma bonne amie Charlotte s’est mise a travailler pour une boîte de gérance d’artistes et s’est mise a me référer aussi. Ça part de là et, franchement, j’aime bien prendre des artistes/comédien(ne)s en photo, parce que le résultat est toujours un peu inattendu. Je suis toujours agréablement surpris.»
3. Tu sembles aussi avoir un intérêt particulier pour les portraits. Qu’est-ce qui te plaît dans ce type de shoot?
«Le visage est le paysage le plus mystérieux et impressionnant à la fois. Tellement complexe, il suffit d’un léger détail pour changer sa nature. C’est tout un défi de produire une photo qui peut capter l’attention avec seulement un visage, mais quand je réussis, je suis bien fier.»
4. Quels ont été tes plus grands défis en tant que photographe?
«Globalement, c’est de ne pas trop tomber dans le commercial cliché, simplement parce que ça manque de saveur. Mais, encore là, convaincre un client qui a déjà une idée en tête, c’est une autre game.»
«Sinon, je dirais que c’est de se démarquer. N’oubliez pas que j’ai écrit plus haut que j’étais paresseux. La photo est rendue énormément accessible, et c’est facile, quand tu commences, de te décourager rapidement et/ou de t’asseoir sur ce que tu fais en te disant que c’est assez beau pour toi et de ne pas pousser plus que ça.»
5. Ton exposition en cours au Livart met en vedette les portraits mentionnés ci-haut, mais également une série sur l’art du ligotage japonais. Qu’est-ce qui t’a donné envie d’explorer le Kinbaku en photos?
«Je vais faire ça court: je sortais de chez Lozeau et j’me suis arrêté chez Renaud-Bray dans la section photographie. Il y avait là un livre scellé sans démo. C’était celui d’Araki et, par curiosité, je l’ai acheté. Quand je suis tombé sur ses photos de Kinbaku, j’ai vraiment feelé de quoi. J’aimais déjà la beauté dans la tristesse; il y a quelque chose là-dedans que tu ne retrouves pas dans des faces de gens heureux. C’est pur, je trouve.»
«J’ai trouvé dans le Kinbaku un équilibre parfait entre la force et la fragilité, et là je ne parle pas de Kinbaku de nature BDSM, c’est pas ma game.»
«En faisant des recherches, je suis tombé sur un segment de l’émission de Pénélope McQuade, avec comme invitée Isabelle Hanikamu. Isabelle, c’est un maître du Kinbaku qui a un mentor doublement maître qui habite au Japon. Elle fait régulièrement des voyages pour enseigner et peaufiner son art. On s’est rencontrés dans un salon de thé et nous nous sommes mis d’accord pour une petite série de photos pour montrer cet équilibre de force/fragilité. Finalement, je pense qu’on va la continuer.»
Pour consulter nos précédentes chroniques «Dans la peau de…», visitez le labibleurbaine.com/Dans+la+peau+de…
Quelques photographies de Julien Laperrière...
Par Julien Laperriere