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Crédit photo : Bruno Colpron
Les auditeurs s’y font bombarder dès le départ d’images d’éjaculations dans un corps plus ou moins céleste, avec une abondance de références aux ovules et aux flots de spermatozoïdes qui en résultent. Déjà, c’est plus fort que soi, on essaie de comprendre: si c’est pour nous parler de désir de rapprochement toujours plus intense, pourquoi avoir opté pour une formule où la présence physique brille à ce point par son absence?
À travers ce lyrisme rebelle à toute forme de cohérence, avec les ovules et le reste, une suite dans les idées se fait quand même sentir: celle d’un univers au moment du vide de la procréation, celui des multiples idées en émergence qui gagneraient à mûrir. Elles en sont encore au stade du cauchemar dionysiaque, avant l’éclair apollinien qui, d’un coup d’inspiration matinale, permettrait à la forme de voir le jour.
Quelques figures sont belles, il est vrai, et même d’un tragique touchant, mais elles se trouvent écrasées ou entrecoupées par des fantasmes d’adolescence mal digérés: Superman, Cyborgs homosexuels, kamikazes pénétrant les tours jumelles, et entrelacées d’énoncés peu développés sur les liens entre la vie et la mort, la haine et le vide. Si l’auditeur se trouvait en situation de relire ou de réécouter comme il peut le faire avec une chanson ou un poème, ces images auraient pu germer et lui permettre d’en savourer les fruits. Mais ici, le contexte ne s’y prête pas.
Par un tour de force, le jeu de sonorités de Léonore Mercier parvient à se nouer à ce discours incongru. Il faut dire que, paraît-il, la compositrice et le poète ont travaillé de près, mais le cynisme du texte laisse peu de place à l’usage des notes chaudes, acoustiques ou aux envolées harmoniques, parfois timidement entamées. Les jeux visuels de Maxence Mercier, quant à eux, parviennent à suivre le rythme, enjoliver l’ensemble et même distraire, lorsque les mots deviennent insupportables. Dans le cas présent, cela semble toutefois le plus qu’il soit humainement possible d’attendre d’eux.
À la fin, même le poète semble étouffer dans un univers éjaculatoire où la bandaison éternelle apparaît finalement comme une condamnation divine pour les fous de Dieu. Mais à ce point, le public a décroché de l’aspiration de comprendre la suite du récit qui lui avait été promis. Certains se blottissent, d’autres rient ou regardent les autres rire, s’enrager ou se blottir les uns contre les autres sur ces coussins plus propices à la tendresse qu’à la contemplation prolongée.
Si Arthur H, en jouant l’adolescent qui ne se prend pas au sérieux, rêvait de créer une finale où chacun prendrait l’écoute à la légère, disons que l’effet est réussi!
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Par Bruno Colpron
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