SortiesConcerts
Crédit photo : Danielle Plourde
Pour être au premier rang, ou du moins avoir une place de choix, il fallait certainement arriver tôt, car il y avait du monde à’ messe au MTELUS avec ce concert qui était présenté à guichet fermé depuis des lustres déjà. Et il n’a suffi que quelques secondes de la prestation solo de Luke Sital-Singh, auteur-compositeur-interprète britannique et invité d’honneur des Stone sur cette tournée, pour se rendre compte qu’il y avait des gens, et que ces mêmes gens parlaient excessivement fort, même durant la prestation de cet artiste qui a relevé le défi de se présenter seul sur scène…
L’intensité en montagnes russes de l’auteur-compositeur Luke Sital-Singh
Qu’à cela ne tienne, car cette impolitesse est le commun des concerts musicaux, Sital-Singh a bien cassé la glace, s’attirant quelques applaudissements et acclamations bien sentis par les spectateurs de premier rang qui vivaient bien l’intensité que dégageait l’artiste, qui visitait Montréal pour la seconde fois après un passage, il y a tout juste un mois, au Centre Phi.
Avec sa guitare électrique couleur crème, qu’il a variée à deux ou trois occasions à un clavier, celui qui se sent inspiré par les effets du temps et de son passage dans nos vies, par notre siècle et ses changements, et les émotions humaines comme le doute et la peur, présentait Time is a Riddle, son nouvel album paru au printemps dernier. Un opus empreint d’une signature folk claire où l’on sent bien une émotivité à fleur de peau dans l’interprétation. Tellement que, par moments, Luke Sital-Singh poussait un peu trop la note, comme prisonnier de son intensité, modifiant son filet de voix alors doucereux vers une tonalité plus éraillée, voire presque criarde.
Il faut toutefois découvrir cet artiste pour la sensibilité qui émane de ses textes, et pour ses talents de compositeurs que l’on a découvert, à juste titre hier, avec les pièces «Still», «Innocence», «Killing Me», «Nothing Stays the Same» ou la fort jolie «21st Century Heartbeat».
Angus & Julia Stone en formule sextuor: naturel et délicatesse
Près de trois quarts d’heure auront été nécessaires pour convaincre les Australiens d’enfin investir la scène du MTELUS, le public s’impatientant à chaque minute qui passait, et on les comprend. C’est donc à 21h15 précises que Julia, toute de noir vêtue, suivie de près par Angus et sa pilosité bien fournie, et leurs quatre musiciens se sont présentés sur scène, ne perdant pas une seule seconde en démarrant avec l’exquise «Baudelaire», qui fait belle figure sur Snow.
Pour accompagner ce doux hommage au célèbre poète français – Julia nous ayant récité, plus tard durant le spectacle et dans son intégralité, le poème «Enivrez-vous», certes dans un français plus qu’approximatif – on pouvait voir, à l’arrière, une projection d’une mer en mouvement, les vagues oscillant au gré de la clameur du vent. Quoi de mieux, après cette entrée en matière, que «Make it Out Alive», qui a laissé sa place à «Cellar Door», dont le vidéoclip, par ailleurs, paraîtra très prochainement.
Il faut l’avouer, les projections à l’arrière-plan n’apportaient pas grand-chose au spectacle; les images d’eau en mouvement revenant trois fois plutôt qu’une, et une tombée de flocons durant la pièce «Snow» apportant un peu de prévisibilité dans le tableau. Somme toute, on reste émerveillé par l’aisance sur scène de chacun des artistes, mais déçu par le cruel manque de complicité entre le frère et la sœur. Et là est le gros bémol de la soirée: on s’attendait à vivre cette synergie entre Angus et Julia que l’on arrive même à ressentir à l’écoute de leurs albums tellement ils sont enregistrés avec cœur.
Et on ne peut pas passer sous silence leur version réarrangée de «Big Jet Plane», succès de l’album Down the Way, qui a eu droit à une belle introduction tout en arpèges, mais qui aura cruellement déçu au final. Même si Angus a encouragé la foule à allumer leurs téléphones cellulaires et à les brandir haut dans les airs, le moment manquait d’émotivité tellement leur version était à des années-lumière de celle que l’on connaît. Dernière déception à ajouter à l’ensemble: l’absence volontaire d’«A Heartbrake», qu’ils ont délibérément choisi d’écarter en toute fin de concert.
C’est ainsi que l’on a navigué, en eau calme pratiquement toute la soirée, avec Angus & Julia Stone durant deux longues heures, entre morceaux plus rythmés et ballades plus posées. Si de somptueux morceaux n’ont pas figuré parmi les dix-huit chansons retenues, on se réjouit d’avoir eu cette chance d’entendre «Private Lawns», une vieille chanson dépoussiérée pour l’occasion, avec ses sonorités roots durant laquelle on a même eu droit à un impressionnant solo de banjo! N’oublions pas, non plus, «Chocolates and Cigarettes», un morceau qu’ils n’avaient pas joué depuis plusieurs années, et les love songs «Wherever You Are» et «For You», Julia nous confiant qu’elle l’avait écrite à un ex-copain suite à une éprouvante rupture amoureuse, la lui envoyant par courriel. Ce à quoi il avait répondu «Nice song», avant de lui envoyer, à son tour, sa chanson d’amour en réponse à la sienne.
Un moment difficile duquel elle semble avoir pourtant gardé un bon souvenir aujourd’hui. Et nous, de notre côté, on garde aussi un beau souvenir de cette soirée, mais pas impérissable, car nous aurions justement aimé qu’Angus & Julia Stone nous ouvre légèrement plus leurs cœurs encore.
L'avis
de la rédaction
Grille des chansons
1. Baudelaire
2. Make It Out Alive
3. Cellar Door
4. Heart Beats Slow
5. Chateau
6. Wherever You Are
7. Bloodhound
8. Private Lawns
9. Who Do You Think You Are
10. Yellow Brick Road
11. Nothing Else
12. Big Jet Plane
13. For You
14. My House Your House
15. Snow
Rappel
16. Chocolates & Cigarettes
17. Harvest Moon (reprise de Neil Young)
18. Soldier