Allan Rayman au MTELUS: une solide performance signée Mr. Roadhouse

En première partie: Madison McFerrin, une femme forte et indépendante

Avant de plonger dans l’univers d’Allan Rayman, attardons-nous d’abord sur la performance de Madison McFerrin, qui a assuré à elle seule la première partie de la soirée.

Splendide et élégante, l’auteure-compositrice brooklinoise, fille du célèbre Bobby McFerrin, a présenté au public ses pièces aux sonorités soul nappées d’une touche d’électro et dont la plupart sont issues de son microalbum You + I, paru en 2019. Au menu également: plusieurs autres simples qu’elle a sortis depuis 2016.

Madison McFerrin au MTELUS. Photo: Mathieu Pothier

Un spectacle qui ne lève pas… est-ce toujours la faute de l’artiste? Pas du tout. Et dans ce cas-ci, il est permis d’en douter, car l’attention éparpillée de la foule, qui attendait visiblement le clou de la soirée, n’a pas rendu justice à la présence scénique forte et manifeste de l’artiste. Armée de sa voix claire et jazzée, McFerrin a chanté avec assurance ses pièces, passant de «Fallin’» à «Milky Way» jusqu’à «TRY», son plus grand succès.

La chanteuse a ensuite mis le point final à sa performance en encourageant les spectateurs et spectatrices à découvrir sa musique sur les diverses plateformes, avec une mention spéciale pour Bandcamp, «qui offre le meilleur soutien aux artistes indépendants», selon elle.

Malgré sa brève performance et le lien ténu entre son public montréalais et elle, son talent et son authenticité sont indéniables. Et pour les amateur.rice.s de voix feutrée, Madison McFerrin est assurément un bel ajout à vos listes de lecture!

Place au fameux Mr. Roadhouse

Mr. Roadhouse, c’est le surnom que s’est donné Allan Rayman, une sorte d’alter ego musical et personnage dont il revêt la peau avec tellement de naturel qu’on en vient à douter de qui est qui et de ce qui est authentique ou mis en scène.

D’ailleurs, on ne sait pas grand-chose de lui, sinon qu’il a un je-ne-sais-quoi d’un peu gauche, de mystérieux et d’un peu tout croche lorsqu’il se présente sur scène. 

Saviez-vous qu’Allan Rayman n’accorde aucune ou très peu d’entrevues? Et s’il le fait, il prend bien soin de se faire discret sur son cheminement et sur sa vie personnelle. En tout cas, on est loin d’un Mike Clay, leader de Clay and Friends, qui annonce à 50 000 individus sur une Place des festivals pleine à craquer qu’il a appris à jouer de la trompette… dans le sous-sol chez sa mère!

Non, Allan Rayman ne déborde pas autant et ne se confie pas de la sorte.

Est-il réellement timide, ou est-ce juste un personnage qu’il se plaît à incarner en public? Dur à dire. Et c’est en nous laissant dans cette «ambiguïté» non déplaisante que l’auteur-compositeur nous a fait naviguer, au gré de sa musique urbaine et de son univers musical éclectique qui marie le blues, le hip-hop, le grunge, le rock et le RnB.

Allan Rayman au MTELUS. Photo: Mathieu Pothier

L’inclassable, mais pas si incassable…

Devant un parterre du MTELUS qui avait adopté pour l’occasion une allure intimiste avec ses tables et ses chaises de bistro qui s’étalaient ici et là, celui qui s’était également produit à Osheaga à l’automne dernier a débarqué en force avec des pièces tirées de son plus récent album, Roadhouse 02, paru en mars dernier, lequel agit en quelque sorte de continuité de Roadhouse 01, sorti il y a cinq ans déjà.

Avec sa voix rauque et puissante, il a enchaîné avec «Hello to Me», une pièce bien bluesy qui figure sur Christian, paru en 2020, et lors de laquelle il a laissé tout la place à sa gesticulation un peu titubante, échappant même son micro à quelques reprises.

Après «Gun», une pièce qui flirte agréablement avec le grunge, Allan Rayman a pigé dans ses plus grands succès, dont les plus sombres «27» et «Word of Mouth», l’énergique «13» ainsi que la superbe «Tennessee». Fidèle à lui-même (ou à son personnage, c’est selon!), il a ponctué son spectacle de quelques courtes interactions avec le public et au cours desquelles il a avoué être un gars timide avec bien peu de jasette.

Qu’à cela ne tienne, c’était juste assez pour qu’ils nous assurent que son band et lui passaient une excellente soirée.

Parlant de son band, justement, ces «musiciens de l’ombre», discrets et rarement placés sous les projecteurs, accompagnaient le chanteur dans tous ses mouvements, lui qui tournoyait sans cesse, les quatre fers en l’air, de gauche à droite sur scène.

Ainsi, Benny Foran à la guitare, Evan Porter à la basse et le batteur Anthony Daniel ont soutenu Rayman durant sa performance, et ce, du début à la fin, l’accompagnant à travers ses prouesses vocales avec une intensité telle que la caisse claire s’est brisée pendant son interprétation de la pièce «Rose».

Mais ces quelques maladresses n’ont en aucun cas altéré la qualité du spectacle. Elles ont même participé à l’authenticité de sa prestation pour le moins singulière. Nul n’est parfait en ce monde, Allan Rayman ne fait pas exception à la règle, et c’est ce qui le rend d’autant plus attachant.

Allan Rayman et ses musiciens. Photo: Mathieu Pothier

Un petit tour au paradis à la Rayman

La soirée s’est poursuivie sur un excellent pacing avec «Graceland», «Bye Bye Blondie», «Pretty Bug» et «Books», alors que l’énergie de la foule semblait atteindre son apogée.

Mais le summum a été atteint avec «Road Warrior», la toute dernière chanson qui s’est terminée sur un torrent d’applaudissements et de «olé olé olé» invitant l’artiste à revenir sur scène pour performer la fameuse «Lucy the Tease», sa deuxième chanson la plus populaire sur les plateformes de streaming.

Pour finir en douceur, et histoire de nous laisser décanter et revenir gentiment sur Terre après ce voyage incroyable au pays de Mr. Roadhouse, Allan Rayman a ravi ses fans avec «22.25», avant de clore la soirée sur «Pretty Please» dans un decrescendo habile qui l’a laissé seul avec son guitariste.

Mais il a vite fait de ramener ses acolytes sur scène pour un ultime salut avant de quitter vers les coulisses en clamant que ce genre de soirée était «sa version du paradis»!

Et c’’est fort probablement l’avis de nombreuses personnes qui étaient présentes dans la salle, si je me fie au tonnerre d’acclamations qui a surgi de la foule.

Encore une fois, Allan Rayman a épaté la galerie avec une performance singulière et théâtrale à souhait au cours de laquelle il a invité ses fans à aller à la rencontre de l’étonnant Mr. Roadhouse, auquel on s’attache bien rapidement.