Musique
Crédit photo : Montage: Isabelle Lareau
Les découvertes et les nouveautés
Ton corps est déjà froid – Pierre Lapointe et Les Beaux Sans-Cœur
Le chanteur dandy a créé un véritable émoi en lançant un album-surprise le 24 août, mais également en changeant complètement de registre et en offrant un opus… rock! Il semble que l’univers musical si familier à Pierre Lapointe, et dans lequel il excelle, ne convenait pas à ce qu’il avait envie d’exprimer. Plutôt que de rester prisonnier de sa sphère, il a fait appel aux Beaux Sans-Cœur, un super groupe constitué du bassiste Philippe Brault, des guitaristes Nicolas Basque (de Plants & Animals) et Vincent Legault (Dear Criminals) ainsi que du batteur José Major. Ensemble, ils explorent le rock des années 60, le yé-yé et le punk, afin de satisfaire le côté rageur de Lapointe, et ils parviennent ensemble à créer quelque chose de différent, autant sur le fond que sur la forme.
Et le résultat est étonnant! Reconnu pour ses paroles très poétiques et parfois crues, il délaisse les textes fignolés et adopte un style d’écriture plus direct, plus brut et plus vif. Les thématiques de l’amour, de la rupture, du sexe et de la colère sont abordées sans détour. «Vrai ou faux» est un règlement de comptes en bonne et due forme, employant la formule passive agressive avec une finale de guitare psychédélique. «4 jours, déjà» et «Chienne chimère» sont des petits bijoux de punk, tandis que «Décompte», une pièce de neuf minutes, tombe dans le spectre du rock garage, et ce, sans s’essouffler.
Une nouvelle avenue intéressante, mais les admirateurs de longue date n’emboîteront pas forcément le pas.
Souldier – Jain
La musicienne Jain (Jeanne Galice) a pris le monde de la musique par surprise avec son premier opus, Zanaka (2015), et voilà qu’elle récidive cette fois avec Souldier, paru le 24 août dernier. Débordant de cadences aussi diversifiées que contagieuses, ce nouvel album plaira assurément aux admirateurs qui ont eu le coup de foudre pour la jeune chanteuse. Tout comme son album précédent, on y retrouve des influences congolaises. Par contre, la chanteuse s’inspire également de rythmes orientaux et hip-hop, de nouvelles sonorités qui confèrent un certain renouveau sur le plan des textures.
La chanson titre est une réflexion par rapport à l’attentat d’Orlando de 2016 perpétré contre la communauté LGBTQ+. «Star» est un morceau électro très dynamique qui fait écho à l’industrie de la musique. «Inspecta», qui fut composée à l’aide d’un échantillon de la chanson thème de la série (pour enfants) Inspecteur Gadget, arrachera un sourire aux plus vieux, et la pièce «Alright» semble être une peine d’amour devenue un hymne à la résilience (le vidéoclip qui met en vedette des filles est vraiment porteur de signification).
Souldier est aussi intéressant que la première offrande, sinon davantage. Jain semble déterminée à faire briller la bonne humeur et l’amour, préférant transformer le négatif en positif, une vision qui est très bien traduite autant par les paroles que par la musique.
Les revenants d’entre les morts
The Ballad of the Runaway Girl – Elisapie
La chanteuse fera paraître un troisième disque solo en carrière, intitulé The Ballad of the Runaway Girl, ce vendredi 14 septembre. Celui-ci constitue une fabuleuse introspection sur sa vie, son identité et sa culture. L’artiste, qui est Inuk, explore avec profondeur et poésie son passé, plus spécifiquement son adoption, son enfance, la maternité, la place de la femme, l’amoureuse en elle, son exil et ses racines.
À la suite d’une dépression post-partum, la musicienne a trouvé refuge auprès de sa guitare et de «vieilles chansons folk autochtones». Elle croyait qu’elle allait travailler sur un album de reprises, mais l’inspiration s’est révélée à Elisapie. Bien qu’il y ait quelques reprises, elle présente majoritairement des pièces originales.
Par ailleurs, l’artiste un rend hommage aux femmes et aux filles autochtones disparues ou assassinées au Canada par le biais de son titre «Arnaq». «Don’t Make Me Feel Blue» parle de désir et possède une aura onirique des plus enveloppantes. «Darkness Bring the Light» est, pour sa part, élévateur.
Elisapie a demandé le soutien de Joe Grass (qui chante également en duo sur «Wolves Don’t Live by the Rules») et Paul Evans pour l’aider à co-réaliser cet opus. De plus, elle a fait appel à plusieurs collaborateurs chevronnés tels que Robbie Kuster (batteur de Patrick Watson), Nicolas Basque (guitariste de Plants & Animals), Leif Vollebekk, Joe Jarmush (guitariste de Suuns), Natasha Kanapé-Fontaine… pour ce nouvel album et le résultat est épatant.
La délicatesse de ses chansons est sublime. Le rythme est doux, mais captivant. La mélodie nous transporte et son timbre de voix nous fait tendre l’oreille afin de bien absorber la beauté de cette offrande.
À surveiller ce mois-ci:
Choses Sauvages – Choses Sauvages
Le quintette québécois affectionne le new-wave et le funk, les rythmes lascifs et planants. Après avoir mûri et raffiné son style, il a créé un album parfait pour les fins de soirée, juste avant la fameuse dernière tournée, et pour peut-être créer des rapprochements sur le plancher de danse!
Le groupe de Saint-Eustache a offert deux maxis en anglais, Late Night (2013) et Japanese Jazz (2015), avant de présenter une première chanson en français, «L’Épave trouée», qui remporta un certain succès. Poursuivant sur la même lancée, ils ont fait paraître Choses Sauvages le 31 août. Ce premier album studio fut réalisé par Emmanuel Ethier, qui a travaillé entre autres avec Chocolat, Jimmy Hunt et Peter Peter.
«La valse des trottoirs», avec sa basse funky, dégage un esprit rétro et c’est l’une des pièces les plus rythmées de la galette. «Ariane» est le conte d’une jeune femme dont le désenchantement s’amplifie, tandis que «Nuages» a indéniablement un certain charme pop.
Leur son est électro et pop à la fois, et ce, bien que la cadence soit dansante et séduisante. Une formation qui risque fort de nous impressionner davantage au fil du temps!