«Les albums sacrés»: les 20 ans de Discosis de Bran Van 3000 – Bible urbaine

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«Les albums sacrés»: les 20 ans de Discosis de Bran Van 3000

«Les albums sacrés»: les 20 ans de Discosis de Bran Van 3000

Un party 100% BV3

Publié le 19 juillet 2021 par Édouard Guay

Crédit photo : Tous droits réservés

Le syndrome du deuxième album, Bran Van 3000 pourrait vous en parler longtemps, surtout son leader, le producteur et musicien James Di Salvio! Propulsé par le succès mondial «Drinking in L.A.», tiré de son premier album Glee (1997), le collectif montréalais a dû prendre un bon pas de recul avant de revenir en force avec l’ambitieux Discosis, il y a vingt ans. Et malgré leur désir de ne pas décevoir, Di Salvio et sa bande n’allaient pas manquer de nous déstabiliser de la plus agréable des façons.

L’aventure créative derrière Discosis est une formidable histoire symbolisant à merveille le Montréal effervescent et créatif des années 1990-2000, en particulier dans le secteur du Mile-End, véritable pépinière pour le génie musical de l’époque (Lhasa De Sela, Arcade Fire ou Jean Leloup, pour ne nommer que ceux-là).

Paru sous la défunte maison de disques Grand Record, laquelle a été fondée par les Beastie Boys, Discosis regroupe une impressionnante liste d’invités de marque et met de l’avant une panoplie d’influences.

Et même si l’album n’a pas toujours connu le succès qu’il méritait en raison d’une cruelle malchance, Discosis est (et sera toujours) un album marquant de la scène québécoise. Un vrai album de party où Bran Van était au sommet de sa gloire (et de son art!)

BV3 International

Comme il aurait été bon d’enflammer la piste de danse sur «Astounded», le morceau phare de Discosis, lors de sa sortie en 2001 (j’étais malheureusement trop jeune pour sortir dans les bars!)

Véritable hymne disco, la chanson a néanmoins déstabilisé plusieurs fans de la première heure: la voix de Di Salvio est absente (remplacée par celle du légendaire Curtis Mayfield!), tout comme les influences hip-hop. On a rapidement compris que Bran Van n’avait pas l’intention de nous faire un autre Glee, malgré le succès énorme qu’avait connu ce premier album. La plupart des membres de la période Glee avaient quitté le navire entre-temps, de toute façon!

Enregistré entre Saint-Sauveur, Montréal, New York et Londres (on peut dire que Di Salvio s’est gâté avec le budget que lui a accordé Grand Royal) sur une période de deux ans, Discosis était l’album de toutes les ambitions pour Bran Van.

Après tout, le groupe était sur un petit nuage après Glee et avait désormais le luxe de travailler avec de grosses pointures musicales. La co-production a été confiée au réputé Ric Ocasek, ancien membre de The Cars, qui a notamment travaillé avec des groupes comme Weezer, Bad Religion ou No Doubt. Et le producteur exécutif? Nul autre que Mike D des Beastie Boys!

Ouais, pas de doute, on jouait vraiment dans la cour des grands ici.

De tout, pour tout le monde

À la manière d’un DJ qui jongle avec les vinyles, Di Salvio alternait ainsi entre plusieurs mondes de sonorités: disco, funk, hip-hop, house, folk, rock, reggae, dancehall… On va dans tous les sens ici, et au diable le fil conducteur! Bran Van nous proposait un album conçu comme une mixtape géante, avec un peu de tout, pour tout le monde. À défaut d’être constant, il n’est jamais prévisible.

Profitant de tous ces précieux contacts et de sa nouvelle amitié avec Mike D, James Di Salvio a attiré plusieurs artistes d’envergure sur l’album: la légende de la soul Curtis Mayfield («Astounded»), le vétéran rappeur Big Daddy Kane («Discosis», «Loaded»), la star du reggae Eek-A-Mouse (la très contagieuse «Go Shopping»), et le chanteur sénégalais Youssou N’Dour («Montréal», «Sénégal») viennent notamment faire un tour.

Et comme sur le premier album, l’incontournable Jean Leloup, grand ami de Di Salvio, est venu aussi faire un tour!

Mayfield / Bran Van: la collaboration de la dernière chance

Sans contredit la prise la plus impressionnante sur l’album, Curtis Mayfield aurait toutefois pu ne jamais se retrouver sur le morceau d’ouverture. Mourant et malade au moment de l’enregistrement (il s’éteindra finalement en 1999, deux ans avant la sortie de Discosis), Mayfield n’a finalement jamais pu se déplacer physiquement pour enregistrer sa voix, mais a permis au groupe de puiser dans de vieilles bandes non utilisées de sa fameuse chanson «Move On Up». Le résultat est bluffant, comme si le légendaire musicien était vraiment passé en studio.

«Astounded» sera d’ailleurs la dernière chanson sur laquelle Mayfield sera créditée de son vivant.

Une histoire parmi plusieurs qui indiquent à quel point rien n’a été vraiment simple dans l’élaboration de cet album. Et ça n’a fait que se complexifier davantage à sa sortie!

Les ambitions déçues

Mai 2001: Discosis sort enfin dans les bacs des disquaires aux quatre coins du monde. Ce qui devait alors être le moment de récolter les fruits du succès s’est finalement avéré une période cruelle pour Bran Van.

Alors que l’album se vendait bien au Canada et en Amérique du Nord, les Beastie Boys annonçaient la fermeture définitive du label Grand Royal, tuant ainsi dans l’œuf la distribution, la promotion et la commercialisation de l’album.

Résultat: sans la machine Grand Royal derrière lui, Discosis est devenu pratiquement introuvable en Amérique du Nord (heureusement, il a été réédité au Québec par la suite). Paradoxalement, les ventes allaient mieux de l’autre côté de l’océan.

La faillite de Grand Royal aura freiné la belle envolée de l’album, de même que le projet de faire une tournée européenne.

Un retour plus que bienvenu

Si le groupe a pris du temps à se relever de cette épreuve, il a su revenir en force sept ans plus tard avec un méga concert extérieur au Festival International de Jazz de Montréal devant une foule monstre de plus de 100 000 personnes!

Pour la première fois, on pouvait entendre les chansons de Discosis sur scène, notamment la vibrante «Speed», servie en lever de rideau. Un grand moment pour racheter plusieurs années d’injustice pour cet album imparfait, mais ô combien plaisant!

Surveillez la prochaine chronique «Les albums sacrés» en juillet 2021.  Consultez toutes nos chroniques précédentes au labibleurbaine.com/Les+albums+sacrés.

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