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Crédit photo : www.facebook.com/dearcriminals/
Électro-émotif, électro-minimaliste, électro-folk… Ce n’est pas les étiquettes qui manquent pour décrire le genre musical du trio formé de Frannie Holder, Charles Lavoie et Vincent Legault. On a même pu lire quelque part électro-porn. «On ne se souvient plus si ça venait des médias ou de nous, mais plein de gens nous disaient qu’ils écoutaient notre musique en baisant».
Peut-être, aussi, que l’appellation est née à la suite du lancement de leur double clip sur les chansons «Crave» et «Petit Mort» de leur deuxième mini EP Crave, et toute la charge sensuelle et érotique qui s’en dégageait.
«À nos débuts, notre son était plus folk. C’était Frannie et moi avec une guit. Puis l’électro s’est progressivement ajouté, notamment avec l’arrivée de Vincent Legault et de ses claviers», explique Charles Lavoie.
Si les mots n’arrivent pas à bien circonscrire toute la richesse de leur musique, on peut certainement les surnommer les maîtres de l’ambiance et de la lévitation électrostatique où les émotions à fleur de peau demeurent en suspens.
Ce n’est d’ailleurs pas surprenant qu’on sollicite le trio pour des projets aussi variés que le cinéma, le théâtre et la danse contemporaine.
En mai dernier, ils ont composé la musique du spectacle de danse de Frédéric Tavernini au Monument-National dont l’œuvre, Things Are Leaving Quietly, In Silence, était très intense émotionnellement.
«Ça a été une des expériences les plus enrichissantes à faire d’un point de vue musical», souligne Frannie. Certaines des chansons ont d’ailleurs été retenues pour leur prochain mini EP Another Picture, qui sortira le 16 septembre.
Le groupe a aussi sorti un nouveau clip pour la pièce «Cold Wave» qui se retrouvera sur cet opus.
Et c’est sous le signe du lâcher-prise que cet album a été conçu. «De composer aussi souvent pour d’autres, ça enlève de la pression quand vient le temps de composer un nouvel album. On a moins ressenti le besoin de se prouver», explique-t-elle.
C’est aussi une façon de dire qu’ils existent toujours comme groupe à part entière, malgré toutes les collaborations qu’ils font avec les autres. «On revient donc à notre essence avec cet album, mais enrichit de toutes les nouvelles expériences grâce auxquelles on a exploré de nouveaux sons avec de nouveaux claviers, soutient Charles. Je dirais que cet album est un bootleg, c’est-à-dire une sortie parallèle, hors histoire du band.»
Crédit: Victoria Dimaano
Avec quatre EP en moins de quatre ans, le trio n’a pas l’intention de changer sa formule et de composer un album «complet». D’une part, pour des raisons financières, mais d’autre part en raison de la culture musicale dans laquelle on évolue de nos jours.
«On est beaucoup dans une culture du single. Les gens écoutent une chanson qu’ils aiment et c’est rare qu’ils achètent l’album complet. Un EP nous permet aussi de nous réinventer et de sortir de nouvelles chansons plus rapidement», souligne Charles.
Et la création d’un album demande beaucoup plus de temps de préparation et d’écriture. Impossible d’enfiler douze chansons au hasard. «C’est un processus plus long pour le même temps d’écoute; c’est-à-dire que, de nos jours, les gens écouteront seulement un album ou un EP pendant environ trois semaines. Si tu ne nourris pas ton public rapidement, il t’oublie et pense que t’es mort», ajoute Frannie.
Composer pour d’autres
En mai dernier, ils ont signé la musique pour la pièce Les lettres d’amour, mise en scène de David Bobée, en collaboration avec Béatrice Dalle en avril dernier, et qu’ils reprendront à Paris en janvier 2017. Ils revisiteront également des œuvres classiques à la Dear Criminals pour une pièce musicale à l’Opéra de Paris en 2018.
Ils ont aussi pu goûter à l’expérience cinématographique avec le prochain long-métrage Nelly d’Anne Émond et la nouvelle série en dix épisodes Fatale-Station de Stéphane Bourguignon et Rafaël Ouellet, pour qui ils ont composé la trame sonore. Peu importe le projet artistique, ils ont la chance de se faire encore approcher pour la particularité de leur son.
«Ça nous différencie d’une boîte de production plus générique. Il y a quelque chose qui ressemble beaucoup à notre processus créatif, autant dans la méthode que dans le son», explique Charles.
Certaines chansons originales du groupe se trouvent ainsi telles quelles dans Nelly. Pour certaines scènes, ils ont composé des pastiches, alors que pour d’autres, c’était du sound design. «Pour Fatale-Station, on nous demandait plutôt du soundscape avec notre caractère et notre son à nous qui tapisse la série d’un bout à l’autre», ajoute-t-il.
Même si les projets de composition ne cessent de se multiplier, le groupe n’entend pas délaisser leurs projets personnels pour autant. «Je serais malheureux si on ne faisait que composer de la musique pour un film ou une pièce. J’ai besoin de faire de la scène aussi», soutient Charles.
Leur agenda est donc bien chargé, mais ils ont la chance de pouvoir travailler séparément. «Vincent aime moins la scène et peut travailler sur les arrangements pendant que Charles et moi donnons des spectacles», explique Frannie.
La formation se produira à l’Église Saint-Jean-Baptiste le 16 septembre prochain accompagnée de 150 choristes, une première pour elle. «C’est Vincent qui agit comme chef d’orchestre pour ce spectacle. Il a tout fait les arrangements pour transformer la chorale en un véritable clavier vivant», précise Charles.
Quelques billets au coût de 25 $ sont encore disponibles. C’est une belle occasion de pouvoir les entendre avant qu’ils mettent les voilent pour Paris en 2017.