MusiqueLes albums sacrés
Crédit photo : Geffen Records
En toute honnêteté, je n’aurais jamais cru que le groupe se réunirait à nouveau. Je pensais sincèrement que j’avais plus de chances de voyager à bord d’une fusée qu’Axl et Slash ne se réconcilient. Mais bon, je croyais aussi que The Afghan Whigs ne se reformerait pas… Il semble que mon flair ne soit pas très aiguisé. Qu’importe, les fans, j’en suis certaine, sont très heureux de revoir Duff et Slash aux côtés d’Axl.
La fin d’une ère
Lorsque le quintette a émergé de Los Angeles, il a eu la chance de tomber au bon moment. Le mouvement hair metal, issu du glam metal, commençait à s’essouffler, et les excès des années 80 n’avaient pas leur place à l’aube de la nouvelle décennie. Le marché du travail, la récession, la génération X et le marasme omniprésent semblaient vouloir nous amener dans une nouvelle direction où l’authenticité et la simplicité s’installaient, marquant ainsi irrémédiablement la culture. Donc, exit Def Leppard, Mötley Crüe, White Snake, Poison… Ils ont perdu en popularité et ont déserté les palmarès. Les admirateurs, cependant, ultra dévoués, leur ont tout de même permis de continuer les tournées, et ce, même si les nouveaux albums ne séduisaient plus les masses. Dès lors, soit l’on se rangeait dans le camp de Metallica et de GNR, soit que l’on choisissait celui de Nirvana et de Pearl Jam.
Exploiter le déclin du hair metal
Guns N’ Roses fut l’un des groupes ayant permis cette transition: une attitude colérique et une apparence qui se situe quelque part entre le glam et le grunge. Les gars avaient un look plus simple et très «mauvais garçons». Cheveux crêpés et un soupçon de crayon pour les yeux pour Axl (années 80 obligent), pantalons de cuir, cheveux longs et chapeau haut de forme pour Slash, ils agissaient en rockstars et étaient ultra prétentieux. On ne savait jamais à quoi s’attendre avec eux. Allaient-ils terminer leur spectacle? Y aurait-il une émeute? Est-ce qu’Axl serait arrêté par la police? Est-ce que Slash quitterait le groupe? Est-ce que Steven et Duff seraient victimes d’une surdose? Tous des éléments qui leur conféraient un aspect dangereux, un atout fort prisé dans le rock.
GNR était la personnification de l’expression sexe, drogues et rock n’roll. Leurs histoires de musiciens torturés semblaient légitimes et leurs minois passaient super bien à la télévision. Ils avaient certes un comportement qui défiait les conventions, ce qui est, en soit, intéressant. Mais je dois dire que les commentaires misogynes, homophobes et racistes de Rose m’ont vraiment dégoûtée. Bien qu’occasionnels, je n’ai pas su en faire fi. Je reconnais par contre que leur musique est décapante.
Et de façon très stratégique, ils se dissocient du métal, qualifiant leur musique de hard rock.
Origine et tensions
Le groupe provient de l’amalgame des formations Hollywood Rose, dont faisait partie le guitariste Izzy Stradlin, ainsi que de deux anciens membres, le batteur Steven Adler et Slash, ainsi que L.A. Guns, qui comprenait Axl Rose. Adler connaissait le bassiste Duff McKagan, avec qui il avait déjà joué dans un autre groupe. Ce dernier se greffa à la formation peu après. Cette nomenclature sera, bien sûr, très changeante avec les années, mais en 1985, après quelques ajustements, ce sont eux qui, ambitieux, désiraient créer du vrai hard rock inspiré par le blues. Pari réussi.
Toutefois, les ballades du quintette sont davantage un accident de parcours; personne, dans le groupe, n’en voulait, sauf Axl. Et lorsque le chanteur désirait quelque chose, il n’hésitait à faire du chantage, rendant impossible la notion de compromis (et causant ainsi de nombreuses frictions). «Sweet Child O’ Mine» sera l’un de leur plus grands succès, permettant ainsi à GNR de devenir l’un des groupes les plus proéminents du rock. «Welcome to the Jungle», «It’s So Easy», «Nightrain» et «Paradise City» furent également des moments forts de l’album.
Un héritable mésestimé
Considéré comme étant leur meilleur disque par certains critiques, ceux-ci n’ont pourtant pas encensé Appetite For Destruction à sa sortie; il leur a fallu comprendre l’importance de cette offrande auprès des mélomanes pour corriger leur position. Trente millions de copies plus tard, celle-ci est désormais le meilleur vendeur pour un premier album; on reconnait enfin le génie de cette œuvre.
L’instabilité a fini par ternir la réputation de Guns N’ Roses. On les associe davantage aux mauvais coups cumulés au fil des années qu’à leur talent en tant que musiciens. Slash sait composer des riffs complexes et accrocheurs. Il est reconnu comme l’un des meilleurs guitaristes au monde. Adler est un batteur largement sous-estimé, spécialement aux yeux de Slash et Duff; c’est lui qui a insufflé l’énergie à Appetite For Destruction, notamment grâce à son style. Il a su créer un rythme relativement léger mais très entraînant. La ligne de basse de Duff est mélodique, et ce, même s’il n’est pas nécessairement le meilleur musicien, techniquement parlant. Cependant, il fut couronné du titre de meilleur bassiste de 2016 par Loudwire. Stradlin a, pour sa part, un bon sens du rythme, ce qui a permis à Slash de construire ses riffs. Il a également co-écrit plusieurs des grands succès de GNR. Rose, un baryton qui possède un registre de cinq, peut-être six octaves, est considéré comme l’une des voix les plus distinctives du rock.
Paru il y a 30 ans, Appetite For Destruction sonne toujours aussi solide. Lorsque que j’entends «Welcome to the Jungle», une petite vague de nostalgie s’empare de moi.
Irez-vous les voir au parc Jean-Drapeau le 19 août 2017?