«Un ménage rouge» de Richard Ste-Marie – Bible urbaine

LittératurePolars et romans policiers

«Un ménage rouge» de Richard Ste-Marie

«Un ménage rouge» de Richard Ste-Marie

Dans la peau du meurtrier

Publié le 23 avril 2013 par Éric Dumais

Crédit photo : Alire

Courtier en valeurs mobilières pour Lambert, Morin & Ross, Vincent Morin, en parfait millionnaire exempt de tout souci, quitte la tranquillité de sa banlieue au nord de Montréal pour assister à un stage à la Bourse de New York. Le 14 octobre 2002, sa vie bascule du tout au tout lorsqu’il surprend sa femme France Verret au lit avec deux inconnus.

Les éditions Stanké ont offert, en 2008, une première mouture de ce roman de Richard Ste-Marie qui a depuis été retravaillé et étoffé pour offrir une intrigue plus captivante et remaniée. Paru récemment aux éditions Alire, Un ménage rouge est en quelque sorte une invitation aller-retour pour une descente aux enfers, que le lecteur entreprend en même temps que le protagoniste apprend, en cette journée fatidique du 14 octobre 2002, qu’il a été cocufié par sa femme dont il ignorait jusqu’alors les incartades.

Comment réagiriez-vous si vous surpreniez votre femme au lit avec deux hommes? Le protagoniste Vincent Morin, pour sa part, ne s’est jamais posé la question puisqu’il a attrapé le premier objet à sa portée, à savoir un pied de lampe, duquel il s’est servi pour agresser sauvagement les deux amants de France, avant de s’en prendre à cette dernière, qu’il a littéralement défigurée au rythme de sa fureur. Il arrive parfois que l’être humain réponde instinctivement à des impulsions soudaines et c’est bel et bien le cas de Vincent Morin qui n’a certes rien vu venir et qui va devoir, sauf si le crime parfait existe, payer cher les conséquences de son acte.

Nombreux sont les romans policiers qui mettent en scène un mobile tiré par les cheveux, dont l’ensemble de l’intrigue repose sur la progression d’une enquête qui avance à tâtons jusqu’au dévoilement final de l’identité du meurtrier. Plus rares ceux qui permettent au lecteur d’avoir fenêtre sur cour sur la psychologie embrouillée du tueur lui-même, lui donnant ainsi l’opportunité de devenir un témoin actif et de s’attacher à une personne qui, autrement, n’aurait inspiré que répugnance et honte.

Ainsi, l’auteur québécois Richard Ste-Marie, qui a déjà fait ses preuves avec L’inaveu, finaliste 2012 du Prix Saint-Pacôme du roman policier, nous offre la possibilité de bien apprivoiser Vincent Morin, ce millionnaire pour qui la vie lui souriait, en plus d’assister au maquillage de la scène du crime, allant de la dissimulation des corps, au mensonges adressés à la belle-famille, à la dépression majeure accueillant à bras ouverts un homme rongé par la solitude et l’anxiété d’être découvert par les policiers.

Assistons-nous au crime parfait ou au récit d’un homme qui aura par inadvertance commis une erreur impardonnable? Aussi mathématiquement calculé qu’Un café maison, aussi envoûtant que Le dévouement du suspect X et Un endroit discret, Un ménage rouge est un roman policier digne des grands maîtres japonais Keigo Higashino et Seichô Matsumoto, doublé des caractéristiques du thriller psychologique dit page turner, qui n’arrive cependant pas au coup de théâtre tant désiré mais qui a au moins le mérite de nous tenir en haleine jusqu’à la toute fin. Après autant de stress et de questionnements, le roman de Richard Ste-Marie aurait dû en effet nous conduire vers une finale plus surprenante et achevée qui ne nous aurait pas fait regretter les scénarios déjantés que nous avions mis en scène dans notre esprit.

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