LittératureRendez-vous d'histoire avec
Crédit photo : Société d'histoire In Memoriam
Evelyne, c’est un plaisir de faire ta connaissance! Il semble que ta passion pour la confection de vêtements remonte à bon nombre d’années déjà! En effet, lorsque tu étais jeune fille, c’était déjà une activité qui te plaisait grandement. Mais c’est en 1994 que cette passion s’est transformée en occupation professionnelle. Raconte-nous donc comment est né cet intérêt grandissant pour les costumes d’époque et leur confection.
«J’ai toujours aimé me costumer. Avec la venue des Médiévales de Québec en 1993, ça me donnait l’occasion de le faire “en public”. J’ai suivi les ateliers de costumes, mais j’ai été vite très déçue de voir que l’information donnée n’avait pas les fondements historiques dont je me serais attendue. J’avais beau ne pas avoir encore 20 ans, le souci d’une bonne représentation était en moi. Je me suis dit: “Dans ma vie, je vais travailler à ce que plus jamais de gens, comme moi, se fassent donner de fausses informations sur le costume et l’histoire”. Je venais de dépenser mes sous d’adolescente, mon temps et mon énergie à me faire des costumes anachroniques, moi qui avais fait confiance aux “officiels”.»
«J’étais bien déçue; mais c’était le début d’une grande aventure!»
Toi qui t’intéresses également à l’ethnologie et qui as travaillé en documentation et en conservation des collections costumes et textiles, tu es également directrice et fondatrice de la Société d’histoire In Memoriam, «qui se spécialise dans la reconstitution historique de haut niveau depuis 2001». On serait curieux d’en savoir plus sur la mission de la SHIM ainsi que sur ton parcours professionnel, qui est très diversifié, ma foi!
«La SHIM a roulé sa bosse de 2001 à 2015 en offrant des reconstitutions pour des institutions muséales et des festivals des années 1470, 1660, 1750, 1830, 1890, 1910 et 1940. Étant donné notre approche immersive (et non des démonstrations ou des animations), nous avons besoin d’avoir des pièces d’époque meublées, reconstituées. Malheureusement, au Québec, il y en a peu et de moins en moins. Notre approche étant peu comprise, autant par les sites, que lorsque nous souhaitions recruter, nous avons pris une pause pour revenir avec une version 2.0 en 2022. Maintenant, nous n’avons plus de membres. Nous organisons des activités principalement sur site privé où nous invitons au besoin des gens. Nous utilisons aussi les médias sociaux pour faire de la diffusion à thème historique, dont des vidéos.»
«Pour ce qui est de mon parcours professionnel, je dirais que j’ai eu une carrière fantastique, ayant même des contrats hors Québec. Mais, un moment donné, il m’a fallu mettre tout cela comme un loisir, un à-côté. J’ai donc maintenant une “vraie job” stable, fini d’être à contrats!»
«Il faut savoir qu’au Québec, il y a très peu de sensibilité envers le patrimoine, encore moins envers le costume; je me suis donc tannée de toujours tenter d’expliquer ma démarche, de me vendre. Ici le costume est vu comme ludique, presque jamais comme un outil éducatif ou une réelle représentation culturelle. Ainsi, il est traité à la va-vite. C’est triste.»
Bientôt, tu auras cumulé 30 belles années d’expérience dans ton domaine. Félicitations! Ces spécialités t’ont entre autres donné l’opportunité privilégiée de présenter diverses conférences et formations un peu partout au Québec, notamment pour les Rendez-vous d’histoire de Québec, qui se dérouleront très prochainement, et au cours desquels tu offriras une conférence gratuite, «Le costume féminin au Bas-Canada, 1830-1850», le jeudi 10 août à 14 h 30 à l’auditorium Roland-Arpin du Musée de la civilisation. Parle-nous de ton enthousiasme à prendre part à cette 6e édition, qui se tiendra du 9 au 13 août!
«Je suis tellement contente! C’est un magnifique cadeau pour mon retour dans la région de Québec après plus de 20 ans à Montréal. De plus, je vais présenter une version toute revampée de cette conférence que je diffuse depuis 2004 (ainsi, si vous l’avez déjà vue, venez pareil!)»
«Elle avait été réalisée pour la Maison Nationale des Patriotes. À l’époque, je pense bien que j’étais la première à faire des recherches sur le costume des années 1830-1840 chez les habitantes et les femmes du commun. La fameuse silhouette que j’appelle “à la Krieghoff”, car il les a si bien représentées.»
«À ceux qui disent que ce sont des idéalisations stéréotypées, je leur réponds de venir à ma conférence: je vais justement en parler!»
Au cœur de cette conférence gratuite, tu proposeras une incursion dans «la garde-robe des femmes au temps des revendications des Patriotes et alors que Cornelius Krieghoff réalisait ses œuvres en parcourant la vallée du Saint-Laurent». Bien sûr, tu y parleras des vêtements du quotidien – ceux que portaient ces femmes travaillant sur une ferme ou bien ceux que d’autres revêtaient pour aller à la messe – et de ceux présents dans la garde-robe de la femme du notaire ou du riche marchand, en guise de comparatifs. Peux-tu donner plus de détails à nos lecteurs et lectrices afin de leur donner l’envie d’y assister?
«Premièrement on va avoir du plaisir! Oubliez le conférencier qui déclame son savoir. Avec moi, on va rire, et ça bouge même!»
«Il y a beaucoup de contenu, richement documenté, mais je rends le tout très “digeste” et amusant avec une présentation très visuelle. Malheureusement, au Québec, on néglige beaucoup notre histoire du costume, que ce soit dans les musées, films, sites historiques, costumiers, documentaires, publications et festivals. Rarement on voit des costumes ayant le niveau d’authenticité historique qui serait souhaitable. Je ne parle pas, ici, du public qui se costume, mais bien des institutions qui ont une certaine responsabilité de qualité de représentation.»
«La conférence est donc une belle occasion de s’ouvrir à ce patrimoine vestimentaire. Les années 1830-1850, c’est en plus une période au sein de laquelle on a vu notre identité nationale se peaufiner. Si j’avais à définir un costume traditionnel pour le Québec, il serait de cette époque!»
Le même jour, à l’auditorium Hydro-Québec du Musée de la civilisation dès 16 h, tu participeras, à titre de modèle aux côtés de ton collègue Jean Merrette de la Société d’histoire In Memoriam, à l’activité «À vos crayons: atelier de dessin d’après modèle vivant en habit d’époque (19e siècle)», proposée par Maxime Dubois alias Max’stache de Les Sketcheur∙e∙s de Québec. Par curiosité, est-ce que cet atelier est uniquement réservé aux dessinateurs∙trices en herbe, ou bien c’est ouvert à tous? Dis-nous en plus, car ça a l’air bien le fun comme activité!
«C’est ouvert à tous, même à ceux qui n’ont jamais dessiné pantoute!»
«On peut participer avec une approche très sérieuse et didactique, car le visuel à dessiner sera vraiment extra. Mais on peut aussi venir avec l’idée de griffonner sans prétention, pour le plaisir. En plus, les poses permettront de bien voir les costumes en mouvement.»
«On m’a aussi demandé de continuer à donner de l’information sur les tenues. Je pense que c’est un complément intéressant pour ceux et celles qui auront vu la conférence, en plus d’être une belle occasion pour les dessinateurs∙trices!»