«Le Métier d'aider» de Michel Dorais – Bible urbaine

LittératurePoésie et essais

«Le Métier d’aider» de Michel Dorais

«Le Métier d’aider» de Michel Dorais

L'art de ne pas nuire

Publié le 9 décembre 2015 par Marie-Hélène Proulx

Crédit photo : VLB Éditeur et Florence Cassisi

Entre les méfaits des agresseurs à contrôler et la protection des victimes qui ont déjà commencé à retourner leurs actes de désespoir contre elles-mêmes, les défis et les risques d'erreurs sont grands pour les travailleurs sociaux et autres intervenants voulant sincèrement contribuer à réduire la souffrance. Et rares sont, pour le moment, les pistes d'inspiration pratiques à ce sujet. Le livre Le Métier d'aider répond à ce besoin criant.

Après plusieurs années à travailler comme travailleurs social, principalement auprès des jeunes, des prostitués des deux sexes et des gais, puis comme professeur universitaire, et avoir rédigé plusieurs autres ouvrages sur les jeunes prostitués et autres marginaux, Dorais offre maintenant de vibrants témoignages illustrant les grands principes ayant guidé ses intuitions et sa vigilance durant sa carrière d’aidant.

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Le lecteur y découvre comment ce chercheur passionné a su mettre à profit sa soif de comprendre l’être humain dans ses actions de soutien concrètes. À mille lieues de toute forme d’ésotérisme ou de sensiblerie, et en évitant les pièges de l’autoglorification, sa dernière parution parvient à laisser le lecteur devant un message d’espoir, en racontant des situations où  l’attention bienveillante envers la personne derrière la souffrance a pu ouvrir des voies inattendues vers la résilience. Vingt-deux chapitres y présentent chacun un principe professionnel, allant de la simple règle d’essayer avant tout de ne pas nuire jusqu’aux meilleures façons de se mettre à l’écoute, de poser ses limites, de susciter des remises en question des pensées destructrices et de faire appel à ses propres connaissances afin d’aider efficacement.

Son approche, opposée à tout dogmatisme, rappelle à quel point aucune autorité institutionnelle, première impression ou approche théorique n’est digne d’une confiance absolue : l’intervenant ne parvient à participer à la transformation des autres qu’en se remettant en question lui-même. Dorais y passe d’ailleurs constamment de l’analyse critique des théories en sciences sociales à des études de cas, décrites avec une aisance et une sensibilité digne de ce vulgarisateur de renom. En ce sens, pour les personnes manifestant d’emblée une grande curiosité pour l’intervention sociale, cet ouvrage est un véritable délice.

Aura-t-il autant de succès lorsque viendra le moment d’inspirer les travailleurs de rue, intervenants en toxicomanie, infirmiers, éducateurs et autres aidants directs de ce monde à qui il s’adresse? Comme l’écrit l’auteur lui-même, les intervenants sociaux sont souvent frileux à aborder la théorie. Et ici, malgré l’écriture simple et directe de Dorais, la lecture de plusieurs de ses chapitres demande, beaucoup plus que ses ouvrages précédents, une prédisposition à le suivre dans ses élans théoriques et dans la découverte de quelques grands penseurs.

Mais il s’agit néanmoins d’un outil de haute qualité pour ceux qui ont choisi d’accompagner des clientèles dont la destinée ne peut pas toujours être définie à partir d’un recours aux normes établies. Et, en soi, cet essais proposant une démarche réflexive pour appuyer et inciter les aidants à rechercher des modes d’action hors de ses sentiers battus est déjà une petite révolution.

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