«Mater la meute - La militarisation de la gestion policière des manifestations» de Lesley J. Wood – Bible urbaine

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«Mater la meute – La militarisation de la gestion policière des manifestations» de Lesley J. Wood

«Mater la meute – La militarisation de la gestion policière des manifestations» de Lesley J. Wood

Un pétard mouillé

Publié le 7 février 2016 par Audrey Neveu

Crédit photo : Lux Éditeur

Mater la meute - La militarisation de la gestion policière des manifestations de Lesley J. Wood décortique la dynamique des corps policiers nord-américains et met en lumière la militarisation croissante de leurs techniques. Publié chez Lux Éditeur, ce livre devrait être un pavé dans la mare, mais il fait peu de vagues.

La militarisation des corps policiers est un enjeu important, qui a souvent été dénoncé ces dernières années, mais qui a été peu étudié avec rigueur comme Lesley J. Wood le fait. À cet égard, son essai comble ce besoin.

La professeure de l’Université York de Toronto affirme dès le départ sa position de militante habituée des manifestations altermondialistes. Une fois les cartes mises sur table, il est plus facile d’entreprendre la lecture sans se poser mille et une questions sur les intentions, cachées ou non, de l’auteure. Lesley J. Wood réussit remarquablement bien à ne pas prendre de position sans être soutenue par ses études. Cette franchise est tout à son honneur et passe bien, c’est pourquoi on comprend mal pourquoi l’ajout du Marché global de la violence par Mathieu Rigouste à la fin de Mater la meute est nécessaire, lui qui répète à plusieurs reprises l’objectivité dont fait preuve la professeure. Cette insistance finit par soulever un doute.

Mater la meute décrit comment les corps policiers sont des organisations ayant leur propre volonté, ce qui tranche avec le discours ambiant qui les décrit comme des marionnettes du pouvoir politique. Lesley J. Wood explique les techniques de gestion de manifestation, comme les armes sublétales ou l’encerclement, ainsi que le processus d’adoption d’armes ou de techniques controversées. L’exemple du Taser est le plus éloquent et instructif: la contestation populaire couplée au cautionnement d’experts du domaine de la sécurité renforce la conviction des organisations policières de faire le bon choix en adoptant cette arme controversée dans l’opinion publique.

L’auteure compare aussi les particularités de quatre des corps policiers les plus importants d’Amérique du Nord, soit Montréal, Toronto, Washington et New York. Cet exercice permet de réaliser à quel point ces organisations sont effectivement différentes et suivent leur propre trajectoire.

Le contenu de Mater la meute est en général solide, quoique miné par quelques erreurs factuelles, comme l’attribution de la gestion des manifestants à Victoriaville le 4 mai 2012 au Service de police de la Ville de Montréal plutôt qu’à la Sûreté du Québec comme c’était vraiment le cas.

Pétard mouillé

Le défaut majeur de ce livre est qu’il s’agit d’un sujet intrinsèquement explosif, enlevant, captivant, mais rien de cela ne transparaît dans l’écriture. Il traîne en longueur, le lecteur se perd dans les descriptions et n’accroche jamais. Certes, ce n’est pas un roman, mais les chercheurs d’une étude publiée sous forme de livre grand public ne veulent quand même pas que leurs lecteurs s’endorment en lisant leurs conclusions. On peine à avancer à travers la lecture, même avec bonne volonté.

Enfin, Le marché global de la violence de Mathieu Rigouste, placé en fin de manuscrit, est sensé apporter une perspective européenne, ou à tout le moins française, à l’étude de la militarisation de la gestion policière, mais celle-ci est trop brève pour frapper dans le mile. Dommage.

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