LittératureBandes dessinées et romans graphiques
Crédit photo : Pow Pow
D’emblée, il y a justement un petit quelque chose de voyeur et de pervers à suivre les parties de jambes en l’air de ce «couple» tout mignon qui se partage la majestueuse baraque hollandaise de leur ami Jérôme, absent pour voyage d’affaires. Mais, en même temps, qui peut en vouloir à ces deux «tourtereaux occasionnels» de vouloir passer du bon temps ensemble?
Placé au beau milieu de nulle part, comme suspendu dans l’espace-temps, ce couple de pianistes chevronnés partage néanmoins son temps libre entre le silence du vaste salon, les discussions aussi vides qu’un sac d’air, les parties de baises orales explicites et les obstinations sur des sujets aussi absurdes que la meilleure manière d’ouvrir une bouteille de vin sans tire-bouchon.
Toute cette histoire, à première vue vide de sens et d’intérêt, commence à se corser lorsque les deux protagonistes défendent leur honneur au piano avec «Scaramouche, suite pour deux pianos, Op. 165b, 2e mouvement», un morceau classique qui va leur donner l’envie de se préparer un repas de chef.
Mais qui dit tête à tête dit aussi discussion sérieuse, et c’est de manière assez maladroite que les deux personnages vont se mettre les pieds dans les plats en abordant le sujet des chums et des blondes, car, bien évidemment, le bon temps qu’ils sont en train de se payer a un prix et des conséquences, qu’ils le veuillent ou non.
C’est donc à travers des dialogues incisifs et une franche dose de bons vieux sacres québécois que Zviane place ses deux personnages au centre d’une problématique existentielle à laquelle ils ne semblent pouvoir échapper: l’adultère. Ce thème, mis en images par la bédéiste, revêt une seconde peau puisqu’ici le couple rend l’acte encore plus beau, plus vrai encore, tout en rendant le lecteur principal complice de leurs débats et, bien sûr, de leurs ébats.
Avec une multitude de dessins en noir et blanc fort bien exécutés, Les deuxièmes se savourent comme un court-métrage sur l’humain et l’amour, avec ses courts dialogues, ses moments de tendresse et ses disputes, avec des prises de vues en plongée sans dialogue qui prouvent que parfois le silence peut-être lourd de sens.
Comment cette belle histoire d’un amour consommé en privé et loin des regards va se terminer? Va savoir! Cours vite te procurer la nouvelle BD de Zviane, et profites-en donc pour acheter aussi «Glorieux printemps, tome 3» de Sophie Bédard, qui est de retour avec la suite des aventures d’Émilie, Antoine, Mathieu et Micheline.
«Les deuxièmes» de Zviane, Éditions Pow Pow, 128 pages, 2013, 22,95 $.
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de la rédaction