Littérature
Crédit photo : Alain Pilon - Illustration
Avec un panel de huit invités d’honneur, un somptueux gros plan sur le Mexique (il faut voir l’alléchante et gigantesque sélection au kiosque), 6 expositions à voir (dont celle de René Derouin et une autre d’Hélène Dorion), le Salon du livre de Montréal fait encore une fois montre qu’il se distingue très nettement des autres foires plus commerciales que l’on trouve au même endroit. Ces expositions sont déployées dans des espaces aérés qui contrastent agréablement avec la densité de la circulation dans les kiosques, un beau luxe que l’on peut s’offrir au détour d’une allée.
Véritable lieu d’échanges, les diverses tables rondes et conférences permettent aux visiteurs d’enrichir leur visite et surtout de faire des découvertes. Les médias québécois étant de moins en moins portés à accorder de l’espace à la littérature, les salons du livre deviennent les lieux par excellence où faire des découvertes et à plus forte raison celui de Montréal, de par son ampleur. Les éditeurs et auteurs se font également de plus en plus dynamiques et motivés et un certain abattement que l’on a pu sentir au début de la dernière décennie a presque complètement disparu. Les nouveaux éditeurs qui sont nés plus récemment y sont pour beaucoup dans ce vent de fraîcheur et ce retroussage de manches généralisé.
Quoique les moments les plus courus pour visiter le Salon du livre de Montréal soient typiquement le samedi en journée et le dimanche matin avant ou après le brunch, le samedi soir et le dimanche en fin d’après-midi et début de soirée sont des moments moins achalandés pour parcourir les étalages sans se presser. Disons-le, bouquiner dans la foule est rarement agréable. Le samedi, le salon est ouvert jusqu’à 21h et le dimanche jusqu’à 19h. Pour le visiteur qui ne recherche pas l’effervescence, ces moments sont remarquables de zénitude. Vous verrez alors les libraires, éditeurs et représentants se faire plus disponibles pour vous partager leurs coups de cœur. Ces acteurs discrets qui le jour doivent se transformer en cordons de foule, se libèrent le soir venu et peuvent se permettre de distiller leur passion aux visiteurs.
La programmation réserve certes les grands noms pour les périodes d’affluence du samedi après-midi et du dimanche en milieu de journée, mais il ne faut pas penser que les visiteurs du soir sont en reste. La programmation du salon reste riche et diversifiée du matin au soir. Par exemple, le samedi soir en début de soirée, une table ronde qui s’annonce fort intéressante sur les paradis fiscaux entre Alain Deneault, auteur de La médiocratie et d’Une escroquerie légalisée, et Éric St-Cyr d’À l’ombre du soleil. Presque au même moment, des auteurs de la maison Mémoire d’encrier parleront de leur parcours, et L’Instant même offriront une table ronde sur le cinéma québécois avec, entre autres, le fascinant Rafaël Ouellet. Un peu plus tard en soirée samedi, nous aurons droit à un match d’improvisation avec une belle brochette d’acteurs, en l’honneur de Robert Gravel et au même moment, une rencontre créative sur le genre difficile qu’est la nouvelle, avec les excellentes Marie-Hélène Poitras et Annie-Claude Thériault.
Pour les visiteurs du dimanche, la programmation des tables rondes s’arrête à 16h, mais le salon, lui, est ouvert jusqu’à 19h. Les activités proposées sont particulièrement intéressantes. Si nous avions en vous en proposer cinq, nous commencerions par l’Écriture de soi, à midi, et qui porte sur l’autofiction. Le panel en est particulièrement alléchant, avec Gabriel Anctil, Douglas Kennedy et Maxime-Olivier Moutier. À midi et demi, Gilles Archambault s’entretient avec Catherine Mavrikakis, l’une de nos voix littéraires féminines les plus fortes actuellement et à midi c’est avec la poétesse Carole David qu’il s’entretiendra, une autre de nos grandes dames des lettres.
À 14h, les fans de bandes dessinées pourront aller entendre Guy Delisle, Jean-Paul Eid et Jacques Goldstyn ou bien aller voir Larry Tremblay, Serge Lamothe et Samuel Archibald trianguler sur le thème de l’adaptation scénique du roman. En toute fin d’après-midi, on retrouve Mavrikakis dans l’un des Triangles amoureux proposés tout au long du salon et qui s’attablera avec Alice Michaud-Lapointe et Catherine de Léan. Pour ceux qui ne parviennent pas à se remettre de l’élection de Trump, les éditions du Septentrion présentent un panel d’experts qui nous offrira des pistes de compréhension à 16h15, avec Frédérik Gagnon, Élisabeth Valet et Ginette Chenard.
Ces quelques propositions montrent à quel point le Salon du livre de Montréal fait le pari, réussi, de la diversité, de l’intertextualité et de la pluridisciplinarité, amenant le livre dans tous ses champs d’action et démontrant sa pertinence et sa raison d’être malgré les mutations que lui impose le développement de l’univers 2.0 et des médias sociaux.