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Crédit photo : Festival international de films Fantasia
Présenté au Festival international de films Fantasia, le long métrage de Moselle capture un point de vue unique d’une sous-culture inexplorée en se concentrant sur un groupe de jeunes filles exaltées de skateboard dans l’état de New York. Nous suivons de très près notre protagoniste principal habitant à Long Island, Camille (Rachelle Vinberg), une jeune fille introvertie de dix-huit ans, qui aspire à une vie bien loin des habitudes conservatrices de sa mère. Pendant ses temps libres, Camille admire les skateuses de Manhattan à distance, suivant leur progression via leur page Instagram, avant de partir pour rejoindre le groupe.
Pour toutes ses nouvelles amies, le skateboard, c’est la vie, mais ça fait aussi partie d’un hédonisme plus large auquel ces dernières présentent à Camille. Elle fume du weed pour la première fois, participe à des partys un peu wild, apprend même à utiliser un tampon pour la première fois de sa vie. Camille est intégrée dans une nouvelle famille d’accueil, plongée dans ce nouveau monde à des kilomètres de la pression de son domicile familial.
Malgré cette nouvelle liberté, elle se rend vite compte que les codes de l’amitié sont plus compliqués qu’elle ne pouvait l’espérer puisque les garçons et les jalousies s’infiltrent dans la dynamique du groupe, notamment avec un jeune homme interprété par Jaden Smith.
La réalisatrice a cette capacité de capturer ces petits aperçus de la beauté de tous les jours. Par exemple, les magnifiques éclats de soleil qui brillent sur les rails d’un train, la lueur d’un sourire amical, ou la roue pivotante d’un skateboard. Les jambes et les chevilles passent devant la caméra qui peine à suivre ces corps en mouvement. L’été dans la ville est saisi à l’heure dorée, ou dans le doux crépuscule de la soirée, pendant que les personnages passent les heures à rouler dans les recoins de la ville qui ne dort jamais.
Ce sentiment corporel est maintenu essentiellement à travers les corps qui transpirent et volent dans les airs. Avec les nouvelles personnes que Camille côtoie, cette dernière apprend rapidement toutes les nouvelles façons dont les autres interagissent avec leur propre corps. D’ailleurs, Skate Kitchen est introduit avec une blessure choquante à cause d’un accident de skateboard, une scène qui est abordée avec subtilité, mais dont la brutalité du moment persiste. Par la même occasion, le film nous adapte immédiatement au corps de Camille pour démontrer à quel point elle est prête à faire n’importe quoi pour la passion de la planche.
Skate Kitchen tourne autour, et tire son nom, d’un véritable clan de filles de planches à roulettes, avec un following de plus de 60 000 abonnés sur Instagram. La véracité de la distribution est ce qui rend le long métrage si indéniablement spécial et authentique. Leur proximité les uns aux autres, la franchise dans leurs conversations en ce qui concerne les garçons, la menstruation et les vagins permettent d’éviter les discordes d’un dialogue préfabriqué. Mais même dans une version narrative du monde de ces filles, leur honnêteté et leur confiance les unes envers les autres sont puissantes et réjouissantes à regarder. C’est également une célébration d’un groupe vraiment diversifié, avec des femmes de couleur placées en avant-plan, et leur talent en pleine exposition.
L’attrait d’une telle communauté est évident et le film le souligne d’ailleurs avec une touche gracieuse. Skate Kitchen est une œuvre engageante, profondément connectée à un groupe intrigant, avec une ligature qui se traduit à merveille à l’écran. Leur humour, leur camaraderie et leur soutien mutuel ne font aucun doute sans oublier leur esprit vif, tellement cool, qui nous récompense en tant que spectateur.
«Skate Kitchen» de Crystal Moselle sera à l’affiche au Québec dès le 24 août 2018.
«Skate Kitchen» de Crystal Moselle en photos
Par Festival international de films Fantasia
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de la rédaction