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Crédit photo : Gracieuseté Festival international de films Fantasia
«In a Valley of Violence» de Ti West (États-Unis, 104 minutes)
Quelque part au sud des États-Unis (ou dans le trou du cul du monde, si vous préférez votre géographie avec moins de décorum), un cavalier nommé Paul (Ethan Hawke) erre en compagnie d’Abbie, une mignonne petite chienne collie. Bien vite, le duo rencontre l’un des personnages aux trognes patibulaires peuplant le paysage d’In a Valley of Violence, à savoir un prêtre alcoolo qui rappellera à tous que l’ouest n’est pas un terrain de jeu pour enfants de chœur!
Un bref affrontement s’ensuit, puis nous mettons cap vers la ville paumée de Denton et ses habitants dégénérés, musique musclée signée Jeff Grace et digne des meilleurs westerns spaghetti à l’appui, assortie à un générique d’ouverture qui saura faire agrandir les pupilles aux adorateurs de films riches en poussière et hémoglobine. Bang, on ne pourrait espérer une mise en situation plus prometteuse!
De toute évidence, Ti West connaît ses classiques et leur rend hommage de belle façon, lui qui nous avait jusque-là habitués à un autre genre cinématographique tout aussi brutal que le western: l’horreur. Changement de bottines pour le réalisateur, qui trop content d’avoir l’occasion de mettre en scène une fusillade occupant la totalité du dernier tiers du film, en oublie d’ajouter un peu de chair autour de l’os.
À la fois délicieusement inventive et restreinte dans ses ambitions, la proposition de Ti West se divise en deux segments distincts, que l’on pourrait aisément intituler comme suit: 1-En route vers le Mexique avec ma chienne, puis 2-Z’allez me le payer, bande de cons. Lire entre les lignes qu’il s’agit ici d’un récit de vengeance simple comme bonjour. Ça fait la job, comme on dit, et il ne faudrait tout de même pas être saisi de surprise si In a Valley of Violence obtenait rapidement un statut de film culte, lui qui se veut un pendant aux récents efforts de Quentin Tarantino.
Dans le premier chapitre, votre coeur de brute fondra devant les beaux yeux marron d’Abbie, représentant canidé doué pour la caméra et n’étant pas sans rappeler Uggie, le formidable Jack Russell tenant en partie la vedette de l’acclamé The Artist (2011). «She bites» répond Paul lorsqu’on lui demande quels tours connaît sa compagne. Elle en connaît bien d’autres, pour sûr, et ajoute une dose de légèreté plus que bienvenue au récit. De loin le personnage le plus attachant, sans rien enlever aux autres!
Après un acte de violence purement gratuite motivant Paul à dépoussiérer une fois de plus son revolver, la suite des évènements prend une tournure plus directe et austère, ne comprenant pratiquement aucune surprise, hormis peut-être un duel entre Paul et le marshal du bled (John Travolta), face-à-face à l’issue excessivement jubilatoire.
De là peut-être cette impression que le film de Ti West avait le potentiel d’atteindre des sommets, alors qu’il se contente le plus souvent de pointer en leur direction. Mais ne gâchons pas notre plaisir pour autant! À vous tous, amateurs de westerns, In a Valley of Violence vaut le coup d’œil, parole de balafré!
«As the Gods Will» de Takashi Miike (Japon, 117 minutes)
L’étudiant Shun Takahata (Sôta Fukushi), adolescent typique, vit un spleen puissance 1000. Ses pensées prennent la même couleur que les murs gris des buildings l’entourant et s’il n’avait qu’un souhait à faire exaucer, ce serait que sa vie cesse d’être aussi ennuyante qu’il le prétend. Sa plainte trouve oreille, là-haut, par une entité que l’on devine être un dieu.
Et c’est là, en pleine classe avec ses camarades pendant la leçon, que la tête de son professeur se voit pulvériser par un objet/totem/machin arrivé du ciel tel un météore. Dès lors, Daruma (le projectile en question) s’anime et enclenche un jeu mortel. Quiconque sera pris à bouger sous son regard rendra l’âme en explosant du crâne. Un temps limite est alloué, minutes précieuses que la classe devra utiliser afin d’appuyer sur un bouton placé à l’endos de Daruma. Plus facile à dire qu’à faire!
Les épreuves s’enchaîneront, toujours avec ce savant cocktail de WTF typique de la culture nippone. On ne sait pas toujours si on doit en rire ou être terrifié, alors que le film nage entre deux eaux, alternant situations «japoniaiseuses» et mises à mort brutales. Difficile de prendre au sérieux la menace d’un ennemi ressemblant à un distributeur de bonbons Pez, aussi meurtrier soit-il!
On peut remettre en question l’idée même d’avoir voulu adapter le manga Kamisama no lu Toori en long-métrage live action, alors qu’un anime aurait mieux rendu justice au matériel source. Il faut aussi dire que les images de synthèse laissent quelque peu à désirer, surtout en ce qui concerne le chat géant Manekineko, problème qui n’existerait pas sous forme de dessin animé.
Certaines décisions artistiques produisent un joli effet, comme l’utilisation de billes rouges en tant qu’ersatz de sang, un peu comme l’avait fait Alejandro Jodorowsky dans El Topo, utilisant des colombes au lieu des habituelles giclées rouges. Miike prend visiblement son pied, bien qu’on ne puisse dire qu’il s’agit d’une œuvre qui figurera dans les canons du réalisateur, bien au contraire! La violence est tamisée, le message laisse à désirer et tout le reste frôle souvent la débilité pure et simple.
Battle Royale a fait mieux, Saw et The Hunger Games également. Trois franchises connues démontrant que le sous-genre des death games est bien représenté, même dans la culture populaire. As the Gods Will, voulant sans doute parodier ce courant, finit par lasser plutôt que divertir. Des films comme celui-là, le pays du soleil levant en régurgite des tonnes et des meilleurs.
Un film parfait en présentation lors d’un festival, donc, mais plutôt rébarbatif dans l’ensemble. Pour les fans de Miike, sinon à voir en groupe!
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Par Gracieuseté Festival international de films Fantasia