SortiesCirque
Crédit photo : Mathieu Pothier
L’ouverture fut pourtant puissante. Une scène noire, traversée par les vagues sonores d’une harpe. Au centre, un tissu pâle interceptant la lumière blanche des projecteurs. Dans le tissu – the womb –, le fœtus qui grossit se déploie, jusqu’à la naissance. And we think: «This is it. This is death». Une voix off en anglais. Pourquoi en anglais?
En mouvement, entre harmonie et dysharmonie, deux sœurs grandissent, s’unissent et s’opposent. En haut d’une chaise haute comme un trône, un homme. Descendu sur la scène, il tend à l’une des femmes une couronne, à l’autre une branche d’arbre. C’est la séparation. La division. La compétition.
Selon le synopsis en ligne sur le site web de Montréal Complètement Cirque, cet homme est un prince. Le résumé sur le site des 7 doigts est certainement plus proche de l’intention, quoique décousu et vague. Mais si l’on doit rechercher le sens de la pièce à travers son synopsis, c’est simplement que la mise en scène a échoué à le transmettre.
Il valait donc mieux ne rien lire avant le spectacle et plonger plutôt dans le délire de sa propre interprétation – ce que j’ai eu le bonheur de faire. Pour moi, l’homme n’était aucunement un prince, mais bien le père qui, par un amour injuste et conditionnel, sème une compétition malsaine entre ses filles, les menant à une course folle pour l’attention et la reconnaissance.
La transmission a échoué à plusieurs niveaux. Des costumes trop larges qui cachent le corps et le mouvement. Une trame sonore qui disperse la tension au lieu de l’accentuer. Trop de mouvements dénués de sens. Un manque de préparation physique pour les acrobaties qui, tremblantes et imprécises, n’ont pas été compensées par l’interprétation. Surtout, un manque d’émotion au niveau du visage, de projection au niveau du plexus.
La pièce n’était pas mûre. Pourtant, il y avait des thèmes et des symboles puissants à exploiter. Les scènes d’ouverture et de fermeture formaient une superbe proposition visuelle et spirituelle sur la naissance et la mort, qui pourrait donner naissance à une œuvre distincte de SisterS.
We learn to use our senses to touch the contours of this world… Sometimes we hear and feel sounds from another world that we forgot for a long time.
We think now for sure it’s death.
Je ne sais pas si SisterS trouvera sa forme définitive, mais j’adorerais voir un jour deux nouvelles œuvres tirées de celle-ci: l’une sur le thème de l’immortalité de l’âme et l’autre sur la compétition féminine dans une société patriarcale. J’aimerais également revoir l’interprète masculin, William Underwood, dont la force et l’agilité sont surprenantes.
You don’t have to believe in. Just wait and see.
L'avis
de la rédaction