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Trois ans après l’album Ignore The Ignorant, un changement de cap vers un son plus pop et sophistiqué, les frères Jarman reviennent au format power trio et se tournent vers le rock grungy des années 1990 avec l’aide des producteurs vedettes Steve Albini (Nirvana) et Dave Fridmann (Flaming Lips).
Vous vous souvenez de la chanson dans la campagne publicitaire de TELUS en 2006? Celle avec la guitare typiquement british et un ver d’oreille impossible à oublier: «Someone’s got their eye on you now, don’t you know, woah-oh-oh!» Les Cribs ont fait un sacré bout de chemin depuis «Martell» et la vague post-Libertines de groupes britrock qui les a transportés jusqu’en Amérique. En 2009, les rockeurs de Wakefield en ont surpris plus d’un en recrutant le légendaire guitariste Johnny Marr (ex-Smiths, Modest Mouse, The Healers) pour l’enregistrement de Ignore The Ignorant, un important virage mélodique pour le groupe. In The Belly Of The Brazen Bull, leur cinquième album en carrière, se veut un retour à une approche plus brute et DIY.
Les Cribs donnent le ton avec l’introduction de «Glitters Like Gold», alors que l’auditeur se fait carrément varloper par une explosion de feedback et de fuzz. La première partie de l’album est d’une efficacité redoutable et met en lumière l’aisance qu’ont les Cribs à combiner mélodies accrocheuses et riffs ravageurs. Plusieurs chansons sentent le trip musical à plein nez, et les Jarman ne tentent aucunement de dissimuler leurs influences. Le punk-rock slacker de «Chi-Town» est un hommage extrêmement bien réussi au groupe culte The Replacements et la formule loud-quiet-loud de «Come On, Be A No-One» rappelle immédiatement les Pixies et Nirvana. À la batterie, Ross Jarman semble avoir pris du poil de la bête et vient ponctuer les refrains de «Anna» et «Pure-O» de descentes juste assez destructrices. Le complexe d’infériorité des Cribs est à l’honneur dans les textes et est illustré parfaitement dans l’excellent b-side «You’re Better Than Me», qui n’apparaît malheureusement pas sur Brazen Bull.
Pour terminer l’album, le groupe s’est payé la traite en enregistrant une suite de quatre chansons au studio Abbey Road. Les morceaux s’enchaînent comme sur un certain album des Beatles pour former une mégachanson récapitulative de la carrière du trio. Les fans invétérés du groupe vont en baver. Cette fascinante finale vient conclure un des très bons disques de rock de 2012. Toujours en marge du paysage indie britannique, les Cribs confirment encore une fois leur pertinence avec une collection béton de chansons qui prouvent qu’on peut faire beaucoup de chemin avec une guitare électrique et un bon refrain.
Appréciation: ***½
Crédit photo: www.thecribs.com
Écrit par: Louis-Jean Trudeau