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Crédit photo : Rémi Thériault
Prévu à la base comme une genre de «suite spirituelle» à NINEEIGHT (2014), projet explorant le rôle des comédies absurdes du Hong Kong des années 1990 dans un climat politique incertain, Room 2048 a fini par prendre un virage légèrement différent.
«J’étais en studio avec notre dramaturge, et on parlait de NINEEIGHT lorsqu’elle m’a posé une question très importante: de quel droit est-ce que je peux m’approprier l’histoire des Hongkongais aux prises avec le “Hong Kong Handover” dans mon travail?, raconte Natalie. (NDLR: la rétrocession de la ville de Hong Kong à la Chine par le gouvernement britannique).
C’est là que j’ai réalisé que, même si c’est facile pour moi d’être remuée par les répercussions de ces événements qui se sont déroulés dans la dernière décennie, il y a des gens qui vivent tous les jours avec les impacts directs de ces décisions.» De là, Natalie a commencé à se questionner sur la réalité de la diaspora cantonaise, qui, comme elle, a été touchée par ces évènements, mais sans nécessairement les vivres de l’intérieur.
«J’ai réalisé que ça avait beaucoup plus de sens de partir de mon histoire à moi que d’essayer de m’approprier celle des autres, explique-t-elle. C’est devenu quelque chose de politique. Je voulais partir de moi et regarder vers l’autre, vers les Cantonais de deuxième ou troisième génération pour en apprendre plus sur nos histoires, nos points de vue, notre culture hybride.» Les bases fondamentales de ce qui allait devenir Room 2048 étaient donc installées.
En cinémascope
En tant que chorégraphe, Natalie a été fortement inspirée par le cinéma burlesque et absurde des années 1990, dans le style Mo Lei Tau, ainsi que par les souvenirs d’enfance qu’elle rattache à ces films. «Je discutais avec quelqu’un d’un film en particulier de cette époque et j’étais fascinée de voir que l’on partageait un souvenir commun, sans jamais avoir eu à être ensemble à un certain endroit, à un certain moment», se souvient la chorégraphe. «J’avais vraiment envie de déconstruire ce que ça voulait dire pour moi de regarder ces films qui datent d’une époque trouble, en tant qu’occidentale et en tant qu’anglophone.» C’est cette énergie, ces réflexions et ces influences cinématographiques qui ont suivi Natalie au studio avec sa compagnie.
Ce qui est particulier avec la façon de faire de Hong Kong Exile, c’est qu’ils travaillent à la base à partir d’une contrainte; dans ce cas-ci, le style cinématographique du Mo Lei Tau. «Nous avons regardé le style et les techniques qu’utilisaient les cinéastes de cette époque comme point de départ pour notre travail et, ensuite, nous nous sommes demandé comment transposer ces histoires de désir et de nostalgie dans une performance live.»
Les différents artistes impliqués dans le projet, danseurs, chorégraphes, dramaturge, éclairagiste, ont ensuite travaillé ensemble pour arriver à ce résultat. «On oublie un peu qui appartient à quelle discipline ou à quel genre, et on travaille de concert vers un but commun, explique Natalie. Ça demande beaucoup de retenue et d’humilité, mais c’est important pour nous de toujours mettre le projet de l’avant.»
Le résultat? Une performance de danse multidisciplinaire qui implique des projections, des effets sonores pop, de la fumée et une immersion totale dans ce monde singulier créé par Hong Kong Exile.