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Crédit photo : Mathieu Pothier
Arrivé déjà gonflé à bloc, sur scène, en sautant et en s’époumonant avec un «BONSOIR ASTRAL!», Émile Bilodeau n’a pas tardé avant d’entamer «Tu me dirais-tu», déclenchant déjà des cris de ravissement dans le public, qui ne se fit pas prier pour chanter tant les doux chœurs que les couplets en entier. Dès la première pièce, c’était déjà parti: la foule se faisait déjà entendre, et ça ne pouvait faire autrement que de donner de l’énergie au jeune chanteur.
Très théâtral et joueur, l’artiste interrompt souvent son jeu de guitare pour mimer certaines de ses paroles ou pour en ajouter à l’adresse du public. Son aisance sur la scène est manifeste, et si on ne considère pas son physique révélateur, on a peine à croire son jeune âge et son curriculum avec encore tant d’espace à combler. Ne manquant pas non plus d’y aller de certains commentaires éditoriaux concernant la politique («Mon nom c’est Émile Bilodeau, pis j’espère qu’un jour quand je voyagerai en Allemagne ou en Afrique, on m’appellera Québécois»), par exemple, le jeune musicien affiche déjà clairement ses couleurs et se porte fièrement à la défense de notre langue et de notre culture, et on ne peut que l’en féliciter.
Si ses nouvelles chansons sont tantôt plus posées («J’ai vu la France»), tantôt au contraire dans un style rock plus pesant («Socrate c’est Platon», «Moona»), on ne perd toutefois rien de la candeur de sa jeunesse et de ses interprétations bien senties et théâtrales. C’est indéniablement ce qui nous attire, car autrement, ses nombreuses références à l’école, à ses professeurs et à ses cours pourraient donner un sentiment de juvénilité. «Quand les nuages seront partis» a été composée pendant qu’il allait à l’école, tandis que «Les poètes maudits» a été écrite pendant un cours, de son propre aveu presque en hommage à son épreuve uniforme de français… Il a vingt ans seulement, et ça se sent, mais c’est aussi absolument charmant et rafraîchissant.
«Je souhaite honnêtement à tout le monde ici ce soir de ressentir le bonheur que j’ai en ce moment!», lancera-t-il à mi-chemin entre «Rosie» et l’essoufflante «Hockey» au débit rapide et presque parlée. S’installant ensuite au clavier pour livrer une nouvelle pièce intitulée «Syndrome», il a prouvé qu’en plus d’être très habile à la guitare, il pouvait épater la galerie dans un registre plus solennel. Même dans cette portion où il était seul en scène avec ses instruments – guitare, harmonica et clavier –, son aplomb n’a pas décliné, ni non plus l’intérêt du public, qui chantait encore profusément durant «Dehors», qui a nécessité le retour du bassiste.
Et alors qu’on croyait que c’était impossible que la foule chante davantage et plus fort, l’amorce de «J’en ai plein mon cass» a vu le public s’enflammer et sautiller sur place en chantant. Finissant le spectacle une serviette autour du cou et suant abondamment, on ne peut pas dire qu’Émile Bilodeau n’est pas un artiste qui se donne en concert. En terminant en rappel en faisant chanter la foule en chœur, micro à la main et sautant sur place devant les spectateurs qui l’imitèrent rapidement, on aurait même presque dit que le jeune artiste était en symbiose avec son public.
Il ne fait aucun doute que le jeune auteur-compositeur-interprète a déjà un bassin de fans très solide. Et quand on est devant un tel amour inconditionnel de part et d’autre, on ne peut avoir aucune crainte pour la suite de sa carrière.
Jérôme St-Kant
On comprend le jumelage de Jérôme St-Kant avec Émile Bilodeau, car la parenté est évidente entre leurs textes qui parlent de vraies choses de la vie, de la banalité du quotidien, et même avec un certain humour. Toutefois, les reprises de chansons pour enfants («Si tu aimes le soleil», notamment) avec lesquelles l’artiste (accompagné de Simon Kearney) a débuté son spectacle ont rapidement laissé perplexe, bien qu’il y apporte ses propres couleurs. Son humour un peu forcé, un peu pince-sans-rire, rate souvent sa cible, et le vocabulaire de ses chansons, comprenant «swag», «chill», «mush et autres drogues», «câlibine» et «porcogne» nous a semblé plutôt juvénile et impertinent. L’utilisation du refrain de «P.I.M.P.» de 50 Cents dans un simili-rap à propos de comment il règne en maître dans la ville de Québec a été appréciée par la foule, mais d’autres paroles comme «Je t’aime tellement que je vomirais mon cœur dans ta face» ont plutôt refroidi. Non, ça ne nous charme pas, cela dit, il a sans contredit une belle aisance sur scène. Son seul bon coup? Sa reprise du classique «Bang Bang».
L'avis
de la rédaction
Grille des chansons
1. Tu me dirais-tu
2. Passer à TV
3. Crise existentielle
4. J'ai vu la France
5. Je suis un fou
6. Quand les nuages seront partis
7. Rosie
8. Hockey
9. Syndrome
10. Les poètes maudits
11. Dehors
12. J'en ai plein mon cass
13. Socrate c'est Platon
14. Moona
15. Amour de félin
16. América
Rappel
17. Ça va
18. Bière