ThéâtreCritiques de théâtre
Crédit photo : Francis Sercia
Dans un contexte où les références culturelles au Printemps érable sont devenues monnaie courante – on le verra dans Tenir parole, un roman de Clément Courteau et Louis-Thomas Leguerrier qui sort cette semaine chez Annika Parance, et on l’a récemment vu au cinéma dans Ceux qui font les révolutions à moitié n’ont fait que se creuser un tombeau – et même un peu tendance, avec cinq ans de recul, on a ici droit à une version théâtrale qui ne se réclame pas directement de ces évènements, mais qui en semble fortement inspirée.
On fait d’abord connaissance avec cette famille dysfonctionnelle qui a, de prime abord, tout pour être heureuse, mais qu’un secret immonde vient ébranler. Le noyau éclate, les parents sombrent. Les enfants, laissés à eux-mêmes, ont une colère et une incompréhension à exorciser. C’est là que leur vie prend une direction funeste…
Les personnages se révoltent et se joignent au soulèvement, mais n’approfondissent pas vraiment les motivations du mouvement. Ils se contentent de suivre la vague – on se retrouve donc devant une justification narrative aux idéaux imprécis, avec des rebelles dont la cause n’est pas clairement définie. Ça n’est certes pas un défaut impardonnable, mais ça fait en sorte qu’on se pose longtemps la question, en tant que spectateur, espérant en vain une réponse.
C’est une première pièce pleine de promesses pour l’avenir de cette troupe émergente, Le Dôme, formée de Nathalie Boisvert et du metteur en scène Frédéric Sasseville-Painchaud, ainsi qu’Olivier Sylvestre. L’écriture de Boisvert est particulièrement vivante, faisant s’enflammer les discours d’Antigone, faisant de ses mots un combustible qui alimente le brasier contestataire. Étéocle aspire cependant à autre chose, et sa décision de joindre les rangs des brigades antiémeutes est incomprise de ses pairs, et mènera à une irrémédiable tragédie.
Les ambiances de manifestations, encadrés d’une impeccable conception sonore et d’éclairages qui vont droit au but, sont fort réussies, et nous projettent efficacement sur les lieux, avec les personnages, malgré de nombreuses instances où les acteurs s’enfargent dans leur texte.
L’esthétisme est là, la passion y est aussi, et la finale a au moins le mérite de voir les personnages aller au bout de leurs idéaux. Emportés par le courant, dans l’air glacial de la nuit, devenus des symboles et des martyrs – tout cela n’était pas vain.
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Par Francis Sercia
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