Entrevue avec Ilam qui nous présente «Hope» au Club Soda le 16 novembre 2016

Issu d’une famille qui ne voyait pas la musique d’un bon œil, Ilam a poursuivi dans cette voie malgré le désaccord de celle-ci. Lors d’un bref entretien, il nous raconte: «Au final, ils ont accepté que je fasse de la musique, mais au début ce n’était pas facile. Ils auraient préféré que j’aie un bon travail, dans un bureau… Il y a des gens pour qui c’est ça, le vrai travail. Porter une cravate, aller au bureau.» Défier sa famille n’est pas la seule chose à lui demander du courage, choisir de gagner sa vie par la musique lui demande également beaucoup de motivation. «Il faut du courage aussi pour continuer et être un artiste à temps plein. Ce n’est pas facile de vivre de son art. C’est ce que je suis en train de faire. Je n’ai pas d’autre travail. Je fais de la musique, c’est ça qui me nourrit.»

Interrogé sur le prix de la Révélation Radio-Canada, musique du monde, il admet sa surprise et surtout l’élan que cette récompense lui a donné. «J’étais surpris vraiment. Pour un artiste qui vient d’arriver, c’est une surprise. Cela dit je l’ai reçu avec beaucoup de joie. Je suis vraiment content. Mais ça me montre aussi qu’il y a beaucoup de travail à faire. C’est juste un signe pour me dire que le talent est là, mais qu’il faut persévérer, travailler dur. C’est une belle occasion de visibilité pour moi et ma musique, au Québec. C’est un bel honneur, car il y a beaucoup de bons artistes dans la musique québécoise qui m’inspirent beaucoup.»

Lors d’une question portant sur le milieu de la musique, il nous explique sa vision de son art et du monde des musiciens. «La musique, c’est un univers ou tous les gens se comprennent; ça connecte tout le monde. Quand je suis venu et que j’ai eu à faire ma place et que j’ai eu à côtoyer des artistes que j’aime beaucoup et à partager avec eux la scène musicale, j’ai vu que j’ai été bien reçu, comme un des leurs.»

Sur la question du sentiment d’appartenance, nous lui avons demandé comment il percevait les étiquettes musicales ainsi que l’expression «Musique du monde», qui est de plus en plus difficile à cerner et à justifier dans un univers musical où les frontières s’effacent. Sa réponse, très nuancée, nous a amené sur le sujet de l’essence même de la musique: «Je me souviens, quand j’étais jeune, j’écoutais de la musique américaine, c’était en anglais, je ne comprenais rien, mais ça arrivait à me chercher. La musique c’est un message qui passe par les émotions. On vit sur la même planète que la musique n’a pas de couleur, pas de langue. Si les gens le prennent comme musique du monde, je dis o.k., si les gens le prennent comme du blues je dis o.k.»

Le prix qu’il vient de recevoir l’a amené à se questionner: «Je suis très heureux de mon prix et je ne conteste pas qu’on m’ait donné la catégorie musique du monde, mais je dois dire que personnellement, je ne suis pas sûr de bien comprendre ce que c’est la musique du monde. Comme c’est souvent accolé à la musique africaine, veut-on dire musique du tiers-monde? Il y a beaucoup d’étiquettes en musique, il y a du pop, du rock, du blues, mais tout ça, c’est de la musique. Une étiquette c’est comme mettre la musique dans un ghetto.»

Sur la musique africaine plus spécifique, Ilam explique qu’elle se transforme et s’actualise: «En ce moment, la musique africaine fait sa place partout dans le monde. L’Afrique, c’est pas juste les masques et les tams-tams. L’Afrique c’est contemporain, c’est urbain, il y a beaucoup de richesse en Afrique et nous, on est dans la nouvelle génération, on parle un autre langage. La musique c’est une fusion, ce sont des mélanges qui font toute la richesse de la musique.»

Il est vrai qu’avec Ilam s’incarne résolument le non-sens du terme «musique du monde». Qui plus est si on l’intègre à la riche production musicale pluriculturelle québécoise qui est de plus en plus métissée. On se prend alors à souhaiter que l’expression «musique métissée» remplace tranquillement son ancêtre, le bon vieux «World» qui nous rappelle la collection Putumayo et les enregistrements d’Alan Lomax.

Mais nonobstant cette question sémantique, il demeure qu’Ilam est un artiste à découvrir et que son spectacle de demain en est l’occasion idéale.

En spectacle au Club Soda de Montréal demain soir à 20h.