SortiesDanse
Crédit photo : Simon Lenoires et Félix Hallé
La soirée du 13 août ne faisait pas exception à la règle. Oscillant entre danse, théâtre et performance, deux courtes pièces presque aux antipodes l’une de l’autre, mais sensibles chacune à leur manière, ont su capter l’attention de la salle.
Nuées de moustiques et chignons asiatiques
Camping bugs, des chorégraphes-interprètes Hélène Messier, Clarisse Delatour et Manuel Shink, met en scène trois amis partis en vadrouille le temps d’une nuit de camping. Dans une ambiance tamisée et intime, le trio évolue, tantôt dans une quête de spiritualité, tantôt dans des échanges individuels, tantôt soumis à un environnement qui leur est parfois hostile.
Le duvet de campeur, molletonné, aux couleurs criardes et aux volumes généreux devient pour le trio un protagoniste à part entière et un accessoire ludique qui les transforme. Car la soirée de camping devient dès le début le prétexte d’une quête spirituelle qui, si elle ne se prend pas au sérieux, assume ses références mystiques. Le duvet revêt ainsi des allures de chrysalide dans une scène d’ouverture bercée de chants de gorge, où la danseuse agenouillée dans son cocon de plumes effectue une sorte de rite chamanique, bercée par des mouvements d’avant-bras fluides.
Ses deux acolytes coiffés de chignons, dont seuls les bustes émergent de leurs duvets, marchent et errent sur la scène à petits pas de geishas. Là aussi, la contrainte du costume qui emprisonne le bas de leur corps est utilisée pour créer des séquences de bras et de mains, et des mouvements de bustes.
La nuit passe vite et les propositions chorégraphiques abondent. Les trois créateurs ont creusé leur thème et les idées foisonnent: une danse de moustiques où tout le monde finit par se donner des claques, les jeux «d’infirmité» pouvant être créés autour de la contrainte de se mouvoir engoncé dans un duvet, des jambes enfin libérées qui se promènent contre la voûte céleste… La nuit est visiblement agitée mais reste dans une ambiance feutrée, rythmée par les chants d’insectes nocturnes.
Peut-être était-ce trop de choses à dire en un temps trop court, car on reste une peu sur sa faim avec l’impression que chacune des propositions mériterait d’être poussée plus loin, et passe trop vite. Mais la fraîcheur de cette pièce sensible qui «ne dénonce rien mais autorise à tout» capte l’attention du début à la fin, et on en sort le cœur léger.
Bières et bikinis
Changement d’atmosphère lorsque La Banda (La gang) de Chloé Ouellet-Payeur débarque dans la salle. Il fait chaud, on monte le volume, on se dévêtit, c’est l’heure du carnaval pour cette bande de lurons joyeux et névrosés.
Les quatre protagonistes évoluant dans un univers inspiré des Club Med rivalisent d’artifices et d’exubérance pour nous séduire. C’est à qui poussera le plus loin son personnage clownesque et ira le plus se mouiller. Au son d’un beat de reggaeton, la petite troupe se lance dans une parodie de québécois dans le sud, s’essayant à parler espagnol sans le moindre effort d’accent, racontant des soirées de beuveries sur la plage, et nourrissant les clichés des touristes de tout inclus. La critique est violente pour qui s’y reconnaîtrait, mais juste et parfois même teintée de tendresse.
Car les quatre personnages, dans leur quête de plaire et de paraître, n’en restent pas moins des humains en mal d’affection dont les singeries laissent voir la sensibilité. Ainsi, rien ne nous est caché, ni la déchéance éthylique ni les maladresses amoureuses ni le rejet des autres ni les échecs.
Au début s’imposant dans une outrance de couleurs, de bruits, des mimiques, au rythme de maracas mal dissimulés dans leurs costumes; ils finissent sans artifice, implorants, se livrant à l’appréciation d’un public qu’ils ont conquis et qui les a accompagnés toute la pièce dans leur folie.
Sous des couverts de divertissement et de légèreté, La Banda fait rire, prends son sujet à bras le corps, mais en lui insufflant bien plus qu’une simple critique.
L'événement en photos
Par Simon Lenoires et Félix Hallé
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de la rédaction