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Cessons le suspense; si vous n’aviez pas ressenti un enthousiasme débordant à la vue d’Only God Forgives, ou si vous aimez les personnages bien étoffés aux répliques savoureuses, les drames bergmaniens ou dolanesques, ou encore l’une de ces bonnes vieilles tarantinades de notre ami Quentin, vous risquez également de vous emmerder avec The Neon Demon. La construction des personnages, la direction d’acteurs et les dialogues représentent, en effet, un énorme bémol au film, assez catastrophiques pour éclipser toutes les bonnes choses que l’on pourrait avoir le goût de dire.
Comme à l’habitude, le synopsis chez Refn se résume sobrement. Jesse (Elle Fanning), une jeune fille possédant un je-ne-sais-quoi d’irrésistible, innocente mais pas trop, arrive en ville pour se lancer dans le mannequinat et connaît une ascension fulgurante. Les hommes en sont gagas et les femmes en deviennent vertes de jalousie. Particulièrement Sarah (Abbey Lee) et Gigi (Bella Heathcote), deux rivales avec un peu plus d’expérience au compteur. Elles laissent rapidement savoir à la nouvelle venue qu’elles ne se laisseront pas tasser sans répliquer. Voilà pour la psychologie des personnages.
Et tout ce beau monde joue comme un pied. Qu’est-ce que c’est pénible! Karl Glusman, qu’on avait pu endurer dans le film Love de Gaspar Noé, semble en voie de s’établir comme l’un des pires acteurs de sa génération et on ne peut vraiment dire mieux en pensant au reste du casting, exception faite, peut-être, de Jena Malone, qui dégage un semblant d’humanité. «Mais où est donc Keanu Reeves?», demanderont certains d’entre vous. Keanu gère un motel et n’apparaît que cinq minutes à l’écran tout au plus, ce qui ne lui laisse pas le temps de replonger dans la Matrice pour nous sauver de cette calamité répondant au nom de The Neon Demon.
Piste de solution pour Nicolas Winding Refn; à défaut de savoir diriger adéquatement ses acteurs ou de pouvoir écrire un script tenant sur plus de dix pages, on lui suggère de travailler avec un dialoguiste. Car si les comédiens sont affreux, leurs lignes, quant à elles, font carrément grincer des dents et crisper le poing. Conversations de routine pesantes, silences «malaisants», clichés ambulants, manque de naturel évident… de quoi largement privilégier les séquences sans interaction vocale.
Du positif, il y en a. Stylistiquement parlant, Refn n’a pas son égal et arrive même à se dépasser dans sa quête du parfait rendu plastique. Du bonbon pour les yeux, en veux-tu, en voilà. Les moments de transe visuelle abondent, et les pistes musicales choisies accompagnent à merveille son univers supra léché.
Une partie des fans de Nicolas Winding Refn regrettent assurément la période s’étendant de Pusher (1996) jusqu’à Valhalla Rising (2009). Treize années où le cinéaste trempait dans le crado, les textures rugueuses et une vibe déstabilisante n’étant pas sans rappeler les premières œuvres de Gaspar Noé, pour ne nommer que celui-là. Si le style a subi une transformation, le désir de choquer à l’aide d’images fortes n’a rien perdu de sa vigueur. À cet effet, la finale de The Neon Demon vaut le coup d’oeil.
Fausse balle, nous disions donc.
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