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Crédit photo : Mathieu Pothier
Si certains artistes ont le don de se choisir des premières parties qui assomment la foule qu’ils doivent ensuite réanimer, ce n’était pas le cas avec le rock psychédélique du groupe Boogarins qu’Andrew Bird nous a donné la chance de découvrir. C’est ainsi que le quatuor brésilien a fort bien la mis la table, une formation habile qui ne réinvente pas la roue, mais qui sait très bien la faire tourner. Aux commandes, un lead guitar (Dinho Almeida) investi et enivrant, aux cervicales d’ailleurs très solides. Chargé d’une énergie à la Jimi Hendrix sans en avoir le doigté, il a su enflammer la foule qui lui a témoigné un accueil chaleureux pour cette première visite au Canada.
Vint ensuite celui que la foule attendait avec impatience. Dès les premières mesures de la nouveauté «Capsized», la salle s’est mise à bondir, siffler et crier. Les spectateurs avaient fait leurs devoirs, un public dense et mixte, joyeusement bigarré et très réactif, déjà conquis. C’est ensuite «Lusitania», tirée de Break it Yourself (2012) qu’il nous a offerte avant de s’embarquer dans un Nervous Tic Motion of the Head (2005) que Jacques Languirand aurait qualifié de «tripatif». Un amusant coït interrompu de presque dix minutes où Bird s’est bien amusé avec son public avant de finalement lui offrir la chute de cette accrocheuse mélodie où son sifflement est entendu à l’avant-plan.
L’ensemble des morceaux offerts était principalement tiré d’Are You Serious?, même l’étonnant duo Left Handed Kisses qu’il nous a offert en ingénieuse version solo pour compenser l’absence de Fiona Apple. Légère déception qu’il n’ait pas souhaité d’invitée montréalaise sur cette pièce, mais on lui pardonne rapidement. De la même manière qu’on lui a excusé les nombreux ajustements intempestifs lui faisant reprendre les premières mesures de plusieurs pièces. Surtout avec les cordes pincées qui, nous a-t-il expliqué, commençaient à le faire souffrir, se reprenant immédiatement: «You don’t need to know that…»
Andrew Bird nous prouve sans cesse qu’il fait bel et bien partie des multi-instrumentistes de génie de notre époque. De ces artistes qui nous confirment que tout n’a pas déjà été pensé. Transfiguré, flottant en apesanteur dans son univers musical toujours plus rock en live qu’en studio, glissant d’un genre à l’autre, du folk au jazz en passant par le classique plus expérimental. Le plus beau est qu’il sait demeurer accessible sans pour autant se trahir. Toujours fidèle à lui-même, entier et sans concessions. Le rappel, tout en folk et balades, mis en scène autour d’un micro omnidirectionnel où ils se sont réunis, fut une finale toute en simplicité alors que dans la salle les couples d’amoureux furent nombreux à s’enlacer sur ces slows.
La musique d’Andrew Bird nous a, une fois de plus, donné des ailes.
L'avis
de la rédaction