LittératureRomans québécois
Crédit photo : Éditions XYZ
Mais ces écrivains semblent-ils ici soucieux de revenir sur les éléments de l’enquête? De sortir de leurs sentiers battus pour même leur style à l’épreuve en s’empêtrant dans les preuves scientifiques et judiciaires? Pas le moins du monde. Ils inventent un passé, des motivations à disparaître ou à faire disparaître… ou même parfois une suite à la vie du fameux O’Toole. La thèse que le disparu soit un ancien membre de l’IRA séduit d’ailleurs plus d’un de ces auteurs, bien que rien, dans les faits, ne parvienne à l’appuyer. Les amateurs de polars devront donc chercher ailleurs les pistes de leurs sensations fortes puisque seule la première nouvelle, de Chrystine Brouillet, adopte le style du roman policier.
On y rate aussi l’occasion d’explorer de belles pistes du traitement médiatique et policier existantes, malgré la disparition inexpliquée. L’ensemble des auteurs utilisent plutôt la fin de vie du personnage afin de mettre en valeur un style qui leur est propre. Outre la disparition d’O’Toole, le point de ralliement entre ces récits semble tenir à davantage à l’omniprésence d’une quête identitaire du personnage, entre des compte à régler avec un passé secret et la négociation difficile des proches avec le souvenir du disparu. Ces choix narratifs entraînent alors le lecteur à mille lieues de ce que pouvait laisser entrevoir la proposition de départ.
Mais si, habituellement, chaque nouvelle doit se fixer l’objectif de faire passer le lecteur des éléments tangibles à un univers déstabilisant, dans ce recueil, c’est la succession de ceux-ci qui crée cet effet. L’ensemble y parvient d’autant mieux que les dernières nouvelles font quelques subtiles références aux récits précédents. On sent d’ailleurs une gradation d’une nouvelle à l’autre pour passer des références concrètes à une toile de fond de plus en plus fantastique.
L’union des auteurs en vaut donc la peine. Chacun des auteurs qui prennent ici la plume sait la manier, c’est évident, et on n’y trouve rien de mauvais, mais rien non plus par lequel un de ces auteurs risque de parvenir à laisser sa marque et encore moins de briller par de grands talents d’investigateur. La morale de cette histoire: même si elle s’inspire parfois des faits, la fiction demeure la fiction et se réserve jalousement la liberté de maintenir les contraintes du style documentaire à distance.
«La disparition de Michel O’Toole», collectif, Éditions XYZ, 200 pages, 21,95 $.
L'avis
de la rédaction