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Crédit photo : www.facebook.com/VilleMarieLeFilm
Nul besoin d’avoir vu Marécages pour comprendre ce qui se trame au cœur de Ville-Marie. Et nul besoin d’avoir vu Ville-Marie; vous pouvez donc retirer cette activité si elle figurait sur votre liste de choses à faire avant le trépas.
Dans ce mini film-chorale, une série d’accidents et d’infortunes réuniront quatre personnages, dont deux partiellement accessoires. Sophie Bernard (Monica Bellucci plus belle que jamais malgré les années qui passent), une actrice européenne de renommée internationale, se rend dans la métropole québécoise pour tourner une production kitsch à souhait rappelant, par ses décors et costumes, une esthétique tape-à-l’oeil disparue depuis belle lurette. Madame Bernard en profite pour faire d’une pierre deux coups, puisqu’elle rendra visite à fiston Thomas (Aliocha Schneider), les deux ne s’étant pas serré la pince depuis trois ans. Parallèlement, les destins de l’infirmière Marie (Pascale Bussières, offrant une performance à la hauteur de son talent) et de Pierre l’ambulancier (Patrick Hivon) viendront ajouter leurs couleurs secondaires au tableau d’ensemble.
En ouverture, Ville-Marie a le mérite de rapidement capter l’attention. En effet, un Thomas saisi d’effroi assistera au suicide d’une femme venant tout juste de lui confier son bébé. Une scène forte qui donne un élan bienvenu au film, lequel ne tardera pas à s’essouffler malgré une panoplie de rebondissements grotesques.
Point de vue technique, Guy Édoin fait preuve d’une maîtrise évidente derrière la caméra. On aura rarement vu Montréal la nuit aussi bien filmée. Ou fait une aussi belle balade en ambulance. Pour ce qui est de la direction d’acteur, on repassera.
Les tenues vestimentaires de l’affriolante Bellucci se montrent de loin plus intéressantes et mémorables que sa performance. Rigide, calculé et artificiel, le jeu de l’Italienne et celui de la plupart des acteurs l’accompagnant feront grincer des dents ou rire jaune, c’est selon. Malgré tout, Monica dégage encore le magnétisme intense qu’on lui connaît et chacune de ses présences fascine le regard, en dépit du reste.
Ville-Marie, c’est aussi un film dans un film. Au moyen du tournage auquel participe Sophie Bernard, une autre histoire se voit livrée en à-côté, de prime abord d’une totale insignifiance et surjouée de manière à nous rappeler les soaps télévisuels de fin d’après-midi qui polluent certaines chaînes que nous ne nommerons pas.
Thomas résumera cet étrange projet ainsi: un mélo avec des bourgeois qui baisent et qui s’engueulent. Voyons voir si Ville-Marie contient ces éléments. Bourgeoisie? Coché. Baise? Coché. Engueulades? Coché.
Or voilà, la distanciation entre ce long-métrage fictif et Ville-Marie est pratiquement inexistante. Ville-Marie, hommage tenté vers de belles influences cinématographiques telles qu’Almodovar, se parodie lui-même sans le vouloir. À moins qu’il ne s’agisse d’un objectif inavoué, mais il est permis d’en douter.
Le scénario manque de finesse et touche au ridicule en de nombreuses occasions. Certains passages semblent même marqués au crayon gras. Prenons en exemple une scène où Pierre, dans la douche, est victime d’un syndrome post-traumatique. Des bruitages de moteur d’avion et d’explosions accompagneront la détresse de l’homme tourmenté. On avait pas vu une approche aussi adroite à cette problématique depuis Sylvester Stallone et son personnage de Rambo.
Un père absent à l’identité mystérieuse, un suicide, un accident de la route, une crise cardiaque, une Bellucci qui pleure de façon trop propre et classe pour que l’on ressente la moindre émotion (le fameux single tear drop), il ne manquerait plus qu’un crash d’avion, un incendie ou bien une alerte à la bombe pour que le film devienne un pendant difforme du Coeur a ses raisons, excentricité et plaisir en moins.
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de la rédaction