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Crédit photo : Misteur Valaire
Cet album, intitulé Bellevue (est-ce un clin d’œil à la modeste butte municipale de Sherbrooke, une station de ski nommée Mont Bellevue, où nombre de jeunes Sherbrookois ont dévalé leur première pente?), est beaucoup moins pop, mais on discerne tout de même la place de choix qu’occupent les instrumentations à cordes et les percussions. La continuité se retrouve davantage aux niveaux des textures sonores, des synthétiseurs et de l’échantillonnage, mais on ne peut se défaire de l’impression que cette parution n’est pas aussi éclatée que la précédente.
L’aspect ludique et la nature exploratrice de Misteur Valaire sont toujours aussi présents, bien que cet opus apparaît moins dense. Il est beaucoup plus aéré, mais sans devenir lancinant ou taciturne; détrompez-vous, la bonne humeur est toujours au rendez-vous. Le scratching prend une place un peu plus humble, les extraits de dialogues et autres textures sonores ne sont pas aussi évidents, c’est-à-dire qu’ils sautent moins aux oreilles. Le groupe, qui a étudié le jazz, cherche cette fois-ci à incorporer les textures électroniques ainsi que les influences hip-hop aux instruments plus traditionnels tels que la basse et les cuivres. C’est cette structure qui confère un son si organique à la musique de Misteur Valaire. Ce style bien à eux, leur talent ainsi que leur présence contagieuse sur scène expliquent pourquoi ce groupe est l’un des favoris du mouvement indie.
Il y a plusieurs titres qui raviront les admirateurs de MV dont «Bellevue Avenue», qui est un extrait instrumental ayant un rythme agréable et inspirant. «Don’t Get Là» est spécialement entraînante et deviendra sûrement l’un des grand succès de l’opus, même si la voix trafiquée en boucle devient quelque peu éreintante à la longue.
«Mountains Of Illusions» est une très bonne pièce pop-rock faite en collaboration avec Jamie Lidell, dont le style nous fait immanquablement penser au groupe Chromeo. Ensuite, il y a «Space Food», qui présente différentes textures et que l’on apprécie encore plus à chaque écoute. «Known By Sight» est une jolie chanson pop délicate et la voix de la chanteuse de Milk & Bone convient parfaitement. Le titre «La nature à son meilleur» offre une saveur très électro-pop, mais l’échantillonnage utilisé (un extrait provenant du hockeyeur Stéphan Lebeau) pourra laisser l’auditeur quelque peu perplexe; le résultat n’est pas nécessairement fluide.
L’excellente «Life Gets Brutal» est une pièce hip-hop pour laquelle Misteur Valaire a fait appel au chanteur Heems (Das Racist). Le rythme est très groovy et le refrain chanté en cœur est tout simplement magnifique. «El Kid» est un morceau particulier; on dirait presque la musique d’un film en soit. Il débute avec des beats électro où s’ensuivent des instruments à cordes, des sonorités espagnoles discrètes et une conclusion magistrale digne d’un opéra. «Banana Land» est amusante grâce à son aspect kitsch et ses bruits d’oiseaux en sourdine, qui nous donnent l’impression d’être quelque part sous les tropiques avec une piña colada entre les mains.
Bellevue est un très bon disque, bien réalisé et très diversifié. Malgré quelques inégalités, il vaut définitivement la peine d’être écouté. Bien qu’il ne soit peut-être pas aussi festif que Golden Bombay, ce nouvel opus nous ouvre la porte vers d’autres horizons et, qu’on se le dise, découvrir de nouveaux territoires musicaux est toujours intéressant.
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de la rédaction