ThéâtreCritiques de théâtre
Crédit photo : Yves Renaud
Quand Carmen revient en ville, c’est toute la Main qui s’excite à l’idée de retrouver la chanteuse western du Rodéo. Ses amis comme ses ennemies. Partie perfectionner ses yodles, elle retrouve la rue St-Laurent avec le désir de pousser les gens qui l’entourent à s’affirmer et à se surpasser grâce à ses chansons. Bien que le public apprécie les compositions de Carmen, celui-ci se reconnaissant dans les paroles, cela ne plaît pourtant pas à tous.
La pièce s’ouvre sur le chœur qui regarde le soleil se lever sur la Main, mais aussi sur la nouvelle du retour de Carmen (Maude Guérin). Dès le départ, le chœur attaque avec puissance. C’est comme si la lumière revenait avec Carmen.
La relation entre les personnages principaux s’installent rapidement. Maurice (Normand D’Amour), le patron du Rodéo et amant de Carmen, brasse des affaires pas toujours nettes. Tooth Pick (Benoît McGinnis), l’homme de main de Maurice, entretient une haine envers Carmen après avoir été rejeté par elle. Gloria (France Castel) est la star déchue qui envie l’attention que reçoit son ancienne protégée et aimerait bien reprendre sa place au sommet. Enfin, Bec-de-Lièvre (Eveline Gélinas) est la sœur de Maurice et l’habilleuse, la protégée de Carmen.
L’interprétation des comédiens est tout à fait réussi. La voix de Maude Guérin nous transporte et nous épate tout à la fois. La comédienne laisse vraiment la place à la chanteuse dans ce rôle qui semble avoir été taillé pour elle. Eveline Gélinas, que l’on a vu si voluptueuse dans L’Auberge du chien noir, incarne à merveille la jeune femme timide et opprimée. On croit aussi au côté plus sombre et méchant de Benoît McGinnis que l’on a vu dans des rôles à l’opposé de Tooth Pick. Par contre, on regrette de ne pas l’entendre chanter.
Musicalement, Daniel Bélanger vise encore une fois juste. Les harmonies teintes bien le récit. Les mélodies sont entraînantes et reflètent aussi par moments le voile que les laissés-pour-compte tentent de mettre sur leur malheur. La mise en scène plutôt sobre met vraiment à l’avant-plan les personnages.
La qualité de l’interprétation et de la musique réussit presque à nous faire oublier la minceur du récit. On veut croire au message de Carmen. On veut la suivre dans son enthousiasme à vouloir changer les choses, à donner espoir aux opprimés, mais les aspirations de Carmen ne nous font pas vibrer autant que l’on aimerait. On a à peine le temps de s’extasier du retour de Carmen, d’endosser son message, de s’attacher aux personnages que déjà l’histoire boucle sa boucle d’une tragique façon. Finalement, il y a tant de talents dans Le Chant de Sainte Carmen de la Main que ces 90 minutes nous paraissent trop courtes. On se sent un peu bousculer de voir notre plaisir prendre court de manière si expéditive.
L’équipe René Richard Cyr et Daniel Bélanger fonctionne bien. Leur amour de la pièce se sent dans la mise en valeur qui est accordée aux protagonistes. L’univers de Michel Tremblay est respecté. On peut par contre se demander si Le Chant de Sainte Carmen de la Main était le meilleur des choix après avoir triomphé avec leur version des Belles Sœurs. Ceci dit, le public apprécie et est heureux d’aller à la rencontre du théâtre musical proposé par Cyr et Bélanger.
La pièce Le Chant de Sainte Carmen de la Main est présentée au Théâtre du Nouveau Monde, dans le cadre des FrancoFolies de Montréal, jusqu’au 20 juin 2013. Une tournée s’amorcera à travers la province dès janvier 2014. L’album comprenant douze titres interprétés par les comédiens et chanteurs de la pièce est disponible depuis mardi.
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