«Sarah préfère la course» de Chloé Robichaud – Bible urbaine

CinémaCritiques de films

«Sarah préfère la course» de Chloé Robichaud

«Sarah préfère la course» de Chloé Robichaud

Une force tranquille

Publié le 7 juin 2013 par Camille Masbourian

Crédit photo : Les Films Séville

Parce qu’elle en est déjà à sa quatrième présence à Cannes, que son premier long-métrage a été sélectionné dans la catégorie «Un certain regard» et qu’elle est encore très jeune, Chloé Robichaud a maintes fois été comparée à Xavier Dolan. Alter égo féminine de l’enfant terrible du cinéma québécois? Peut-être pas tout à fait, même s’il y a certainement quelques points communs entre eux.

Chloé Robichaud est revenue de Cannes et présente cette semaine son film chez elle, au Québec. Un film au titre un peu intrigant. Sarah préfère la course à quoi?, se demande-t-on. Ça ne prend pas de temps avant de comprendre que Sarah, jouée par Sophie Desmarais, préfère la course à pas mal tout: l’amitié, la famille, l’école, la vie. Sans la course, Sarah ne sait pas quoi faire. Sur une piste, elle fonce. Dans la vie, elle ne sait pas où se mettre. Quand Sarah obtient une place sur l’équipe d’athlétisme de McGill, elle n’hésite pas à quitter Québec, ses parents et son travail pour la grande ville. Presque sur un coup de tête, elle emménage avec son ami Antoine et accepte de l’épouser pour les prêts et bourses. Alors que pour la première fois de sa vie elle aura des questions à se poser sur autre chose que la course, Sarah comprendra que dans sa vie, en dehors de la course, il n’y a rien.

Tourné et joué tout en retenue, comme Sarah, le film de Chloé Robichaud arrive comme une petite bombe dans le cinéma québécois. À première vue, c’est simplement un film sur une fille qui court. Puis en creusant un peu, on comprend que c’est tellement, mais tellement plus que ça. C’est un film sur une fille mal dans sa peau dans toutes les situations les plus banales de la vie. C’est un film sur une fille qui réalise à 20 ans qu’elle est plus attirée par son amie Zoé que par le beau Antoine. Et c’est un film sur le drame de tous les sportifs d’élite qui privilégient le sport à tout le reste pendant des années et qui se retrouvent confrontés au vide de leur vie quand le sport s’arrête. Quand Sarah comprendra qu’elle ne pourra pas courir toute sa vie, elle va réaliser qu’elle est peut-être plus vite que tout le monde sur une piste de course, mais que dans la vie, elle a quelques tours de piste de retard. Et le tout est magnifiquement joué par Sophie Desmarais, dans son premier rôle principal au cinéma. Autour d’elle, d’autres nouveaux venus: Geneviève Boivin-Roussy (Zoé), qu’on a plus vu à la télévision et Jean-Sébastien Courchesne (Antoine), un habitué des films de Chloé Robichaud, qu’on espère revoir souvent au cinéma. Il est plutôt rare que ça arrive, mais dans Sarah préfère la course, ce sont les rôles secondaires qui sont tenus par les acteurs qu’on connait déjà (Micheline Lanctôt, Hélène Florent, Benoit Gouin).

Chloé Robichaud a voulu faire un film sobre, parce qu’il devait représenter l’état d’esprit de son personnage principal. Si Chloé Robichaud a autant de talent et la même volonté que Xavier Dolan, on comprend en voyant Sarah préfère la course que leurs films n’ont pas grand-chose à voir entre eux. Plus de retenue et de subtilité, moins de flamboyance chez Chloé Robichaud. Un film à l’image de sa réalisatrice comme J’ai tué ma mère, Les amours imaginaires et Laurence Anyways sont à l’image de leur réalisateur. Et si les films de Dolan sont des coups d’éclat, Sarah préfère la course est une force tranquille. Un film qui, comme Sarah, n’a l’air de rien à première vue, mais déplacera beaucoup d’air.

L'avis


de la rédaction

Vos commentaires

Revenir au début