«Tout le monde en parle – L’envers du décor» de Carole-Andrée Laniel – Bible urbaine

LittératureDans l'envers du décor

«Tout le monde en parle – L’envers du décor» de Carole-Andrée Laniel

«Tout le monde en parle – L’envers du décor» de Carole-Andrée Laniel

Dans les coulisses de nos dimanches soirs

Publié le 10 décembre 2014 par Camille Masbourian

Crédit photo : Éditions La Presse

Depuis maintenant dix ans, la case horaire du dimanche soir est devenue très payante dans le milieu de la télévision. Chacun des réseaux y envoie ses gros canons (Star Académie et La Voix, notamment), pour faire compétition au Tout le monde en parle de Radio-Canada, qui, depuis 2004, a remplacé Les beaux dimanches, à l’antenne depuis 1966! Le pari était hautement risqué, pour plusieurs raisons, mais Guy A. Lepage, Dany Turcotte, et tous ceux qui les entourent ont relevé le défi haut la main. Au début de cette onzième saison, Carole-Andrée Laniel, rédactrice en chef du Tout le monde en parle (TLMEP) québécois depuis sa création, propose au public un livre sur les coulisses de ce qui est devenu la grande messe du dimanche soir.

Dans un très beau livre d’un peu plus de 200 pages, Carole-Andrée Laniel, avec la participation de Guy A. Lepage, Dany Turcotte, André Ducharme (script-éditeur de l’émission) et quelques invités qui ont accepté de témoigner, couvre à peu près tous les sujets possibles entourant TLMEP. De la création de la version québécoise, jusqu’aux moments forts des dix dernières années, en passant notamment par la préparation de l’émission en bureau et en studio, le processus d’accueil des invités, les cartes de Dany, les chemises de Guy, les invités récalcitrants, le travail de «Manon-pèse-su’l-piton» (Manon Brisebois, réalisatrice) et de «Diane-qu’est-ce-qu’on-boit?» (Diane Piotte, régisseuse), les malaises, les cartons de Guy, la musique, le stress des invités, et plusieurs autres sujets rassemblés en une cinquantaine de chapitres, l’auteure explique simplement et en détail toute la fabrication d’une émission comme celle-ci, y glissant au passage de nombreuses anecdotes.

Si certains chapitres sont plutôt ludiques, certains sont plus sérieux et nous en apprennent beaucoup sur la méthode de création de l’émission, mais aussi sur le milieu de la télé en général. Le chapitre sur les différences entre la version française et la version québécoise de TLMEP est très intéressant, comme celui du traitement réservé à l’information dans une émission qui n’en est pas une d’affaires publiques, mais qui en traite quand même un peu. Comment reçoit-on un politicien à TLMEP? Peut-il être assis à côté d’une ancienne prostituée? Peut-on lui poser des questions pour le coincer? Doit-on faire le même genre d’entrevue qu’à 24 heures en 60 minutes, par exemple? À ce sujet, il est intéressant d’avoir le point de vue de Chantal Hébert, chroniqueuse politique, invitée plusieurs fois sur le plateau. Carole-Andrée Laniel est aussi allée chercher les avis de Frédérick Bastien, professeur adjoint au Département de sciences politiques de l’Université de Montréal, et auteur du livre Tout le monde en regarde! La politique, le journalisme et le divertissement à la télévision québécoise de Lise Payette, animatrice d’Appelez-moi Lise, et de Jean Bissonnette, réalisateur de plusieurs émissions, notamment Les couche-tard, un talk-show des années 60, qui, comme Appelez-moi Lise au début des années 70, recevait des politiciens dans des contextes plutôt ludiques.

Donc oui, l’ouvrage de Carole-Andrée Laniel tourne entièrement autour de TLMEP, mais il s’intéresse aussi à la place de cette émission dans le monde de la télévision québécoise. Parce que TLMEP peut être une excellente rampe de lancement pour des jeunes artistes plus ou moins connus (parlez-en à Rachid Badouri et Fred Pellerin, qui étaient peu connus à leur premier passage à TLMEP), mais peut également vite devenir un enfer pour quelqu’un qui y a été invité et qui a commis une gaffe. Peu de passages de l’émission sombrent dans l’oubli. À la sortie du film Les 7 jours du talion, les journalistes ne parlaient qu’à Claude Legault de son hypnotisation par Messmer. Idem pour Patrice Robitaille, qui avait traité de torchon la critique de Normand Provencher du Soleil, qui n’avait pas aimé Cheech, film que venait promouvoir Robitaille. Il a passé toute la campagne de promotion à défendre ses propos plutôt qu’à parler du film.

Avec une mise en page à la fois simple et ludique, le récit de Carole-Andrée Laniel est constamment ponctué de citations extraites de l’émission, de photos, de témoignages, et d’anecdotes, mais toujours de façon très linéaire. Il serait facile de s’y perdre et de ne plus savoir où donner de la tête, mais ce n’est pas le cas. Le petit défaut? Est-ce que ce livre peut plaire à un aussi grand public que celui de l’émission? Probablement pas. Pour l’apprécier à sa juste valeur, ça prend nécessairement trois critères: être un téléspectateur plutôt assidu de l’émission depuis 10 ans, être intéressé par les dessous de la télévision, et aimer le star-système québécois principalement, mais aussi international. Quelqu’un qui n’a pas grand-chose à faire de Céline Dion (la seule à avoir eu une loge repeinte et entièrement décorée pour impressionner la star!) risque de s’ennuyer un peu. De l’anecdote de vedette, il y en a dans ce livre!

Tout le monde en parle – L’envers du décor rappelle donc de nombreux souvenirs, toujours remis en contexte par l’auteure. Bien qu’on pourrait penser qu’un livre n’est peut-être pas le support idéal pour faire un bilan des dix ans d’une émission de télé tout est si bien remis en contexte qu’on a l’impression de revoir des moments de TLMEP. Définitivement, Carole-Andrée Laniel propose ici un livre à l’image de l’émission, dans lequel les fans trouveront leur compte.

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