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Crédit photo : Sélection Reader's Digest
Paru aux éditions Sélection Reader’s Digest, Légendes du rock constitue un tour d’horizon impressionnant de quelques 479 pages de l’histoire du rock des années 1950 jusqu’aux années 1990. Bien qu’étant volumineux et dense, le beau livre s’adresse à un public large et raconte l’évolution musicale du rock de manière concise et assez fine; mais c’est plus en effet au moyen de photographies nombreuses et saisissantes que l’auteur espère soutenir l’intérêt de l’amateur de rock.
Dans la préface, le critique musical Ernesto Assante propose sans délai une définition du rock, qu’il dépeint comme un «levier fondamental pour comprendre l’histoire récente». L’auteur s’efforce de montrer, plus particulièrement, que le rock permet aux jeunes de naître et de s’affirmer en tant que sujet de société, et qu’il s’articule autour de ces quatre comportements inhérents à cette juvénilité: le désir de liberté, le rejet de l’autorité, l’intérêt pour les cultures alternatives et la reconquête de la vie urbaine. Assante dira plus globalement que le rock: «[c]’est une attitude, plus qu’une musique, une manière de voir, de penser le monde ou encore l’art […]».
Dans la première section du volume, le journaliste présente les grands jalons de l’évolution du genre. Sans oser reconnaître une paternité claire, l’auteur situe l’avènement du rock au milieu des années 1950, alors qu’émerge le rock and roll. À l’instar de l’auteur, «[d]ans l’après-guerre, aux États-Unis surtout […], les jeunes gens commencèrent à disposer d’un peu d’argent et de temps. Ils inventent cet âge moyen entre l’adolescence et l’âge adulte. Ces jeunes ne veulent plus devenir des parents et ils pensent d’abord à l’amour, au sexe, aux loisirs de consommation […]».
C’est précisément cette vision du monde, mue par le rock et entretenue par les jeunes, qui unira les années 1950 aux décennies subséquentes: de la British invasion et du mouvement hippie jusqu’au grunge de Nirvana et à la brit pop de Radiohead, en passant par le rock progressif de Pink Floyd, le punk des Sex Pistols et la new wave.
Si on déplore légèrement la découpe en cinq temps ronds et plusieurs affirmations réductrices, des étiquettes parfois trop enthousiastes et prêtes à coller au sujet des légendes, il reste que les catégorisations claires ponctuant ce recueil épais permettent au lecteur de cerner et de mémoriser facilement l’histoire du rock. À chaque contexte et évolution, le critique épingle ses légendes correspondantes.
La simplicité de cet «organigramme musical» n’empêche pas à l’auteur d’ajouter une foule d’anecdotes. À ce sujet, il faut l’admettre, Assante réussit son pari de manière exemplaire. Car, relatant un nombre incroyable de faits à propos d’une poignée d’artistes incontournables, justement insérés dans leur contexte, les premières balises temporelles qu’il a préalablement fixées autour du rock deviennent plus poreuses, moins hermétiques. Ces faits révèlent très subtilement une histoire du rock plus élastique, étagée, voire décalée, davantage proche de ce qu’elle fut en réalité.
Dans la deuxième section du beau livre, la partie la plus intéressante du volume, et nettement la plus imposante (représentant les trois quarts de l’ouvrage), l’auteur offre 48 biographies courtes de ces légendes du rock, classées selon leur ordre d’apparition dans l’histoire. Tous les Elvis Presley, Bob Dylan, Rolling Stones, Jimi Hendrix, Pink Floyd, Bob Marley, Bruce Springsteen, Michael Jackson et U2 ont ici droit à une notice. Mais, le journaliste n’affiche pas de préférence pour ces premiers et se penche aussi généreusement sur la carrière d’autres musiciens marquants, mais que l’on considère généralement d’importance secondaire, racontant tous les Yes, Patti Smith, Talking Heads, Dire Straits, Green Day, Eminem et Amy Winehouse.
Les textes sont mis en valeur par de grandes photographies, témoignant de concerts inoubliables ou d’autres événements remarquables de l’histoire de ces légendes du rock. Mentionnons toutefois que les images scindées par la reliure interne du livre causent souvent préjudice à notre plaisir visuel. La mise en page est, par ailleurs, loin d’être sans faille: certaines couleurs ne respectent pas les tendances et modes actuelles, quelques superpositions d’illustrations paraissent plus maladroites que sophistiquées et la taille de plusieurs polices de texte force inutilement la vue. Ce volume imposant, à la couverture rigide, manque un peu de raffinement, mais ce n’est tout de même pas trop flagrant finalement.
Il s’agit d’un beau livre intéressant que l’on conseille surtout aux fans de rock «classique». Peut-être un cadeau de Noël de choix pour la génération des baby-boomers?
«Légendes du rock» d’Ernesto Assante, Sélection Reader’s Digest, 2014, 479 pages, 39,95 $.
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de la rédaction