SortiesExpositions
Crédit photo : www.mbam.qc.ca
L’affiche publicitaire est un art qui n’a que très récemment gagné ses lettres de noblesse. Pourtant, la propagande militaire du siècle dernier en faisait déjà amplement usage pour recruter des soldats et encourager le moral des troupes et des civils. Provenant de la France, de l’Allemagne, de l’Angleterre, des États-Unis et, bien sûr, du Canada, les annonces appellent toutes les couches de la société au sacrifice à la nation à travers des figures patriotiques vibrantes. Certaines affiches ne s’adressent notamment qu’aux canadiens-français; d’autres ciblent les mères et les familles derrière les soldats mobilisés. Pour persuader les jeunes hommes de s’enrôler, les gouvernements usent de tout l’arsenal symbolique dont ils disposent comme la menace du bolchévisme ou les racines françaises qui lient le Canada à la cause de la Triple-Entente.
Dans l’ensemble, la collection est intéressante pour la variété des styles d’expression présentée. Une partie des publicités se rattache davantage à l’art expressionniste de la Belle Époque, tandis que d’autres sont d’avant-garde au point d’avoir l’impression qu’elles ont été produites cette année. Toutefois, les oeuvres exposées auraient pu être accompagnées de plus de descriptions. L’absence des années de production laisse également le visiteur dans le vide quant au contexte dans lequel les oeuvres ont été réalisées.
La collection ne couvre guère plus d’une pièce, étant donné que la visite est faite pour être combinée à celle de l’exposition De Van Gogh à Kandinsky. À la fin du parcours, un mur entier consacré au recensement des soldats tombés ou blessés au combat révèle l’ampleur des pertes humaines causées. Sur fond écarlate, les silhouettes peintes en blanc valent 5000 soldats canadiens, elles-mêmes étant entourées d’une marée de soldats de couleur noire équivalant le même nombre pour l’ensemble des nations impliquées. Sur le mur opposé, les classiques In Flanders Fields de John McCrae et Si je mourais là-bas de Guillaume Apollinaire complètent le triste portrait statistique sur une note poétique.
En montant cette exposition, le MBAM tient à rendre hommage à la philanthrope québécoise Liliane Stewart décédée en mai dernier. Dans leur allocution d’ouverture, la directrice et conservatrice du Musée des Beaux-Arts Nathalie Bondil et la principale de l’Université McGill Suzanne Fortier ont toutes deux chaudement souligné la générosité et l’implication de la mécène dans le milieu muséal montréalais. Selon Bondil, c’était «important pour le Musée de faire un événement spécial pour le Centenaire.» De plus, avec le lancement de l’exposition Warhol s’affiche! la semaine dernière, le médium méconnu de l’affiche publicitaire est clairement l’une des vedettes de la programmation automnale du musée.
Alors que le monde s’apprête à commémorer le Centenaire du conflit pour les quatre prochaines années jusqu’à l’anniversaire de l’armistice de 1918, Nathalie Blondil estime que les rendez-vous du Musée portant sur la Première Guerre mondiale risquent de devenir annuels. La mort patriote amorce ainsi une série d’expositions au MBAM sur le sujet qui, on l’espère, feront un survol plus exhaustif sur l’art de l’époque et ses multiples manifestations.
L'avis
de la rédaction