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Crédit photo : Shayne Laverdière
Après que son fils Steve (Antoine-Olivier Pilon) ait mis le feu à la cafétéria du centre jeunesse où il loge, Die (Anne Dorval) est contrainte de le reprendre chez elle. Elle sans éducation, mais débrouillarde et opiniâtre, lui adolescent hyperactif, agressif et instable depuis la mort de son père, ils forment un duo sur qui le sort semble s’acharner. Ils feront la rencontre de la secrète Kyla (Suzanne Clément), enseignante en arrêt de travail devenue bègue à la suite d’un traumatisme dont elle ne dévoilera rien. Leur amitié leur apportera, à tous les trois, un peu d’espoir, de légèreté, un certain équilibre.
La direction d’acteurs réaliste jumelée à une caméra qui ne les lâche pas d’une semelle mitraille des dialogues percutants tant dans leur violence que dans leur humour. Xavier Dolan a choisi de tourner en majeure partie dans un format carré qui, s’il encadre les visages, confine les personnages (ou du moins notre point de vue sur eux) dans une sorte d’enfermement. L’effet est renforcé lorsque, dans les rares moments de liberté et d’abandon, l’écran s’élargit soudainement. Avait-on besoin de cette symbolique apportée par la technique? Dolan aurait étonné d’avantage en n’y cédant pas.
Les aventures et mésaventures des trois protagonistes sont soutenues par une trame sonore de hits qui ne fait pas que créer une ambiance, elle amplifie le sens. C’est particulièrement le cas lorsqu’il y a des paroles, de Wonderwall à On ne change pas, bien que le dénouement de la scène de karaoke, où Steve chante la balade italienne Vivo per lei, soit très prévisible.
Évidemment, Anne Dorval est parfaite. Mais en réalité, toute performance en-deçà de la perfection nous aurait déçus. Suzanne Clément tire parti de ce rôle qui l’oblige à la retenue, elle qu’un visage naturellement lumineux fait parfois basculer dans la surenchère expressive lorsque des émotions de colère ou de peine entrent en jeu. Antoine-Olivier Pilon incarne bien ce garçon écartelé entre les deux pôles du charme et de la violence. On salue aussi le choix de Patrick Huard dans le rôle du voisin, qui fait exactement ce qu’on attend de lui (l’acteur comme le personnage).
Que manque-t-il donc à Mommy? Rien, il ne manque rien. Il y en a juste un peu trop. Comme dans Laurence Anyways, toutes ces qualités cinématographiques se trouvent à la longue quelque peu diluées par le refus du réalisateur de faire des choix au montage entre toutes ces scènes, tous ces longs plans. Nous ne pouvons souhaiter à Xavier Dolan qu’il acquière une véritable confiance en lui-même qui fera en sorte que le premier de classe qu’il est ne se sentira plus obligé de tout prouver et de tout montrer.
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de la rédaction