ThéâtreL'entrevue éclair avec
Crédit photo : Josée Lecompte. De gauche à droite: Navet confit, Guillaume Tremblay et Olivier Morin.
Navet Confit, on est ravis de te retrouver depuis nos derniers échanges qui remontent à… janvier 2019 déjà! Toi qui es à la fois multi-instrumentiste, réalisateur musical, concepteur sonore et comédien, voudrais-tu nous dire ce qui explique, selon toi, autant de diversité et d’adaptabilité dans ton parcours artistique?
«Bonjour. Ça fait un bout hein? Bon. Je ne sais pas exactement ce qui explique cela, peut-être le fait que je n’ai aucun plan de carrière. Je me promène d’un projet à l’autre selon les offres et mes envies…»
«J’ai toujours été intéressé par toutes sortes de médiums: la musique d’abord (bien sûr), mais aussi les arts visuels, la scène, la vidéo, la littérature. À date, je suis très chanceux: j’ai droit à un genre de nouveau départ chaque décennie. Début 2000, je me concentrais presque exclusivement à mon projet musical et à la réalisation d’albums. J’ai commencé à faire de la musique pour le théâtre vers 2010, et, pour les années 2020, je m’enligne de plus en plus vers la mise en scène de spectacles de musique.»
«Toutes ces disciplines qui s’alternent et les rencontres artistiques que ces projets occasionnent me permettent de changer d’air et de ne jamais m’ennuyer. Ça me donne aussi l’impression que mon métier est toujours un nouveau métier, un nouveau défi, ce qui me met en mode découverte plutôt qu’en mode “assis sur mes lauriers.” J’ai la chance d’être approché par des artistes inspirants qui m’amènent à des endroits où je ne pensais pas aller.»
Depuis 2011, tu as signé les conceptions sonores de plus d’une vingtaine de pièces de théâtre, incluant celles du Théâtre du Futur, dont tu es le cofondateur avec Olivier Morin et Guillaume Tremblay. Comment décrirais-tu ta collaboration créative et artistique avec tes deux comparses?
«J’ai rencontré Guillaume il y a longtemps au Cégep de Jonquière, alors qu’on étudiait tous les deux en ATM profil radio. Déjà, à l’époque, on faisait des niaiseries ensemble sur scène. On s’est perdus de vue quelques années avant qu’il ne revienne vers moi avec son projet des Gerrys (un groupe vocal barbershop qui reprend du Gerry Boulet) et le fameux Clotaire Rapaille, l’opéra rock, notre premier show du Futur.»
«Entre-temps, j’avais connu Olivier quelque part entre l’Esco et le défunt Divan Orange, via son projet musical Otarie. On s’est retrouvés autour de cette énormité d’opéra lo-fi pour le présenter au Jamais Lu 2011, sans trop savoir qu’on allait ensuite fonder une compagnie et produire autant de spectacles. Ma collaboration avec eux se passe au niveau de la musique, mais aussi de la technique et du contenu.»
«J’aime dire que je suis leur premier public; je ne co-écris pas les shows, mais je suis le chanceux qui assiste à nos premières lectures à trois en vue d’une nouvelle création. C’est le moment où je vois toutes leurs idées à la traîne sur la table, la charpente du show, le ton, les nouvelles conventions…C’est aussi souvent le moment où je leur dis: “je comprends rien les gars”».
Dès le 19 avril, le Théâtre du Futur présente La grosse noirceur au Théâtre Aux Écuries, où tu es à la fois comédien-interprète et compositeur de la musique du spectacle. Le public assiste ainsi à une «saga futuriste dont vous êtes le héros, […] une œuvre cousue sur mesure pour le citoyen d’aujourd’hui qui renaît de ses cendres sociales, collectives et communautaires après ces deux épouvantables années.» Par quoi t’es-tu laissé inspirer pour, d’une part, créer la bande sonore de la pièce, et d’autre part, t’imprégner de ton rôle en tant que comédien?
«Tout d’abord, mettons une chose au clair: je joue quelques petits rôles sur scène, mais je n’ai pas la prétention d’être comédien! Je le fais par nécessité ou par manque de personnel, parce que tant qu’à être sur scène et posséder une bouche fonctionnelle, je peux bien dire des répliques.»
«Pour ce qui est de la musique de ce nouveau spectacle, on change de style musical de façon très random, comme c’est l’histoire d’un personnage qui passe d’une communauté à l’autre dans un monde complètement éclaté.»
«Les gens y vivent en silos, regroupés par leurs intérêts (la représentation des echo chambers des médias sociaux appliqués à la vie en société). Il y a donc autant du funk, de musique médiévale, de musique ambient, de musique nineties et même de musique qu’on pourrait associer au Muppet show.»
«Quand je compose pour le théâtre, je me mets au service du texte, et mes goûts personnels prennent souvent le bord. C’est un exercice de style très intéressant et ça me fait écouter toutes sortes de musiques, pour essayer d’en saisir l’essence.»
«Depuis quelques années, j’aime aussi travailler la spatialisation en salle quand c’est possible, pour rendre nos spectacles plus immersifs.»
Il paraît que le texte est librement inspiré de la prémisse de La Colère des Doux, une expérience 100% virtuelle présentée en mai 2021 (et qu’on a adorée d’ailleurs!), laquelle est située à mi-chemin entre un show funk, une plateforme web, de la relaxation, du cinéma d’animation expérimental et du théâtre… Rien que ça! Voudrais-tu nous expliquer de façon un peu plus concrète quel est le lien entre ces deux spectacles?
«Il paraît, oui. Les deux “spectacles” (je le mets entre guillemets parce que, pour nous, La Colère des Doux est plus un genre de film interactif) sont intimement liés, car ils ont la même prémisse. Le personnage principal est toujours VOUS (oui oui, VOUS, le spectateur/la spectatrice). On retrouve une partie du répertoire musical du film dans La grosse noirceur. Certaines scènes sont assez proches en version scénique, mais il y a beaucoup de réécriture, de coupures et d’ajouts.»
«Pour ceux qui se demandent: il n’est pas nécessaire d’avoir vu le film pour apprécier ou comprendre la pièce; ce sont deux œuvres complémentaires. Ainsi, si vous avez vu le film, vous n’allez pas non plus vous ennuyer au show, puisque vous découvrirez toutes sortes de belles surprises. Guillaume et Olivier ont pris beaucoup de libertés dans leur réécriture, c’est vraiment une adaptation!»
«Il est toujours possible de visionner le film en ligne, il suffit de se procurer un billet sur le site du Théâtre Aux Écuries.»
Et qu’aimerais-tu dire à nos lecteurs pour qu’ils ne passent surtout pas à côté de cette production, présentée jusqu’au 30 avril?
«L’an dernier, le Théâtre du Futur fêtait ses 10 ans. Nous devions présenter La Colère des Doux devant public pour célébrer cet anniversaire. Évidemment, ça n’a pas eu lieu, nos dates de représentations prévues en février-mars 2021 sont tombées au pire moment, côté mesures sanitaires.»
«Malgré le fait que nous ayons beaucoup ri et appris en concoctant un film avec les moyens du bord, entre les couvre-feux, c’était une occasion ratée d’aller à la rencontre de notre public adoré et de l’entendre réagir en plein dans nos faces.»
«Cette nouvelle série de shows, c’est une façon pour nous de se reprendre, de renouer avec les salles pleines, les rires, les “oooohhh”, les “wtf”, et d’enfin célébrer nos 10 ans comme il se doit.»
«Oh, et puis dépêchez-vous, je crois que les billets partent vite.»
Pour acheter vos billets pour La grosse noirceur à compter du mardi 19 avril au Théâtre Aux Écuries, cliquez ici. Pour lire nos précédents articles «L’entrevue éclair avec» et faire le plein de découvertes, consultez le labibleurbaine.com/nos-series/lentrevue-eclair-avec.
*Cet article a été produit en collaboration avec le Théâtre Aux Écuries.
«La grosse noirceur» en images
Par Josée Lecompte