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Crédit photo : Tous droits réservés @ Groupe communautaire L'Itinéraire
Sans aucun doute, la philanthropie et le milieu communautaire sont des passions pour Luc Desjardins… et c’est peu dire! Car même si ce n’était pas un plan de vie établi depuis le début, le milieu social constitue la pierre angulaire de son univers.
«Je suis impliqué depuis toujours dans le milieu communautaire. Toutes les actions que je fais ont été, d’une façon ou d’une autre, interreliées avec le travail social, et ce, depuis plus de 40 ans. Le côté social est très important pour moi. Le fait de vouloir participer à faire avancer la société et à aider son prochain est quelque chose qui me touche beaucoup.»
Programmeur analyste de formation, Luc a travaillé pendant plus de vingt ans dans le milieu syndical, et le désir de vouloir aider les autres a toujours été omniprésent. Que ce soit les gens sur le marché du travail, monsieur et madame Tout-le-Monde, ou plus spécifiquement les jeunes, il s’est impliqué dans plusieurs organisations professionnellement ou en tant que bénévole: «Mon arrivée à L’Itinéraire, il y a quatre ans et demi, est un amalgame de plus de trente ans de vie professionnelle qui se résume à aider les individus en situation de précarité sociale».
Accompagner les personnes marginalisées
Le Groupe communautaire L’Itinéraire n’aide pas seulement les itinérants à manger. L’organisme s’implique aussi au cœur de leur cheminement en les dirigeant vers les bonnes ressources, tout en les aidant à fructifier leurs coffres à outils respectifs. Plus précisément, le but de l’organisme est d’agir comme tremplin en les aidant à réintégrer, d’une certaine façon, le marché du travail pour rebâtir leur confiance et leur estime de soi.
Le projet le plus connu de l’organisme est, sans aucun doute, la création du magazine L’Itinéraire: celui-ci donne l’opportunité à celles et ceux qui en ont besoin d’améliorer leur qualité de vie en devenant camelot, pour ainsi gagner de l’argent en vendant des exemplaires. «Si tu veux avoir la chance de réussir et d’avancer un peu dans la vie, il faut au minimum assurer et sécuriser tes ressources pour combler tes besoins primaires, comme manger et avoir un toit. Le magazine est là pour aider les gens en situation précaire à atteindre cette sécurité.»
Pour Luc, le magazine est bien plus qu’un moyen de faire du profit pour les itinérants. Selon lui, l’aspect humain, qui vient avec ce type d’emploi, est primordial dans leur cheminement, en créant un sentiment d’accomplissement, tout en brisant l’isolement qui vient inévitablement avec la précarité:
«Le camelot veut naturellement faire le plus de ventes possible pour avoir plus d’argent pour survivre, mais la discussion qu’il peut entretenir lors de la vente ou juste en parlant avec d’autres individus est souvent beaucoup plus profitable que l’argent qui vient au bout.»
Déconstruire les stéréotypes, une conversation à la fois
Avec la couverture médiatique actuelle et l’expérience personnelle de certains camelots, il est facile de constater comment les personnes marginalisées sont souvent victimes de préjugés tenaces et d’idées préconçues. M. Desjardins raconte que, souvent, les gens vont traverser et changer de trottoir afin d’éviter tout contact avec les camelots, ce qui est très difficile pour certains. «Notre rôle à nous, c’est aussi de faire de l’empowerment. Il faut encourager nos camelots à persévérer et à être résilient face à cette discrimination, et d’essayer le plus possible de briser les stéréotypes.»
Le directeur général déplore la rapidité avec laquelle notre société juge une situation sans connaître véritablement les enjeux et les rouages derrière. Il croit que la majorité oublie un fait fondamental (et très évident) pour comprendre la situation: ce sont des humains, comme vous et moi.
«Quand les individus donnent la chance à nos camelots d’entretenir une conversation, la plupart du temps, les préjugés tombent. Ils se rendent compte que ces gens-là, ce sont des personnes, des humains, des individus qui essayent tant bien que mal de s’en sortir.»
Un autre aspect important est, selon lui, de ne jamais oublier que l’itinérance n’est pas un choix. En effet, il s’agit plutôt de la conséquence de plusieurs évènements difficiles qui s’empilent les uns sur les autres, et qui amènent les gens, souvent plus rapidement qu’on ne le pense, à perdre la sécurité et le confort d’un domicile fixe: «Tu ne viens pas au monde itinérant, tu ne commences pas ta vie en affirmant que ton choix de carrière, c’est de vouloir prendre de la drogue et de coucher dans la rue. Tous ces préjugés n’existent pas. Ce qu’il est important de retenir, c’est que l’itinérance a différentes facettes et peut prendre des formes qui ne sont pas visibles. Il y a une grande incompréhension et un manque d’écoute face à la situation, et il faut améliorer les approches et changer les discours qui circulent.»
Un regard optimiste sur l’avenir
Malgré la situation actuelle, où la crise sanitaire a frappé de plein fouet les personnes itinérantes avec des évènements tels que le campement de la rue Notre-Dame et la mort tragique de Raphaël «Napa» André, M. Desjardins continue d’être optimiste en croyant que les gens en situation d’itinérance recevront l’aide nécessaire pour traverser cette crise.
Le groupe Communautaire L’Itinéraire a beaucoup changé avec le temps et continue toujours d’évoluer avec, entre autres, la possibilité d’acheter le magazine aux camelots avec un mode de paiement sans contact. Depuis bientôt cinq ans, l’organisme a aussi entamé un nouveau projet, Le Café de la Maison Ronde au Square Cabot, qui a pour mission de favoriser la mixité sociale et l’autonomisation des autochtones en situation d’itinérance dans une perspective d’équité et de progrès sociaux.
L’éditeur espère aussi que le magazine continuera d’être édité en version papier encore longtemps, même si c’est le dernier à être publié.
«Le côté humain de la chose et le contact avec l’extérieur est une étape vraiment clé dans le cheminement de nos camelots. La chose la plus folle que je pourrais souhaiter, c’est que dans vingt ans, il y ait encore une édition papier, même si ça va être vintage en tabarouette!»
Véritable passionné d’entraide et d’équité, Luc Desjardins est fier du parcours que son équipe et lui ont parcouru, ainsi que de l’aide qu’ils offrent chaque jour.