CinémaZoom sur un classique
Crédit photo : Images tirées de l'oeuvre «Il était une fois en Amérique» de Sergio Leone
À New York, les quatre meilleurs amis d’enfance de Noodle (Robert De Niro) se font tuer. Pourchassés par des criminels, Noodle décide de quitter la ville pour y revenir plusieurs années plus tard. De retour dans le grand centre urbain, il apprend peu à peu ce qui est réellement arrivé à ses amis.
De nombreux flashbacks nous montrent les péripéties vécues par les jeunes et, peu à peu, Noodle réussit à recréer le casse-tête de la nuit où ils sont morts subitement.
Au coeur de la filmographie de Sergio Leone, Il était une fois en Amérique s’avère une oeuvre cinématographique complètement différente de ses précédentes. On reconnaît, bien sûr, sa signature, surtout au niveau de la mise en scène, mais tout le reste a complètement été changé. Ainsi, le cinéaste a délaissé les grands espaces de Monument Valley pour la ville de New York, ayant décidé plutôt de tourner le portrait de la vie d’un jeune et de ses amis dans la pauvreté.
L’histoire est complexe, regorge de péripéties, et ici rien n’est laissé au hasard comme dans plusieurs autres de ses films. Mais reste qu’une scène est profondément troublante et qu’il peut être difficile de croire qu’un tel cinéaste de cette renommée l’ait réellement signée.
Une scène difficile à regarder
Personnellement, c’est un problème majeur qui m’empêche de voir ce film comme un vrai chef-d’œuvre. Le personnage principal, Noodle, a toujours aimé Deborah, la sœur de l’un de ses amis d’enfance. Vers la fin du film, les deux se retrouvent dans une voiture, et Noodle en vient à violer Deborah… Ce moment est extrêmement long et maladroit, mais surtout, c’est violent. Violent pour les gestes portés à l’égard de Deborah, mais aussi violent pour le spectateur ,qui se fait marteler des images désagréables pendant de longues minutes.
Est-ce que cette scène apporte véritablement quelque chose au récit et aux personnages? Pas du tout, puisque nous savons déjà que Noodle est sombre et par moments instable. Est-ce que cette scène aurait dû être coupée du montage? Oui, très certainement.
Et c’est là le principal reproche que j’ai à faire envers ce film. Peut-être que c’est parce que je suis moi-même une jeune femme et que je ne supporte pas de voir un tel acte être commis, mais c’est surtout parce que je ne vois pas du tout ce que ça apporte à l’œuvre.
Ce qui sauve, en partie, cet immense faux-pas, à mon sens, c’est la musique et la relation d’amitié ainsi que son évolution entre les jeunes et aussi lorsqu’ils deviennent des adultes. La musique est beaucoup plus efficace que les jeunes acteurs pour transmettre une émotion, et c’est là l’atout le plus significatif du film, puisque cette dernière évoque une immense sensibilité pour ces personnages torturés.
C’est la raison pour laquelle je vous en parle aujourd’hui: Ennio Morricone y a mis son grain de sel et c’est probablement l’élément le plus pertinent de la production.
L’homme qui manipule l’orchestre
Né à Rome, Ennio Morricone apprend à jouer de la trompette et à composer de la musique dès son plus jeune âge. C’est lorsqu’il a six ans qu’il termine sa première composition. Au début de sa carrière, il compose pour plusieurs groupes et artistes jazz, mais c’est en 1964, lorsque Sergio Leone lui demande de composer la musique de son film Pour une poignée de dollars, qu’il se retrouve sous les projecteurs. Il signe par la suite les grandes oeuvres de Leone, notamment Cinema Paradiso, Days of Heaven, The Mission, The Untouchables et The Hateful Eight (pour ne nommer que ces titres…) Il met aussi la main sur deux Oscars et trois Golden Globes.
Dans Il était une fois en Amérique, le maestro donne un autre rythme à ses compositions. Si dans d’autres œuvres de Leone le tempo était, en général, plutôt rapide et fonctionnait bien dans un cadre où il y avait un peu plus d’action, le rythme des chansons d’Il était une fois en Amérique adopte un tout autre ton. On reconnaît bien le style du maître, mais ici tout est plus doux, plus sombre et plus solitaire.
En plus de réussir habilement à transmettre différentes émotions, la musique d’Ennio Morricone transcende les époques et évite parfois que le film ne vieillisse mal. En effet, dans la première partie de l’œuvre, les scènes sont jouées par de jeunes acteurs. En 2020, leur jeu d’acteur peut paraître surjoué et cela donne l’impression que le film a assez mal vieilli. Mais lorsqu’une musique se fait entendre, on oublie un peu tous ces défauts et on peut pleinement apprécier les émotions suscitées par les notes (que les acteurs ont plutôt de la difficulté à nous partager!)
Morricone n’était pas seulement un éminent compositeur de bande sonore au cinéma. Il a aussi composé des tonnes d’œuvres musicales classiques à apprécier en concert ou autrement. Il maitrisait son art, et d’ailleurs de nombreux artistes contemporains de plusieurs genres différents l’ont adopté comme influence majeure: Muse, Metallica, Hans Zimmer, Radiohead et Dire Straits (entre autres!) ont avoué s’inspirer fortement de son travail.
Ce chef d’orchestre hors-pair a réussi l’impossible en travaillant avec les cinéastes les plus influents de leurs époques respectives: Leone, De Palma, Argento, Tornatore, Malick et Tarantino. Il a su illuminer des images qui semblaient déjà tellement parfaites. Parfois, dans de telles productions où les réalisateurs et les acteurs sont très connus, les noms des compositeurs demeurent secondaires, et ces derniers restent dans l’ombre, mais pas Ennio Morricone. Sa signature musicale est unique et reconnaissable parmi des centaines… Ça va nous manquer.
Merci pour tout Maestro Morricone. J’espère que la musique en haut répond à vos attentes. Sinon, composez-la.
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«Il était une fois en Amérique» en images
Par Images tirées de l'oeuvre «Il était une fois en Amérique» de Sergio Leone