Entretien avec l'auteure Annie-Claude Thériault: les dessous de l'écriture – Bible urbaine

Littérature

Entretien avec l’auteure Annie-Claude Thériault: les dessous de l’écriture

Entretien avec l’auteure Annie-Claude Thériault: les dessous de l’écriture

Publié le 21 juin 2012 par Éric Dumais

Enseignante de philosophie et écrivaine, Annie-Claude Thériault a récemment mis le point final à Quelque chose comme une idée de printemps, son premier roman. Au centre de ce drame à la fois réaliste et humoristique se trouve Béatrice, une jeune adolescente de 13 ans aux prises avec un grand frère schizophrène.

Ton roman Quelque chose comme une odeur de printemps relate la vie quotidienne d’une famille moderne aux prises avec un adolescent atteint de schizophrénie. Est-ce l’autobiographie romancée d’un de tes proches?

J’hésite à dire oui. Je crois que ce qui est réel relève des sentiments et des émotions qu’une jeune fille peut éprouver face à sa fratrie. Les évènements et l’histoire sont plutôt de l’ordre de la romance. C’est là la beauté de la littérature: pouvoir voguer ainsi, sans contrainte, entre la réalité (ou ce que l’on croit qu’elle a été) et l’imaginaire. J’ai l’impression qu’en fin de compte, même ce que je crois autobiographique a tellement été romancé qu’il n’en reste qu’une mince trace. Cela dit, je n’ai pas côtoyé directement la schizophrénie au sein de ma famille, mais plusieurs personnes près de moi vivent avec un enfant, un frère ou un parent qui en est atteint. Nous connaissons tous ces situations déstabilisantes, mais nous les maîtrisons très mal lorsque nous sommes enfants.

Écrire sur la maladie mentale a-t-il été un sujet délicat pour toi?

C’est un sujet qui s’imposait. La maladie mentale m’a toujours attristée. Je me souviens encore d’une vidéo présentée dans une classe de secondaire sur la schizophrénie, cela m’avait bouleversée. On a de la difficulté à intégrer les gens qui souffrent de handicaps physiques dans nos sociétés modernes. La maladie mentale, c’est encore pire! On ne la comprend pas, on ne la voit pas, on ne sait tout simplement pas quoi en faire, car elle n’entre pas dans notre cadre «rationnel». Peut-être était-ce un sujet délicat, en effet, dans la mesure où je tenais à l’exploiter avec franchise, dans toute sa complexité, dans l’étrange mélange de tendresse et de désarroi que la maladie suscite.

D’où t’est venue l’inspiration pour inventer un titre aussi métaphorique que Quelque chose comme une odeur de printemps? Quel en est le sens profond pour nos lecteurs?

En fait, je l’ai choisi pour accentuer l’aspect «lumineux» et «non hivernal» du livre. Il est beaucoup question de l’hiver dans le roman, et pourtant, Béate n’y sombre pas. Je voulais un titre qui aurait pu sortir de sa bouche à elle. Je trouvais également qu’il représentait bien l’impression générale de Béatrice sur la vie: quelque chose qu’on ne sait pas trop nommer (d’où le quelque chose), qui sent bon (mais tout de même un peu détrempé) et qui annonce que la vie continue, que les arbres vont fleurir à nouveau quoi qu’il en soit. J’avoue m’être aussi inspirée de deux chansons que j’écoutais souvent. «Le printemps des amants» de Mara Tremblay et «L’hiver» de Jean Leloup. Deux morceaux extrêmement sobres, beaux et tristes à la fois.

Est-ce que Béatrice Dugas est une jeune adolescente à laquelle tu t’es identifiée au moment d’écrire ton roman?

Un peu. Peut-être davantage que je ne le crois, car plusieurs m’ont dit y retrouver quelques facettes de ma personnalité, mon humour par exemple. En fait, je crois que j’aurais aimé être ce genre d’enfant: particulière, sensible, empathique. Peut-être l’ai-je été? Je ne m’en souviens plus; j’étais trop jeune!

As-tu déjà une idée en tête pour une prochaine œuvre littéraire?

Rien de précis. J’imagine un long roman. J’aimerais beaucoup traiter de l’amitié, d’un groupe d’amis. Je l’ai abordé par la bande avec les personnages de Wu et M. Pham, mais j’aimerais en faire le centre d’un récit. Il me semble que l’amitié permet d’exploiter (comme la famille) la complexité des rapports humains. J’adore.

Y a-t-il un sujet ou un genre littéraire auquel tu n’oserais pas t’attaquer?

Le roman historique. Je serais obsédée par l’idée de me tromper dans des détails. Il me semble que la littérature me permet précisément de me sauver de ce souci de véracité.

Tu habites actuellement à Montréal et tu enseignes au Collège Montmorency. As-tu des plans d’avenir autre que l’enseignement?

Hum… c’est une bonne question. L’enseignement n’est pas pour moi un travail. C’est trop agréable pour en être un! Je ne me vois absolument pas faire autre chose qu’enseigner la philosophie. Quoique pour écrire, j’ai besoin de beaucoup de temps libre devant moi. Dans un monde idéal, je pourrais prendre des années sabbatiques quand cela me plairait pour pouvoir partir quelque part et écrire tranquillement.

Cliquez ici pour accéder à la critique du roman.

Crédit photo: Jacqueline Savoie

Écrit par: Éric Dumais

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