«Vous n’avez aucun nouveau message» au Théâtre de l’Esquisse: l’amour à l’ère des complications

Trouver l’amour à Montréal en 2012 n’est pas facile. Jeanne, malgré toute sa bonne volonté, n’y arrive pas. Alors elle fait comme toutes les autres filles de son âge: elle analyse, pose des questions, parle à ses copines, se plaint, désespère, sort, rencontre des gars, et nous raconte ses histoires qui finissent invariablement mal.

Jeanne se demande quel genre de gars invite une fille chez elle le soir de la St-Valentin, seulement pour lui demander son avis sur un détail sans importance avant de la laisser tomber pour aller souper avec sa mère. Ou encore quel genre de gars séduit une fille dans une soirée de célibataires avant de lui dire qu’il est marié et père de famille? Parce que pendant ce temps, Jeanne a déjà imaginé «un scénario hollywoodien, genre ambiance tamisée, souper romantique, chandelles et pétales de roses». Jeanne consulte sa boîte vocale cinquante fois par jour. Se demande si elle doit rappeler le barman qui lui a laissé son numéro la veille, ou attendre trois jours «comme le veut la stupide règle»? Ou attendre qu’il appelle en premier? Elle se demande quoi porter, quoi dire, quoi faire, et surtout, elle se demande quelles sont les différents types de relations qu’on peut avoir aujourd’hui? «Fuck friends»? Fréquentation? Couple?

À première vue, ce n’est rien de nouveau. Tout sur le sujet a déjà été dit. Tout a été dit, mais pas par Tiphaine DeReyer, auteure du texte et seule comédienne sur scène. En quarante minutes à peine, Tiphaine DeReyer nous présente Jeanne, jeune réceptionniste française installée à Montréal et célibataire. Jeanne est imparfaite, chialeuse, parfois hystérique, certainement un peu névrosée, mais drôle, spontanée, rêveuse, charmante et terriblement attachante. Au fond, elle est un peu comme nous tous. Bonne idée de l’auteure d’écrire ces questionnements sous forme de monologue pour le théâtre. Ça change des romans de type «chick-lit» et des comédies romantiques au cinéma.

Sur une scène où sont dispersées plusieurs paires de chaussures de tous les types et où se trouvent également un immense pouf et le bureau de Jeanne, Tiphaine DeReyer nous livre une très belle prestation. Avec juste ce qu’il faut de folie et beaucoup d’humour, d’autodérision et plus de réalisme qu’on le pense, l’auteure et comédienne trace un portrait à peine caricaturé d’une génération de jeunes femmes qui osent encore rêver au grand amour, malgré toutes les malchances dont elles sont trop souvent victimes.

Appréciation: ****

Crédit photo: Théâtre de l’Esquisse

Écrit par: Camille Masbourian