ThéâtreCritiques de théâtre
Crédit photo : Jules Bédard
Avec Florence Longpré et Nicolas Michon au texte, on se doutait déjà que ça allait être drôle. Mais on ne s’attendait guère à être carrément stupéfié par la forme complètement éclatée que prend ce récit d’une profonde tendresse, qui raconte la relation entre deux individus aussi spéciaux qu’attachants. Maurice (Mathieu Lepage) est Asperger, et sauve un bon soir Sylvie (Longpré) d’une tentative de se jeter en bas d’un pont.
C’est ainsi que débute cette atypique histoire d’amour, qui nous sera racontée dans un enchaînement de vignettes, avec des transitions narrées par l’incroyable Fayolle Jean, et souvent interrompues par une chorale et un pianiste, qui restent sur scène du début à la fin, et qui transforment en étonnantes chansons des fragments de dialogues.
La musique d’Yves Morin est d’ailleurs un élément central du récit et surprend par sa vivacité et sa puissance, considérant qu’elle n’est interprétée qu’avec un piano et les voix des choristes. Les mélodies font sourire, et amènent une certaine tension dramatique.
Il fallait beaucoup de délicatesse et de subtilité pour concevoir et présenter un récit sur un sujet semblable, et en plus des artifices narratifs qui font mouche, le texte surprend par sa candeur et ses aspects aussi tendres qu’absurdes.
Les dialogues portent la signature de Longpré, avec des références inattendues et des juxtapositions d’idées saugrenues qui ne seraient pas déplacées dans Like-moi.
Longpré elle-même interprète Sylvie, de façon absolument crédible et attachante. Mathieu Lepage, dans la peau de Maurice, est fort impressionnant – on a du mal à l’imaginer autrement qu’avec sa coupe de cheveux étrange et ses pantalons à taille élastique. Pendant un moment particulièrement intense, il pleure réellement, ce qui a non seulement déclenché notre admiration devant l’étendue de son talent, mais aussi notre empathie pour le drame imaginaire qu’il vivait.
Sylvie aime Maurice est une pièce tellement déroutante et pleine de surprises qu’on a momentanément oublié le fait d’être arrivés à la dernière minute et, qui plus est, dans une salle où l’admission est générale et où nous avons été assis dans un endroit assez discutable. C’est une pièce qui nous a redonné foi et qui nous a confirmé qu’il y a encore moyen d’être original avec un médium d’une longévité aussi vénérable.
Une pièce que l’on vous recommande vivement sans hésiter, pendant laquelle le temps est suspendu, et l’émerveillement à son zénith.
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Par Jules Bédard
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de la rédaction