«Pendant le Jack Side Jazz Band»: l’instinct primitif du jeu – Bible urbaine

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«Pendant le Jack Side Jazz Band»: l’instinct primitif du jeu

«Pendant le Jack Side Jazz Band»: l’instinct primitif du jeu

Publié le 8 mai 2012 par Julie Racine

Décrire l’évènement théâtral Pendant le Jack Side Jazz Band n’est pas un exercice facile, puisqu’il s’agit avant tout d’une expérience qui ne se laisse pas saisir à partir d’un regard extérieur, mais qui se vit. Pendant le Jack Side Jazz Band, c’est un peu comme l’ouverture d’une porte inattendue pendant la lecture de Nos échoueries, premier roman de Jean-François Caron.

Il ne s’agit ni d’une adaptation ni d’une illustration scénique du roman, mais d’une «mise en jeu polyphonique» de Nos échoueries, un événement théâtral exploratoire mis en scène par Josée Laporte et organisé par la maison d’édition La Peuplade, qui a publié le roman et dont la mission est justement de peupler d’art le territoire. Pendant le Jack Side Jazz Band, c’est comme une discussion animée autour d’un roman, mais une discussion performée, débridée, où les impressions conservent leur forme instinctive et ressentie. S’arrêter sur une page, un chapitre et créer une brèche dans le fil du texte, qui ouvre l’accès à un monde parallèle, un peu comme le font les enfants qui se mettent spontanément à jouer ce qu’ils viennent de lire, projetant l’histoire hors de son cadre.

D’ailleurs, le personnage de Marie, incarné par Sara Létourneau, qui joue aussi La Farouche, son alter ego de l’autre côté, installée dans son cadre de porte qu’elle transporte littéralement sur scène, tentera d’empêcher le personnage de Lui de franchir le seuil, voudra le rappeler à sa «réalité». Pendant le Jack Side Jazz Band, c’est en quelque sorte un retour à l’instinct primitif du jeu, entièrement porté par l’imaginaire, qui fait éclater l’histoire hors des limites de son territoire textuel, qui la déforme.

Attention, cependant: confronter sa propre lecture de Nos échoueries, ses images, ses personnages (car une fois lus, ils nous appartiennent), aux mêmes images, aux mêmes personnages portés par l’imaginaire d’un autre, est une expérience violente, qui heurte toujours. Entendre cette musique autre et voir le piano, le matelas, Marie sous cet éclairage, bouscule. Sauf qu’être heurté, pendant le Jack Side Jazz Band, est loin d’être négatif. Une fois le seuil franchi, un dialogue s’installe entre les imaginaires. Et on a envie de jouer les livres, nous aussi.

Pendant le Jack Side Jazz Band, expérimenté pour la première fois à la maison de la culture Frontenac le 19 avril dernier, a eu lieu le 4 mai au Saint-Barthélemy, à Chicoutimi, dans une salle comblée. Une approche du livre unique et participative misant sur la spontanéité et le ressenti, qui fournit une «troisième dimension» à la littérature, qui permet aux œuvres d’exister par-delà la matérialité du livre. À refaire.

Appréciation: ***1/2

Crédit photo: La Peuplade

Écrit par: Julie Racine

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